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SUR LE BATEAU DES PRIMAIRES ?

lundi 31 août 2009
par  Gérard Bélorgey
popularité : 96%

par une politique de redistribution et de solidarité est le schéma simplifié et séduisant de toute ambition socialiste, et d’ailleurs le fond de commerce de cette famille politique. La rentrée pseudo novatrice de la Rochelle illustre les difficultés qui existent lorsqu’il faut savoir, au plan politique, comment opérer pour chercher à accéder au pouvoir, au plan économique quelle est la stratégie possible pour mettre en oeuvre de telles ambitions sociales.

Au premier titre, la question piège est bien celle de savoir si l’on doit afficher la recherche d’une alternance frontale entre droite et gauche (dont le succès est sans doute peu crédible) ou celle d’un glissement significatif vers moins d’inspiration de droite et plus d’inspiration de gauche (dont le succès est également incertain, parce que c’est moins mobilisateur pour les clientèles traditionnelles de gauche). Et derrière cette option, il y a la question, par les effets des scrutins majoritaires, du poids des institutions en faveur de ce qui reste la bipolarisation (électorale du moins), alors que le problème de nos institutions (c’est à dire des scrutins majoritaires auxquels ces institutions se résument largement et auxquels sont en fait attachés ceux de gauche qui veulent croire ou faire croire aux vertus apparentes de la vieille alternance) n’est pas vraiment posé par l’opposition. Or, sortir de cette bipolarisation là, donc de la toute puissance des scrutins majoritaires, serait de l’intérêt des centres de progrès, comme d’ailleurs de tout parti contestataire minoritaire. On voit que la question des alliances pour les élections présidentielles ne peut être vraiment traitée dans une perspective à moyen terme si elle est déconnectée de la question du mode de scrutin législatif.

Sur ces fondamentaux c’est plutôt partout le "silence radio", au sens exact du terme puisque les médias n’en parlent guère. Quant à la manière, en cas de succès et, avant tout, comme moyen de celui-ci, de concevoir des bases communes pour la gestion éventuelle des affaires du pays, on en est très loin de toutes parts. La Rochelle a fui les vraies questions (comment résoudre les problèmes des Français) au profit de questions tactiques (comment résoudre le problème des socialistes). Le jeu s’est donc ramené à celui de savoir comment seraient désignés des candidats à une présidentielle, sans redéfinir sur quelles bases stratégiques un bon candidat serait possible. Ceci illustre d’abord que c’est le scrutin présidentiel qui continue à obérer toute la vie politique française, alors que les résultats de législatives pourraient, un jour, démentir - par des alliances originales ou par l’engagement de certains de créer pour l’avenir une vraie une dose de représentation proportionnelle - le mécano mortel du quinquennat qui n’a voulu permettre que "la démocratie absolue" des cartels opposés. Et la Rochelle, par le choix des primaires, renforce pour l’instant, faute d’accompagnements de fond, la nature "présidentialiste" du régime. Ce qui était probable et vient d’être acté, c’est la charrue avant les boeufs, dans la plus grande confusion, car on ne peut savoir ni quel serait un corps électoral, ni comment se présenteraient devant lui des candidats ; c’est que le PS en optant pour des primaires ouvertes pour désigner un candidat présidentiel, se soumet à une espèce de large contagion du système des adhésions à quelques euros qui avaient rallié des militants de circonstances pour choisir, avec la campagne et le résultat que l’on sait, Ségolène Royal.

Et l’on voit bien qu’au sein du PS, serait sans doute bénéficiaire de ce jeu le plus grand dénominateur commun de popularité, combiné avec le plus petit dénominateur commun de programme, donc une personnalité ayant une bonne image d’ouverture et qui serait aujourd’hui la plus appréciée des Français, avec pour celle-ci l’avantage qu’en général ces Français - intoxiqués à merveille- n’ont pas compris que l’ordre libre échangiste européo- international qui paraît le credo des profils auxquels on peut penser (sauf si un postulant venait à mettre beaucoup d’eau dans ce vin) est incompatible avec la satisfaction de leurs attentes en matière de sécurité de l’emploi et plus généralement de garanties de leur niveau et conditions d’existence. Ainsi le choix des primaires prépare peut-être de fausses alternances en occultant les vrais débats, institutionnels et économiques.

Le fond du débat institutionnel escamoté mais à ouvrir, en revenant aux données essentielles, est le suivant : la première est qu’une opposition fragmentée ne peut, dans un système majoritaire, triompher d’un pouvoir bâti sur une coalition unitaire ; la seconde est que les composantes minoritaires de cette opposition ne peuvent se rallier à une candidature unifiée de celle-ci que si ces minoritaires (de gauche et du centre) ont des compensations de représentation politique et, solidairement, des prises en compte de leurs points de vue dans une plate forme et un programme.

La première conclusion, politique, à en tirer est évidente : une candidature présidentielle unifiée pour gauches de toutes les natures et centres de progrès supposerait que le candidat "unique" s’engage en cas de succès à faire instaurer la représentation proportionnelle pour les législatives, ce qui ferait échapper les centres à la bipolarisation et les gauches à la soumission. Et l’on sait bien - cf. sur ce site les différentes études en ce sens - qu’une république présidentielle saine et vraie est tout à fait possible dans l’équilibre et le dialogue entre un pouvoir exécutif unifié et un pouvoir législatif pluriel. Le premier élément d’un portrait robot pour un candidat unifié d’opposition aux présidentielles serait qu’il s’engage pour la RP comme régime à appliquer à des législatives ultérieures (et que ceci soit préfiguré par des accords électoraux équitables pour les législatives succédant immédiatement à la présidentielle).

Le second débat, économique lui, que ne veut, pas plus que le premier, ouvrir un PS qui ne cesse de l’esquiver - c’est si vrai que pas un de ses bavards n’en parle, les plus mauvais se contentant des langues de bois sur le "pouvoir d’achat", alors que le pouvoir d’achat n’est pas un levier qu’on décrète, mais un résultat d’une bonne politique économique - est celui des moyens d’une résorption des inégalités et de sécurisation des garanties sociales et de l’emploi. Or cette ambition là est, à nos yeux, incompatible avec une stratégie qui accepte les fondamentaux du libre échange mondial, lequel exige de profondes inégalités pour assurer le financement privé des investissements productifs et pour faire face aux concurrences des pays à bas coûts de revient sociaux, fiscaux, environnementaux. Tant que ce débat n’est pas clairement ouvert et que les bibles de fait de la majorité du PS sont le site de "Terra Nova" et la revue " Alternatives Économiques" (qui est bien illustrée par ce récent article prétendant comparer libre-échange et protectionnisme et concluant que le second est tout simplement "contraire à l’intérêt général"), il n’y a pas d’avancée possible. Ces idéologies n’ouvrent que des "alternatives" fictives parce que leurs bonnes préconisations de redistribution sociale sont sans moyens économiques d’être assurées dans un monde qui resterait soumis à la concurrence inégalitaire libre-échangiste.

Bien différemment, le programme minimal d’un candidat unique des oppositions devrait comporter une dose de financement public - donc en définitive fiscal par une révision équitable et productive de notre fiscalité - de l’économie marchande et assortie de compensations pour les consommateurs modestes contre des effets possibles d’augmentation de prix, la prévision des protections nécessaires contre les ouvertures européennes abusives aux importations de biens et de services des low cost countries, selon des schémas raisonnables que nous avons eu l’occasion d’exposer sur ce site.

Voici donc le second point de son portrait robot souhaitable. Il ne s’agit d’aller ni à une économie nationalisée, ni à un protectionnisme sommaire : entre deux références, l’une et l’autre excessives, celle d’une part d’une économie libérale par l’appropriation privée quasi exclusive, le financement également privé et les échanges commerciaux internationaux non régulés - ; celle, d’autre part d’une économie qui serait dirigée par la puissance publique et dogmatiquement fermée aux concurrences externes - il y place et besoin d’un modèle français toujours recherché : celui d’un dosage intelligent négocié entre partenaires économiques et sociaux et avec les pays tiers.

Ce n’est pas uniquement avec la redistribution - qui est le seul outil que proposent en fait les socialistes libéraux, se distinguant à peine des libéraux sociaux - que l’on détiendra les moyens de résorber un peu mieux inégalités et injustices , ni de maintenir la machine économique en état suffisant pour répondre aux besoins d’emplois et de services publics ; de plus, la redistribution seule heurte de front la mécanique libérale en contrariant l’incitation à investir des riches et en augmentant les coûts ; elle ne peut donc qu’enrayer le processus libéral et donc échouer en donnant raison aux libéraux purs et aux adversaires des efforts sociaux. Rallier sur de telles bases des centristes de progrès ne doit pas être plus difficile que d’y rallier des socialistes libéraux, et c’est la condition du support par les autres gauches, voire par une part de l’électorat "souverainiste" de droite auquel le Président de la république a beaucoup annoncé en matière de protection économique mais guère apporté.

Ce portrait robot d’un(e) bon(ne) candidat(e) présidentiel(le) doit inclure la fermeté à l’encontre de toutes les dérives et complaisances de la part abusivement permissive de la société contemporaine. Ceci inclut évidemment la lutte contre les crimes, délits et incivilités, assortie de l’exigence de probité de la part des détenteurs de moyens d’ordre public et de la dotation nécessaire à la dignité de l’administration de la justice et de l’administration pénitentiaire. Importantes dépenses budgétaires qui ne sont possibles qu’avec une meilleure équitable fiscalité et avec une économie suffisamment protégée pour permettre une croissance nationale offrant une base solide aux prélèvements publics. La fermeté contre dérives et complaisances c’est aussi l’instauration, le respect et le paiement des protections contre la dégradation de l’environnement, autrement que par une taxe sur les dépenses d’énergie des consommateurs français lorsque le monde entier en est dispensé et fait librement entrer ses produits ayant pollué la planète dans nos circuits d’importation et de distribution. L’écologie doit d’abord être une police aux frontières comme en interne, et parallèlement une innovation en faveur des activités de substitut aux activités et moyens polluants.

Je ne pense pas que ces trois points du portrait robot - même s’ils s’inscrivent sur une ligne de crête d’un volontarisme passant par une porte étroite entre la caricature de mesures de gauche par la droite, et la soumission de la gauche à ce que le libéralisme libre échangiste mondial veut faire passer pour inéluctable - ne puissent être réunis par plusieurs personnalités de qualité et pouvant venir de sensibilités différentes. Mais de plus, une vraie difficile plate-forme à concevoir, comme à faire approuver par les citoyens, concerne la politique de l’immigration. C’est une pierre de touche entre droite et gauche classiques ; c’est une pierre de touche entre générosité et égoïsme, c’est une pierre de touche entre bonne mondialisation (celle qui accueille les hommes) et mauvaise mondialisation (celle qui ne voudrait accueillir que marchandises et services à bas prix). Il faut penser qu’une économie raisonnablement protégée contre les seconds favorisera une société plus tolérante pour les premiers. C’est l’un des grands chantiers d’éducation populaire auxquels un homme ou une femme voulant répondre au portrait robot devra savoir se consacrer aussi.

Le blog de Gérard Bélorgey : http://www.ecritures-et-societe.com


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