LA GAUCHE : LE RETOUR ?
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Comme chaque année, une avalanche d’ « universités » d’été des partis de gauche s’est répandue sur les derniers jours du mois d’août. A la Gauche Cactus, nous ne sommes pas très friands de ces raouts : on y parle beaucoup boutique, et nous ne sommes pas une boutique, n’ayant ni « présidentiable » à promouvoir, ni tee-shirts ou cartes postales à écouler, ni circonscriptions à échanger. Depuis quatre ans, ces universités sont précédées d’une rencontre à Lorient, organisée par l’association Vent d’Ouest. Un lieu d’échanges entre les différentes familles de la gauche, où personne n’est là en tant que porte-parole d’une organisation. Ce qui n’empêche toutefois pas toujours les discours convenus, mais, en général, la plupart des participants essaient d’échapper à la langue de bois. Vent d’Ouest a l’amabilité d’y inviter le Cactus, alors on y va.
La plateau de cette année rassemblait trois élus communistes, Jean-Claude Sandrier, député du Cher, Gérard Lahellec, élu du Conseil régional de Bretagne et Marie-George Buffet, deux élus socialistes, le député européen Stéphane Le Foll, réputé « hollandais » et le jeune conseiller régionale G. Bui, remplaçant au pied levé Marilyse Lebranchu, réquisitionnée à La Rochelle, proche de Martine Aubry. Le président (PS) de la région Bretagne, Jean-Yves Le Drian, avait envoyé une vidéo. La mouvance écologique était représentée en force, avec l’ancien secrétaire d’état et nouveau conseiller régional Guy Hascoët, pour Europe Ecologie, et le « dissident » Daniel Cueff, lui aussi conseiller régional mais élu sur la liste conduite par Jean-Yves Le Drian. Ajoutons-y Mona Braz, conseillère régionale régionaliste (Union Démocratique Bretonne), élue sur la liste Hascoët. Et last but not least, Jean-Luc Gonneau pour la Gauche Cactus. Le Parti de Gauche, pourtant habitué de la rencontre, était absent. Il semble que les bisbilles locales (le Parti communiste avait fait liste commune aux régionales avec le PS) aient conduit le PG à bouder. Dommage. Et la Gauche Unitaire s’était fait excuser.
La rencontre de Lorient, entre autres intérêts, permet de prendre la température de la gauche dans un climat amical, convivial, entretenu par les animateurs de Vent d’Ouest, Daniel Gilles et Thierry Goyet, tous eux élus locaux du PCF. Elle était, la température, presque touchante d’unanimité, chacune et chacun, ou presque, faisant assaut d’irrépressibles sentiments unitaires. Tous ensemble, tous ensembles, ouais, pour battre Sarkozy. Tous d’accord, ou presque, pour considérer que le nom du candidat n’était pas une priorité, mais qu’il fallait se mettre d’accord sur un programme. Chacun se fendit de ses propositions de priorité, en prenant soin d’éviter les choses qui pourraient fâcher (les écolos assez soft sur le nucléaire, les communistes sur les éventuelles nationalisations, tout le monde au presque sur l’Europe). De l’accord général proposé par les socialistes, sans volonté hégémonique bien sûr (le jeune Bui, emporté sans doute par son élan, alla même jusqu’à proposer un partage des circonscriptions législatives avant les élections, ce qui le fit reprendre, courtoisement, par Marie-George Buffet ; deux jours plus tard, à La Rochelle, les très nombreux aspirants ministres socialistes jaugeaient la composition de leur futur gouvernement : 15 places pour le PS, 5 pour les autres, mais pas d’hégémonie, hein) au « programme partagé » annoncé par Marie-George, la quasi unanimité était touchante. C’était compter sans le cactusien : certes, un accord programmatique est toujours possible, mais à quel prix (idéologique) ? Marie-George Buffet avait elle-même signalé les divergences qui demeurent entre les familles de la gauche. Ces divergences, en tout cas les principales, ce ne sont pas des accords d’appareils qui pourront les trancher mais l’avis, et si possible les propositions de la population sur ces questions. Considère-t-on, vraiment, que l’emploi et le logement accessible sont des priorités ? Prioritaires, par exemple sur « la dette » ? Pense-t-on vraiment que les propositions des uns et des autres, et même certaines bien timides avancées par les socialistes ou les verts, seront réalisables sans une révision quasi complète des règles européennes ? Pourtant, la quasi-totalité des intervenants ont été silencieux sur le sujet, ou bien ont chanté des refrains bien connus, du genre « le problème de l’Europe, c’est sa démocratisation » (démocratiser sans changer les traité ?) ou bien (refrain écolo) « c’est dans une Europe de régions qu’est la solution » (en gardant la concurrence « libre et non faussée » comme fil directeur ?). Taxer davantage le capital, tout le monde est pour. Mais comment, cela reste un mystère. Les stock options ? On verra. Les spéculations financières et immobilières ? On est contre. Les gouvernements de gauche que nous avons connus depuis 1981 étaient contre aussi. On a vu le résultat. Aussi les chances d’aboutir à un projet commun à toute la gauche d’ici à 2012 sont-elles infimes. Dans ces conditions, que le PS présente un candidat, c’est bien normal. Que les écologistes se préparent à faire de même, ça peut se comprendre. Que ce que nous appelons la « gauche de gauche » soit aussi présente lors de l’échéance présidentielle, c’est nécessaire. Ce qui n’empêche pas (le cactusien se veut là rassurant) le soutien au second tour du candidat de gauche le mieux placé.
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