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UNE CRISE DE CIVILISATION ?

Par Espace Marx
dimanche 5 décembre 2010
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L’association Espace Marx organise les 21 et 22 janvier prochains un colloque dont nous reproduisons ici le texte introductif.

La question de la crise – « crise financière » pour certains, « crise systémique du capitalisme » pour d’autres – s’est imposée dans le débat publique et dans les consciences. Tout le monde admet que « ça ne peut pas continuer comme çà ». Mais il y a aussi, accumulant ses effets sur longue période, une énorme « crise sociale » qui se décline sur tous les terrains : crise de la cohésion sociale, crise urbaine, crise des systèmes de protection sociale et de solidarité, crise démocratique… Et il y a la crise climatique, les crises alimentaires, la montée des tensions dans le monde, les problèmes posés par les migrations, et la multiplication de « guerres de basse intensité », le terrorisme, etc. Au fond, y a-t-il des crises, ou vivons-nous une grande « crise planétaire » aux multiples dimensions ? Et si c’est le cas, de quoi est-ce la crise, et où en sommes-nous ?

Il y a eu l’affaire des « subprimes » et la révélation du cancer métastasé par la titrisation des créances douteuses, suivi de l’ahurissante mobilisation en quelques semaines de milliers de milliards de dollars pour « sauver » le système financier. Et il y a aujourd’hui cette tout autre réalité, aussi stupéfiante, de pays développés attaqués par ceux qu’ils ont sauvées et menacés de faillite, avec une zone euro et une Union Européenne qui vacillent, se lézardent, et dont l’avenir est plus qu’incertain. Crise financière, crise de l’économie réelle et du travail, crise de la dette, crise sociale.... à quel stade nous en trouvons-nous, et comment s’articulent ces crises ? Peut-on parler de « sortie de crise » ? Ces crises ne sont-elles pas des dimensions, et des conséquences, d’une crise de l’ensemble du mode d’accumulation et de régulation du capitalisme financiarisé, à l’échelle du monde ? Sur quels terrains chercher les réponses à cette crise ? Ces crises, cette crise, produisent-elles des contradictions, des conditions, des potentialités nouvelles pouvant constituer des points d’appui pour la transformation émancipatrice ?

La crise écologique pose des questions angoissantes qui appellent des réponses urgentes. Plus fondamentalement, elle interroge l’humanité sur la façon dont elle peut vivre ensemble sur la planète, aujourd’hui et demain : comment 9 milliards d’être humains pourront-ils habiter la Terre sans la détruire, ou se détruire ? Il est impensable, sans imaginer une humanité à deux vitesses désormais impossible, d’en rester à la conception de la croissance héritée des siècles derniers qui se heurte déjà aux limites indépassables de la biosphère, et au refus de la plus grande partie de l’humanité d’accepter le maintien de la domination occidentale sur le reste du monde. Comment répondre alors aux questions que pose l’objectif d’un développement humain soutenable, plus égalitaire et solidaire ? Comment aller vers la satisfaction universelle des besoins humains fondamentaux ? Comment pouvons-nous les repenser, et mettre en cause un système qui lie emploi, productivisme, consumérisme, mise en concurrence de chacun contre tous, et tend à marchandiser toujours davantage toute ressource, toute activité et toute forme de vie sur terre ? La question de savoir quelle humanité nous voulons être, et quelle vie nous voulons vivre ne nous oblige-t-elle pas à mettre une nouvelle conception et articulation du social, de l’environnement, de la solidarité et de la culture au cœur du développement ? Le sommet de Copenhague a montré l’incapacité incroyable des Etats à trouver une solution à un problème urgent et vital pour tous les êtres humains. On a parlé de crise de gouvernance mondiale. Mais le problème ne réside-t-il pas plutôt dans une déficience démocratique qui interdit aux peuples de débattre des problèmes qui leur sont communs, de plus en plus importants, pour y apporter ensemble des réponses face à des pouvoirs exorbitants concentrés entre les mains de nombre réduit de super-puissants ? Ne faut-il pas rapprocher cette situation de la crise démocratique qui, dans chaque nation comme à l’échelle régionale, donne aux citoyens le sentiment qu’ils n’ont pas prise sur le cours des choses ? N’est-on pas placé devant l’exigence d’inventer une démocratie de nouvelle génération, du local au mondial, permettant aux peuples de reprendre la main sur des pouvoirs qui leur échappent aujourd’hui de plus en plus ? Quelle démocratie politique peut-on construire sur la capacité d’intervention individuelle et collective des citoyens, sur le postulat de leur égalité politique absolue ? Ne doit-on pas développer une exigence de démocratie économique pour dépasser la réalité actuelle des Etats devenus ’market states’ ? Peut-on construire une démocratie économique sans poser la question de formes nouvelles d’appropriation sociale ?

Comment arracher ce changement des mains des pouvoirs ? La domination du capital est plus brutale que jamais, mais les rapports de force se sont gravement détériorés, ces dernières décennies, au détriment du travail. Les transformations des sociétés et du monde, et les impasses du 20ème siècle, ont estompé les repères qui avaient permis que se construise autour de la classe ouvrière un « bloc social » conscient de ses intérêts communs et de ceux qu’il avait à affronter. Le nombre des exploités grandit, comme s’élargissent les champs de l’exploitation. Mais la financiarisation mondialisée du capital, les transformations rapides de la production et de la division internationale du travail, la concurrence généralisée, l’exacerbation par les forces qui soutiennent le capital des contradictions et des divisions qui traversent les sociétés font obstacle à la construction d’une nouvelle conscience de classe. Cela ne dessine-t-il pas une crise idéologique qui appelle des élaborations nouvelles : une représentation des contradictions et des forces à l’œuvre, des enjeux actuels de la lutte de classes et de ses acteurs ? Quelles sont les théories les plus à même de dépasser l’impuissance des classes exploitées ? Quelles sont les expériences les plus porteuses de transformation émancipatrices ? Peut-on imaginer reconstruire un nouveau « bloc social » donnant force et sens aux luttes sans poser cette question à l’échelle internationale ? Quels outils nouveaux est-il nécessaire de chercher à se donner ?

Toutes ces crises sont enchevêtrées. Elles marquent les impasses dans lesquelles conduisent non seulement un système capitaliste qui atteint des limites, mais aussi une conception des rapports des hommes à la nature et entre eux. Jamais la conscience de l’unicité du monde n’a été aussi forte. Peut-on vivre ensemble dans ce monde sans remettre en question les valeurs, les principes et les conceptions que, sous le nom de « mondialisation », le capitalisme occidental cherche à étendre au monde entier. Ne faut-il pas penser au contraire une « mondialité » qui organise la vie en commun dans le respect du dialogue et le mélange des cultures ? Ne vit-on pas, au total, une crise de civilisation qui en appelle une conception radicalement nouvelle ?

Le site d’Espace Marx : www.espaces-marx.org


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