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SUJETS INANIMES, AVEZ-VOUS DONC UNE ÂME ?

dimanche 17 avril 2011
par  Jacques Broda
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L’âme naît du souffle de vie, du souffle d’amour, de l’amour du faire l’amour, de chair à chair, s’éclipse le sexe de l’homme. Amant de mon âme. Pleine du lait de la tendresse humaine. L’âme vient de la promesse, elle est la promesse faite au bébé, à l’enfant, la promesse du temps dont il est une forme vivante, animée, l’âme est le sujet innocent à lui-même, innocenté. Le souffle de vie ne suffit pas à faire une âme, s’il n’y a la promesse, le souffle de vie, n’est qu’une vie sans âme, une vie biologique, une vie consommée. Passer de la promesse au désir enjambe le réel. Le capitalisme a tué l’âme dans l’oeuf du serpent, à travers la coquille on devine un hamburger ! Quand la consommation, et les images folles prennent la place de la production et de la promesse naissent des monstres. Infâmes. Des monstres sans âmes, la désâmisation vient après la déshumanisation inaugurée il y a 70 ans à Auschwitz.

Dans le plus-de-jouir de la ‘cruauté passive’, l’âme meurt à petit feu, à chaque minute, àchaque seconde, à chaque instant où le silence couvre le crime, le meurtre de masse. « A partir de quand la ‘cruauté passive’ qu’est l’indifférence devient-elle mépris et hostilité. »(1) Ce meurtre s’accomplit par tous et chacun d’entre nous quand nous cédons lâchement à l’ignoble exploitation de l’homme par l’homme, de l’homme par le fils de l’homme, quand nous renonçons à la révolte indignée, organisée, proférée, à dire non à l’inceste et la drogue, les deux lignes de fuite de l’âme. Elle n’ira pas habiter un autre corps, une autre espèce, elle disparaît dans la nuit des temps, d’une promesse non tenue, détenue. L’âme n’est plus prisonnière du corps, de la chair, elle a déserté le corps et la chair, pour disparaître entraînant avec elle la notion de bien absolu, pour laisser place au fric, la violence, la haine populiste.

C’est insidieux, au début on ne s’en rend pas bien compte, on se dit : ‘c’est anecdotique, ponctuel, éphémère, accidentel’, on n’en croit pas ses yeux, ni ses oreilles, on se dit : ‘ ce n’est pas possible, pas lui, pas moi…’. Pourtant, il y revient malgré tous les dires, elle insiste, malgré les explications, les discours, les dialogues, les psys. Comme pour l’inceste, la violence, la drogue et le racisme, ‘une fois’ devient coutume, pulsion, habitude, façon d’être. L’attitude fait symptôme, devient une façon d’être. S’enclenche alors un long processus chaotique, avec des hauts et des bas, une chute, une descente aux enfers, il y a parfois un mieux, une lueur, un espoir, on se dit : ‘c’est fini, c’est gagné, ce n’était qu’un temps, une crise, un épisode…’. Et puis, ça repart de plus belle, de plus en plus loin, de plus en plus grave, de plus en plus mal. Comme un train fou, qui a pris de la vitesse, ne peut, ne sait plus s’arrêter. Cette accumulation fait structure, système. La crise est systémique, certes, la crise est structurelle, celle du capital et du sujet. C’est la même ! La crise de la valeur.

On ne pourra réaliser la révolution sans âme, sans peur ni reproche, aller chercher loin au fond de la promesse sociale d’un autre possible, où chacun sera accueilli pour ce qu’il est et non pour ce qu’il a. Il naît pas en dehors de la promesse faite à lui-même par ceux qui l’aiment, en leur âme et conscience, de classe. Alors il revisitera l’A.I.T (Association Internationale des Travailleurs) en son acte premier : « Statuts de la Première Internationale des Travailleurs : L’A.I.T a été fondée, elle déclare que toutes les sociétés et individus y adhérant reconnaîtront comme être la base de leur conduite, envers tous les hommes sans distinction de couleur, de croyance ou de nationalité, la vérité, la justice et la morale. Pas de devoirs sans droits, pas de droits sans devoirs. » (2). Ni Dieu, ni Maître, croyant tuer le Maître, ils ont tué Dieu en son idée. Dieu est mort : tout est permis. Le libéralisme libertaire en faisant du sujet un être sans foi, ni loi, accomplit la plus grande révolution anthropologique de tous les temps par la déshumanisation-désâmisation violentée. La révolution informationnelle est un leurre, une illusion, elle participe du partage des connaissances, sujet de la technique désaffectée, homme de l’organisation soumis aux registres pulsionnels des images jouissives.

Réification de l’homme, animation de la chose, il y a transfert de l’âme à l’argent, l’objet, la marchandise, le fétiche, la machine, est aimée, animée, les objets techniques commandent à l’être dans l’avoir. Il y a transfert du sujet à l’objet ; l’étreinte dans son empreinte sincère du vent. Elle ne tient plus la promesse d’un autre monde, d’un autre sujet au monde, au bien commun. L’eau, la terre, le travail et la culture sont des biens communs, ne sont pas des seuls biens économiques, ils sont du côté du Bien, du faire bien, du bien faire le bien communément, ensemble, communistement. Il y a une âme, un souffle, un désir, un Idéal, une idée de soi à soi, une conscience.

La promesse, d’un pacte, d’une alliance, de sujets animés par le même désir, donnerait une âme à notre projet politique supérieur aux harangues populistes ; car le populisme est le pire ennemi de classe dans la classe. La promesse nous a été faite, nous devons la transférer, la transformer non pas en promesse électorale, mais en promesse de rupture avec le carnage éthique du monde présent. Ce monde il nous incombe d’en prendre soin, comme d’un bien d’héritage, une richesse d’humanité, transcendants les siècles et les hommes par le maintien de l’être dans son avoir une âme. Une nouvelle barbarie est en route : une humanité sans âme(s) ; les anciens ne s’y trompent pas, ils savent pour l’avoir connu, la perte essentielle de l’âme du sujet. Nous sommes au-delà de la crise du lien social, de la fracture, de la crise systémique, nous sommes dans la rupture anthropologique d’un monde sans âme(s).

Cela vient d’être dit. La tension de toutes les forces de résistance doit organiser une riposte révolutionnaire, sans état d’âme, sur-résister, ne pas se contenter de demi-mesures collaborationnistes. Toutes les capacités, énergies, vitalités, pensées doivent mesurer l’ampleur du désastre en termes moraux ; tenir propos, discours et paroles sur ce registre. Il faut dénoncer avec vigueur, violence lyrique, le génocide en cours, arrêter de se voiler la face, croire ou laisser croire que l’on pourra changer un monde, sans âmes. Marx disait : « La religion est l’âme d’une société sans âme… d’une société sans âmes (rajouté par nous). »

(1) Karla Grierson ; « Discours d’Auschwitz », Ed Honoré Champion, Paris, 2003.

(2) Karl Marx ; « Critique du programme de Gotha » , Paris, Editions Sociales, 1950.

Jacques Broda est professeur de sociologie à l’Université d’Aix-Marseille


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