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Constitution Européenne et « modèle social » européen : analyse juridique d’une imposture politique

Par Serge Regourd
dimanche 3 avril 2005
par  Serge Regourd
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Constitution Européenne et « modèle social » européen : analyse juridique d’une imposture politique

Par Serge Regourd

Le débat sur le projet de constitution européenne illustre une fois encore, mais sous un jour particulièrement cynique, les « ruses de la dialectique » : ceux-là mêmes qui célèbrent bruyamment les vertus du « modèle social européen » et d’une Europe sociale participent d’une entreprise de démantèlement dudit modèle...

En quoi consiste -ou consistait- ce modèle ? En une synthèse entre, d’une part, des principes de liberté, qui fondent le système de démocratie libérale bâti sur une économie de marché, et d’autre part, des valeurs d’égalité ayant fondé l’intervention publique et la soustraction corrélative aux logiques du marché et du profit d’un certain nombre d’activités caractérisées par leur portée d’intérêt général. C’est cette mise hors marché qui a, en particulier généré les logiques dites, en droit français, de service public. Il est -ou était- légitime de raisonner en termes de « modèle européen » dans la mesure même où tous les Etats de l’Europe Occidentale avaient souscrit à une logique comparable de services publics, d’interventions publiques caractéristiques de l’Etat providence, quelle que soit la diversité terminologique propre à la diversité linguistique des Etats concernés : l’Education, la Santé, les Services sociaux, mais aussi les grands Services en réseaux -transports ferroviaires, transport aériens, postes, télécommunications, distribution de gaz, d’électricité...- étaient partout organisés dans le cadre d’interventions publiques, le plus souvent sous forme d’entreprises publiques, en position de monopole. Il n’est pas jusqu’aux systèmes de radio et de télévision qui n’aient été organisés selon cette logique de service public. Il convient de relever, au passage, que la formulation désormais traditionnelle relative à un « service public à la française texte l’Europe accèderait à une réelle dimension politique -correspondant à la nature constitutionnelle du texte- et constituerait une « avancée » démocratique et sociale. Ils en minimisent, ou en occultent, à l’inverse, les caractéristiques intrinsèquement libérales. Ces dernières constituent pourtant l’essentiel du contenu du projet alors que ses vertus « démocratiques » sont, hélas, fort contestables

I - La peau de chagrin des « avancées » démocratiques

Les supposées « avancées démocratiques » correspondent, d’une part, aux progrès institutionnels dans les processus décisionnels, d’autre part, », ou à une « conception française du service public » visant à désigner une singularité de la France en ce domaine, pour mieux la stigmatiser, est en réalité parfaitement erronée : tous les Etats européens ont connu des périmètres, et des modes d’organisation, du service public comparables. Les seules nuances concernaient les formes juridiques plus spécifiques à certains pays, ou davantage encore, le caractère plus ou moins décentralisé -ou centralisé- des modes d’organisation. La véritable spécificité française en ce domaine est relative au discours politique d’accompagnement, ou si l’on préfère à l’explicitation des fondements et des finalités politiques des services publics. Alors que la plupart des autres pays européens ont, en quelque sorte, fait des services publics, comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, sans le savoir, en répondant, empiriquement, à des besoins sociaux qui ne pouvaient être abandonnés à la pure logique du marché, la France s’est caractérisée par une revendication théorique et conceptuelle du service public, alimentée aussi bien par les constructions doctrinales des « juristes-sociologues », que, notamment, par la relation établie sur le terrain du service public de l’enseignement avec les débats sur la laïcité . Bref, la question de la République conceptualisée dès la III° République intégre la question des services publics. Ce que l’on a qualifié en France, dès cette époque, de « Pacte Républicain » entre les principales forces politiques, concerne précisément la mise hors marché d’un certain nombre d’activités sociales. Mais cette déclinaison française est bien conforme à ce que la vulgate contemporaine qualifie de « modèle social européen ».

Dissociée d’un tel modèle, la construction communautaire a été fondée, dès l’origine, sur une conception proprement libérale du marché Européen. Dès 1957, le traité de Rome est organisé autour des quatre libertés fondamentales qui n’ont cessé de structurer les textes, et les politiques, subséquents : liberté de circulation des marchandises, des services, des capitaux et des personnes. Le discours politico-médiatique dominant procède toujours, lorsqu’il s’agit d’identifier les origines politiques de l’Europe, aux lendemains de la seconde guerre mondiale, à une confusion entre cette Europe proprement économique, instituée sous le nom de Communauté Economique Européenne (CEE) et une autre Europe, proprement politique ; le Conseil de l’Europe, constitué plusieurs années auparavant, autour de la mise en œuvre des principes démocratiques et de la protection des droits et libertés des ressortissants des Etats membres dans le cadre de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme (1950)... Les traités ultérieurs au traité de Rome, au premier rang desquels l’Acte Unique (1986), ont accéléré, et approfondi, cette dynamique proprement libérale avec le passage au « marché unique », puis avec le traité de Maastricht (1992) à la « monnaie unique ». L’insolente prévalence des logiques de l’Europe marchande et son « déficit démocratique » -dénoncé même par Mme Thatcher !...- ont évidemment convaincu ses promoteurs de la nécessité de lui insuffler une dimension politique, sous peine de la priver de toute légitimité. Et il n’est guère contestable que les traités successifs ont pris en compte, aux côtés des dispositions proprement économiques, un certain nombre de préoccupations de nature politique, et institutionnelle. Mais le déficit démocratique et social n’a guère été comblé malgré les extravagantes promesses avancées dans le contexte du référendum de Maastricht, voici plus de 10 ans... Entre-temps, les interprétations et applications du droit des traités ont considérablement conforté et accentué les tendances libérales de la construction communautaire. Les quelques « éclaircies » jurisprudentielle de la Cour de Justice des Communautés qui ont pu toucher le traitement des services publics -Services d’intérêt économique général (SIEG) dans la terminologie communautaire- apparaissent désormais comme de lointaines oasis dans le désert du droit de la concurrence, et le droit dérivé sous forme de directives se présente, comme un droit de libéralisation, dissolvant systématiquement l’organisation des services publics des Etats membres, dans tous les services en réseaux : transports, énergie, communications, postes... C’est dans ce contexte global de libéralisation à marche forcée, de généralisation du droit de la concurrence et d’ouverture des marchés, de restructurations et de délocalisations d’entreprises sous la pression de ces logiques concurrentielles que se présente le projet de Constitution Européenne. Le projet initial se donne bien, pour ce qu’il est : « constitutionnaliser » l’état du droit libéral qui a depuis l’origine caractérisé la construction européenne. Il convient de faire justice sur ce point aux défenseurs de ce projet. Il n’opère pas de réelle rupture à l’égard du passé, il ne bouleverse pas la nature de l’Europe en cause. Il constitue simplement une étape nouvelle qui vient comme cela a été dit par plusieurs commentateurs, inscrire dans le marbre constitutionnel, ce modèle libéral. Mais cette étape n’a pas seulement une portée formelle ou symbolique, elle est lourde de conséquences sur le terrain juridique, et corrélativement sur le terrain politique. Il s’agit d’une étape de plus vers une intégration de type fédéral, mais d’un fédéralisme artificiellement imposé aux peuples européens, sur la base d’impératifs économiques et marchands, venant hypothéquer toute possibilité d’une « Autre politique » par les gouvernement des Etats membres au plan national : « La Constitution et le droit adopté par les institutions de l’Union, dans l’exercice des compétences qui sont attribuées à celle-ci, priment le droit des Etats membres » rappelle l’article I-6 du projet, et plus de 70 % de la législation actuelle d’un Etat comme la France constitue déjà la simple transposition du droit communautaire. Les « contraintes européennes » sont régulièrement invoquées par les responsables politiques pour justifier des choix de politiques publiques contestés par les opinions publiques. Mais en souscrivant eux-mêmes à l’élaboration de telles contraintes, ces dirigeants font-ils autre chose que jouer aux « pompiers pyromanes » ? Dans le débat actuel, les défenseurs du projet, soutiennent une fois encore, que grâce à ce et surtout, à l’insertion de la Charte des Droits fondamentaux, saluée comme une formidable mutation qualitative de l’Europe. Mais, s’il ne s’agit, dans le premier cas, que de progrès fort modestes, le deuxième relève soit du leurre, soit même d’une régression.

A) Une thérapie institutionnelle fort modeste pour corriger le déficit démocratique.

Il est d’abord permis de s’interroger sur les vertus démocratiques d’un texte de 448 articles, d’un volume quinze fois supérieur au texte de la Constitution Française, agrémenté de deux annexes, 36 protocoles, 39 déclarations, dont la complexité rédactionnelle décourage la lecture, même diagonale, de l’honnête citoyen ordinaire. Mais par-delà ces difficultés formelles, c’est évidemment le contenu des dispositifs institutionnels qui donne lieu à commentaire. Les responsables du Parti Socialiste favorables au « oui » s’appuient d’abord sur la revalorisation des pouvoirs du Parlement Européen qui serait reconnu comme pouvoir législatif de plein exercice. Le Parlement Européen bénéficie certes d’une amélioration de son sort : la procédure dite de « co-décision » l’associant à l’élaboration de la législation européenne est étendue à un nombre plus important de domaines : de 32 matières à près de 80. Mais dans ces domaines (article I-20), le Parlement ne peut toujours pas faire aboutir les textes qu’il souhaite, puisque même dans cette situation optimale, il n’est que « co-décideur » avec le Conseil des Ministres, il ne dispose en quelque sorte que d’une faculté « d’empêcher » -et non une réelle faculté de « statuer- » au sens des prérogatives identifiées depuis Montesquieu. Il convient surtout de souligner que le Conseil des Ministres conserve l’exclusivité de cette compétence législative dans nombre de domaines majeurs tels que les questions fiscales, sociales, de politique extérieure, de sécurité etc ... Exclu de ces domaines, le Parlement européen ne dispose toujours pas, de surcroît, d’un réel pouvoir budgétaire, ne pouvant, notamment, pas intervenir dans le domaine des recettes alors même que la genèse des Parlements nationaux en Europe -et corrélativement de l’organisation démocratique- a été liée au principe de « consentement à l’impôt » par la représentation des citoyens. Mais plus nettement encore, le projet de Constitution (art I. 26-2) réaffirme le principe du monopole de l’initiative législative au profit de la Commission, l’organe intégré, expression de ce pouvoir technocratique si souvent dénoncé : « Un acte législatif de l’Union ne peut être adopté que sur proposition de la Commission ... ». Le discours promotionnel sur les « avancées démocratiques » caractérisant le rôle du Parlement a également souligné que celui-ci disposerait désormais du pouvoir de nomination du Président de la Commission. En réalité, l’article I. 27-1 prévoit que « le Conseil Européen ( ), statuant à la majorité qualifiée, propose au Parlement Européen, un candidat à la fonction de président de la Commission... ». Si celui-ci « ne recueille pas la majorité, le Conseil Européen, propose, dans un nouveau délai d’un mois un nouveau candidat... ». Le Parlement Européen est donc compétent, non pour choisir le Président de la Commission, mais seulement pour entériner ou refuser d’entériner les choix du Conseil Européen. Il en va a fortiori de même des autres membres de la Commission choisis « d’un commun accord » par son Président et le Conseil Européen, le Parlement Européen n’étant sollicité que pour « un vote d’approbation ». Par-delà les pouvoirs du Conseil Européen et du Conseil des Ministres, exprimant l’un et l’autre la participation des Etats membres au fonctionnement des instances Européennes, le cœur de la « gouvernance » selon l’expression à la mode européenne, reste plus que jamais la Commission, dépourvue de toute légitimité démocratique : c’est elle (art. I. 26-1) qui « promeut l’intérêt général de l’Union et prend les initiatives appropriées à cette fin. Elle veille à l’application de la Constitution ainsi que des mesures adoptées par les institutions en vertu de celle-ci. Elle surveille l’application du droit de l’Union sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union Européenne... etc ... ». Quand on connaît l’étroitesse des relations entretenues par les membres de la Commission avec les organisme représentatifs des grands intérêts économiques multinationaux, il y a quelque raison de s’interroger sur le caractère démocratique de « l’intérêt général » ainsi confié à la Commission : Romano Prodi, Mario Monti, Pascal Lamy et nombre de leurs collègues ont assidûment fréquenté les puissants groupes du lobbying patronal tels que les groupe de Bilderberg, le T.A.B.D. (Transatlantic Business Dialogue), ou la Commission Trilatérale. C’est dans de telles enceintes que David Rockfeller, co-fondateur de cette dernière, et du groupe de Bilderberg a pu, par exemple, développer la thèse selon laquelle « Quelque chose doit remplacer les gouvernements, et le pouvoir privé me semble l’entité adéquate pour le faire » . Face à une telle conception, comment ne pas donner sens aux déclarations de Pascal Lamy s’adressant, par exemple au nom de la Commission, aux membre du T.A.B.D., en ces termes : « Nous constatons de grands efforts pour mettre en œuvre vos recommandations dans le cadre du partenariat économique transatlantique et il y a des progrès substantiels dans les nombreux domaines sur lesquels vous avez attiré notre attention...En conclusion, nous allons faire notre travail sur la base de vos recommandations » . Le rôle prévalent de la Commission s’exerce également à l’encontre de cette autre prétendue formidable « avancée démocratique » que constituerait le droit de pétition (Article I. 47-4). Certes un million, au moins, de citoyens ressortissants d’un nombre significatif d’Etats membres, peuvent exercer ce droit de pétition, mais celui-ci consiste seulement à « inviter la Commission à soumettre une proposition appropriée... aux fins de l’application de la Constitution » !... D’une part, il ne s’agit que d’une « invitation » à l’égard de laquelle la Commission conserve un pouvoir discrétionnaire, d’autre part et surtout, dans l’hypothèse la plus favorable où une telle invitation produirait effet, ce ne peut être que pour conforter l’application de la Constitution telle qu’elle est, et évidemment pas pour l’infléchir... La Commission dispose, par ailleurs, d’un pouvoir de blocage comparable s’agissant des « coopérations renforcées » que pourraient vouloir mettre en œuvre un tiers au moins des Etats membres (articles I. 44 et III. 419). Quant, enfin, à ceux qui pensent désormais les logiques de démocratie en termes de décentralisation et de prévalence du rôle des Collectivités territoriales, ils devront se résigner à admettre leur absence dans le texte constitutionnel qui se borne à signaler l’existence du « Comité des régions »... Mais il faut reconnaître que sous l’angle démocratique, c’est la Charte des Droits fondamentaux, constituant la partie II du projet, qui déclenche l’enthousiasme le plus béat des supporters de ce projet.

B) La charte des Droits fondamentaux : Du leurre à la régression.

Pour tout honnête connaisseur du droit des libertés publiques, la première question qui se pose à propos de cette charte est : à quoi peut-elle servir ? Que va-t-elle ajouter aux systèmes nationaux déjà existants ? Tous les Etats membres de l’Union Européenne disposent, par définition, d’un système de protection des droits et libertés considéré comme complet, et résultant à la fois de leurs Constitutions nationales et de leurs engagements internationaux dans les pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, et en particulier de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l’homme, au sein du Conseil de l’Europe. Cette dernière bénéficie d’une procédure particulièrement sophistiquée autour de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, fondée sur un droit de recours individuel des ressortissants des Etats-membres, à l’encontre des autorités de leur propre Etat, et dont la jurisprudence n’a cessé d’être saluée. Si l’on raisonne sur le cas de la France, depuis une décision célèbre du Conseil Constitutionnel, en 1971, le « bloc de constitutionnalité » intègre tous les grands textes de définition des droits et libertés : depuis la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, correspondant à la première génération des droits, politiques et individuels, jusqu’au Préambule de la Constitution de 1946, correspondant à la deuxième génération des droits économiques et collectifs, en passant par les « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » . De telle sorte que ne pouvant, dans la meilleure hypothèse, que faire redondance avec les textes antérieurs, la Charte paraît constituer un leurre juridique, n’ayant d’autre fonction que de conférer un supplément d’âme symbolique à une réalité qui en manque cruellement. D’ailleurs après que l’article I. 9 ait indiqué que « l’Union adhère à la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l’homme » mais que cette adhésion « ne modifie pas les compétences de l’Union telles qu’elles sont définies dans la Constitution », l’article II. 111-2 précise clairement que « la présente charte ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelle pour l’Union »... L’article II. 112-2 ajoute que « les droits reconnus par la présente charte » s’exercent dans « les conditions et limites » définies par les autres parties de la Constitution. Mais une lecture plus attentive des différentes dispositions de la Charte fait apparaître en réalité qu’au-delà du leurre, c’est bien d’une régression qu’il s’agit quant à la conception des droits et libertés en cause. Selon le modèle du Préambule de la Constitution de 1946 en France, conforme à cet égard à la conception qui a fondé la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948, les droits consacrés en matière sociale correspondent à une conception des « droits-créances », traités comme des prestations, des garanties que la puissance publique doit assurer à ses citoyens, créances précisément constitutives de « l’Etat-providence », et opposées à une conception libérale des droits conçus comme simples facultés individuelles reconnues aux individus que la puissance publique doit respecter. Or, il est à cet égard symptomatique que dans la charte, nombre de droits à incidence sociale soit précisément présentés à partir de la formule : « L’Union reconnaît et respecte » (par exemple : le droit des personnes âgées à mener une vie digne...-art. II. 85-, idem art II. 86 pour les personnes handicapées...) qui n’exprime aucune garantie à la charge de la puissance publique. Ainsi en va-t-il (art. II. 94) pour « le droit d’accès aux prestations de sécurité et aux services sociaux » que l’Union « reconnaît et respecte » sans autre précision relative au régime juridique, ces prestations pouvant résider, hors de toute logique de solidarité, dans un accès par la voie d’assurances privées et la reconnaissance de l’accès ne signifiant nullement garantie de l’accès, contrairement, par exemple, aux dispositions de la Constitution Française issue du préambule de 1946 qui formulent « le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence » et la « garantie à tous » par la Nation de la « protection de la santé, la sécurité matérielle... ». De manière caricaturale, « le droit au travail » se voit substitué selon la même logique, « le droit de travailler » et « la liberté de chercher un emploi » (Art. II. 75-1 et 2). Si le droit à l’Education est reconnu (Art. II. 74), il ne comporte, de manière plus explicite que « la faculté de suivre gratuitement l’enseignement obligatoire (Al. 2), mise sur le même plan que « la liberté de créer des établissements d’enseignement » (Al. 3). L’absence de toute inspiration sociale s’exprime encore, mais sous une autre forme s’agissant du droit à recourir à des « actions collectives » (Art. II. 88) par la non-distinction des « travailleurs et (des) employeurs » soumis au même régime pour ces actions « y compris la grève » !... Tout cela n’empêche pas les partisans du « oui », se revendiquant d’une « Europe sociale » de louer les vertus de la Charte en exhibant notamment comme un trophée arraché de haute lutte, la mention, dans la charte, des services publics -en l’occurrence services d’intérêt économique général- apparition quasi miraculeuse qui serait source de rédemption pour les services publics jusqu’ici, on en convient, si mal traités par l’Europe libérale. En réalité, le providentiel article II.96 se contente d’indiquer selon la formule type déjà évoquée que « L’Union reconnaît et respecte l’accès aux services d’intérêt économique général tel qu’il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la Constitution... ». Or ce que les décennies passées illustrent de manière aveuglante, c’est que les législations et pratiques nationales en ce domaine n’ont cessé d’être modifiées, réduites, amputées, par leur soumission au droit communautaire de la concurrence, et aux directives de libéralisation qui le mettent en œuvre. N’est-il pas significatif à cet égard que les services publics non seulement ne soient pas mentionnés dans le Préambule de cette charte -qui n’oublie pas, en revanche, d’intégrer la circulation des capitaux ou des marchandises-, mais qu’ils ne figurent pas davantage ni dans les « valeurs » de l’Union, ni dans la longue énumération des « objectifs de l’Union » exposés dans les premiers articles de la partie I ? Au titre de ces objectifs, ce que l’Union « offre à ses citoyens », outre les grandes références rituelles de « liberté, de sécurité et de justice », c’est de manière prévalente « un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée » (Art. I. 3-2), formule qui constitue en quelque sorte l’alpha et l’oméga de ce texte, et qui structure toute la partie III relative aux « politiques » de l’Union.

II - La Constitutionnalisation des normes économiques libérales

Après que durant plusieurs mois les propagandistes du projet en cause n’aient cessé de souligner sa nature proprement constitutionnelle pour mieux marquer la mutation qualitative accomplie d’une Europe économico-marchande à une Europe authentiquement politique, les interrogations et inquiétudes suscitées dans l’opinion, les ont conduit à revoir leur copie et à minimiser la nature de ce texte, en indiquant que ce n’était qu’un traité comme les précédents, voire un simple règlement intérieur dont se doterait l’Europe. Ce recadrage communicationnel ne doit pas abuser : au plan formel, le texte en cause aura, s’il est ratifié, une valeur supérieure à la fois à l’ensemble des actes juridiques des Etats membres, y compris de leurs Constitutions nationales, et des « lois européennes », elles-mêmes supérieures aux législations nationales, et au plan matériel, ce texte procède à des définitions et répartitions de compétences entre pouvoirs publics et autorités communautaires. Il répond bien, par-delà les singularités propres à la construction européenne, sui generis aux critère d’une Constitution. Mais la controverse sur le sujet peut paraître académique car l’essentiel est ailleurs : il ne s’agit pas, en effet, d’une constitution de droit commun : alors que les constitutions n’ont pour objet matériel que d’assurer l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics, de répartir des compétences, de régler les rapports institutionnels entre Pouvoirs législatifs, Exécutifs, et citoyens, le projet en cause récuse toute neutralité politique et institutionnelle et définit lui-même la nature des politiques qui devront être mises en œuvre sur la base des préceptes les plus explicites de l’économie libérale, ou plus exactement néo-libérale . Ce projet constitue bien à cet égard une rupture, non dans la nature de l’Europe en cours de construction, mais sur le terrain des rapports entre l’Economique et le politique, entre ce que l’on désignait traditionnellement comme les périmètres du « dominium », et de « l’imperium », l’organisation juridique -constitutionnelle- ne pouvant, par nature, intervenir que dans le second. À cet égard, c’est un basculement institutionnel qui s’accomplit, marquant une évolution du capitalisme dont Marx lui-même n’avait pas prévu l’insolence : l’explicitation constitutionnelle de l’instrumentalisation des superstructures politiques par les exigences du marché. Comment comprendre, par exemple, les injonctions données aux organes de l’Union sur le mode de l’article III. 157 : « Le Parlement Européen et le Conseil s’efforcent de réaliser l’objectif de libre circulation des capitaux entre Etats membres et pays tiers, dans la plus large mesure possible... », injonctions conformes au dogme libéral selon lequel « les restrictions tant aux mouvements de capitaux qu’aux paiements entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdits » (Art. III. 156). Comment dans ces conditions, le sort des services publics pourrait-il échapper aux impératifs catégoriques de la Raison marchande ?

A) Les services publics, victimes expiatoires, du droit communautaire

L’existence des « Services d’intérêt économique général » est confirmée par l’article III. 122, après la mention précitée dans la charte des droits fondamentaux. L’Union et les Etats membres « veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions, notamment économiques et financières qui leur permettent d’accomplir leurs missions ». Il est précisé que « la loi européenne établit ces principes et fixe ces conditions... ». Ces dispositions s’entendent évidemment « dans le respect de la Constitution » et, en particulier, « sans préjudice des articles I. 5, III. 166, III. 167, III. 238... ». Selon les dirigeants du P.S. favorables à la Constitution, cette disposition constituerait « pour la première fois » une consécration des services publics en droit communautaire et exprimerait donc l’une de ces fameuses « avancées » fondant leur adhésion. On ne sait si une telle appréciation relève de la mauvaise foi inhérente à un certain marketing politique, ou plus simplement, d’une réelle ignorance du droit communautaire. Quoi qu’il en soit, les mentions des services d’intérêt économique général existaient déjà dans les textes antérieurs, à l’exemple de l’article 16 provenant du Traité d’Amsterdam, mais surtout, le régime afférent à ces services est rigoureusement inchangé par rapport à celui résultant de l’état du droit antécédent. Ce régime fixé, pour l’essentiel, à l’article III. 166-2, n’est que la reproduction de l’article 86-2 du traité CE qui a constitué le moteur même de la dissolution des services publics : selon ce régime, les services dits d’intérêt économique général sont soumis, par principe, au droit commun de la concurrence et ce n’est qu’à titre de dérogation, ou d’exception, dont les conditions sont strictement et rigoureusement contrôlées par la Cour de justice des communautés qu’ils peuvent y échapper pour conserver les traits institutifs que leur avaient historiquement conféré les législations et pratiques nationales, comme activités hors marché : « Les entreprises chargées de la gestion des services d’intérêt économique général...sont soumises aux dispositions de la Constitution, notamment aux règles de la concurrence, dans la mesure où l’application de ces dispositions ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été impartie », encore faut-il que « le développement des échanges » n’en soit « pas affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union ». Le cadre de la présente analyse ne permetpas de développer le sort fait sur ces bases, aux services publics par le droit communautaire, qui ne reconnaît que des « missions » de service public pesant sur les entreprises gestionnaires (tout mode d’organisation étant ipso facto considéré comme une entreprise, même dans le cas de services non personnalisés de collectivités publiques). L’identité même des services publics se trouve émasculée par cette conception du droit communautaire pour lequel le principe est la concurrence, des contraintes réglementaires spécifiques pouvant seulement être imposées à titre palliatif et dérogatoire pour assurer des prestations « minimales », ou « de base » aux citoyens exclus de l’offre marchande ordinaire. Cette conception correspondant à la définition du « service universel » formulé par plusieurs directives de la libéralisation se traduit, par exemple, dans le domaine du téléphone, entièrement libéralisé, par l’obligation de maintenir une cabine... dans chaque commune. La logique fondamentale de cette conception -qu’un Ministre de l’Industrie, de droite, Franck Borotra, avait eu l’honnêteté de qualifier de « misérabiliste »- est que tous les services doivent être assurés par des entreprises auxquelles les pouvoirs publics peuvent seulement imposer dans certains cas le respect de règles spécifiques ou assurer des financements spécifiques, en exigeant notamment de dissocier l’autorité organisatrice du service et l’entreprise prestataire du service . Quant à la disposition de l’article III. 122 prévoyant l’édiction d’une loi européenne en ce domaine, elle ne saurait occulter le fait que depuis de nombreuses années, les défenseurs du service public n’ont cessé d’œuvrer pour l’édiction d’une « directive-cadre » sur les services d’intérêt économique général à laquelle la Commission s’est toujours opposée, notamment car elle ne veut ni définir les SIEG, ni corrélativement fixer leur frontière avec les SIG (Services d’Intérêt Général) non économiques à ce jour (santé, éducation, culture) mais représentant un marché ayant en quelque sorte vocation lui-même à subir l’attractivité du droit de la concurrence... En guise « d’avancée », il est permis là encore de s’interroger su le point de savoir s’il ne s’agit pas plutôt d’une régression : le supposé désormais « exécrable Traité de Nice » avait inscrit les services publics parmi les « valeurs communes » de l’Union. Tel n’est plus le cas, on l’a dit, dans le projet de Constitution. Pour le reste, les exigences constitutionnelles ne cessent d’être déclinées en termes de « libéralisation des services ». L’article III. 147 prévoit que « la loi-cadre européenne établit les mesures pour réaliser la libéralisation d’un service déterminé », mais au-delà de ce principe de libéralisation, l’article III. 148 ajoute que « les Etats membres s’efforcent de procéder à la libéralisation des services au-delà de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi-cadre européenne, si leur situation économique générale et la situation du secteur intéressé, le leur permettent. La Commission adresse aux Etats membres intéressés des recommandations à cet effet » on ne saurait être plus clair !...

B) Le marché « libre et non faussé » comme fondement de la légitimité politique européenne

Conjointement à l’éradication des services publics tels qu’ils avaient façonné le modèle social européen et fondé les logiques de l’Etat-providence, le modèle néo-libéral mis en œuvre par la construction européenne récuse les financements publics de nature à fausser le sacro-saint principe de la libre concurrence. L’article III. 167 rappelle que « sont incompatibles avec le marché intérieur... les aides accordées par les Etats membres ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence ». Mais ces exigences du marché intérieur européen s’accommodent en revanche de l’absence de toute harmonisation fiscale et de toute harmonisation sociale. Celle-ci est oubliée par le projet de Constitution et toute velléité en ce sens reste soumise à la règle de l’unanimité des Etats. L’idéal du marché libre et non faussé ne craint pas d’incorporer ainsi des logiques de dumping fiscal et de dumping social de nature à encourager les délocalisations d’entreprises. À cet égard, le projet n’omet pas, de souligner que « les restrictions à la liberté d’établissement des ressortissant d’un Etat membre sur le territoire d’un autre Etat membre sont interdites », précisant que cette « interdiction s’étend également aux restrictions à la création d’agences, de succursales ou de filiales » par les ressortissants d’un Etat membre sur le territoire d’un autre Etat membre (Art. III. 137).

Le projet de directive dite « Bolkestein » dont les partisans de la Constitution eux-mêmes ne peuvent que dénoncer les périls, n’apparaît ainsi que comme une excroissance caricaturale des logiques qui fondent le projet de Constitution. L’ensemble de la partie III de celui-ci est rythmé par les références répétées à la liberté de circulation, en particulier des marchandises, des services et des capitaux (mentionnés dès la partie I au titre des « libertés fondamentales » -art. I. 4), du marché où la croissance est libre et non faussée, de la compétitivité . Ces « valeurs » érigées en normes constitutionnelles frappent tous les secteurs. L’on ne s’étonnera guère que les politiques industrielles soient conçues au regard de l’impératif de la « compétitivité », conformément à un « système de marchés ouverts et concurrentiels », visant à « accélérer l’adaptation de l’industrie aux changements structurels » (Art. III. 279), ce qui constitue un quasi encouragement aux délocalisations (d’autant que ce même article prescrit expressément en ce domaine « l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres » al. 3). Mais les politiques en matière d’emploi sont abordées à partir du même prisme : il s’agit de « promouvoir une main d’œuvre qualifiée, formée et susceptible de s’adapter ainsi que des marchés du travail aptes à réagir rapidement à l’évolution de l’économie » (Art. III. 203). Une autre manière de prescrire la flexibilité de l’emploi et la nécessité d’allègement du droit social, conforme, en France, aux attentes du MEDEF. Quant à la politique sociale (Art. III. 209), elle s’en remet au « fonctionnement du marché intérieur qui favorisera l’harmonisation des systèmes sociaux », ce qui permet de comprendre que les systèmes de sécurité sociale eux-mêmes doivent rester « compatibles avec la Constitution » (Art. III. 210) si certains Etats membres souhaitent « maintenir ou établir des mesures de protection plus strictes » que la norme communautaire. Il n’est pas jusqu’au domaine de la recherche (Art. III. 248) qui ne soit abordé en termes de « compétitivité » et d’« ouverture des marchés publics nationaux ». Sans que tous les domaines puissent ici être pris en compte, l’on ne peut pas omettre l’article III. 314 qui suffirait à lui seul à fournir l’identité profonde du projet en cause concernant la politique commerciale commune, c’est à dire la position de l’Union dans les négociations internationales commerciales : « l’Union contribue, dans l’intérêt commun au développement harmonieux du Commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs... ». Ce programme est bien celui de l’OMC, notamment mis en œuvre dans le cadre de l’AGCS (Accord Général sur le Commerce des Services) et il va même au-delà : les investissements étrangers directs constituaient l’objet du projet d’AMI (Accord Multilatéral sur l’Investissement) au sein de l’OCDE, qui a été abandonné en 1999 grâce au retrait de la France. Cet objectif de politique commerciale ultra-libérale ne figurait pas dans le désormais « détestable » traité de Nice. S’agit-il d’une « avancée » ? Cet horizon indépassable du marché compétitif explique encore qu’un article (III. 131) ait été jusqu’à prévoir les dispositions à prendre « pour éviter que le fonctionnement du marché intérieur ne soit affecté... en cas de guerre ou de tension internationale grave constituant une mesure de guerre ... ». Pendant la guerre, les affaires continuent... Il est d’ailleurs significatif qu’alors que l’ensemble du texte est conçu sur la base des préceptes du pacte de stabilité monétaire, et de la récusation des déficits publics, le seul domaine d’encouragement à la dépense publique soit celui des dépenses militaires : « Les Etats membres s’engagent à améliorer progressivement leurs capacités militaires » (Art. I. 41-3). Mais il est vrai qu’au regard du postulat de la régulation sociale par le marché, les Etats sont renvoyés à leurs fonctions régaliennes minimales, comme l’exprime en creux l’article I. 5, dès le générique de ce projet : l’Union « respecte les fonctions essentielles de l’Etat, notamment celles qui ont pour objet d’assurer son intégrité territoriale, de maintenir l’ordre public et de sauvegarder la sécurité nationale »...

... La simple lecture attentive d’un tel projet ne peut laisser de doutes quant à sa nature profonde et si l’adhésion des libéraux paraît légitime, on reste, en revanche confondu par la position de ceux qui prétendent défendre une Europe sociale, et assurer la pérennité des services publics sur la base d’un tel texte. Des calculs politiciens extérieurs au texte, agrémentés pour certains d’une certaine ignorance de celui-ci, et pour d’autres d’une authentique conviction libérale qui n’ose dire son nom, aboutissent, en tout cas, à tisser la trame d’une réelle imposture politique. On comprend alors que la défense de ce texte soit très largement émancipée de son contenu, et emprunte les voies de la propagande la plus grossière, pour discréditer beaucoup plus que pour « discuter » les positions adverses. Lorsque Jack Lang soutient : « Dire oui au traité, c’est plus que jamais dire à Bush que nous ne le laisserons pas faire, Dire non, c’est apporter un soutien de plus à ce fauteur de guerre, c’est faire le jeu de l’impérialisme américain » , ignore-t-il que l’article I. 41 relatif à la politique de sécurité et de défense comme de l’Union Européenne, « est réalisée dans le cadre de l’OTAN » pour les Etats qui en sont membres (al. 2) et que « les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’OTAN » (al. 7) ? Organisation, faut-il le rappeler, placée sous l’autorité d’un officier supérieur américain, relevant lui-même de l’autorité du Président visé par M. Lang ? Et lorsque M. Strauss-Kahn écrit que « jamais un traité Européen n’avait assigné à la construction européenne des objectifs aussi proches de ceux des socialistes » , on ne peut qu’être interpellé par sa conception des « socialistes », une conception que ne récuserait ni M. Sellière, ni M. Madelin, fervents soutiens des objectifs en cause. Il est vrai que faute d’arguments sérieux, les grandes plumes médiatiques, qui orchestrent le débat public ont, une fois encore, utilisé les arguments les plus subtils, et les plus élaborés, en faveur de ce projet. Alain Duhamel a émis l’hypothèse intellectuellement très stimulante selon laquelle les partisans du non « sont pour quelque chose de plus dirigiste que la Chine Communiste d’aujourd’hui » , et tout aussi finement, Alexandre Adler a délivré la sentence selon laquelle « la bataille pour le oui sera évidemment la grande bataille pour la liberté de notre continent, et je l’espère, la grande défaite de tous les alter mondialistes qui ont tout à la fois la candeur et l’impudence de se déclarer « antilibéraux », disons plus simplement ennemis de la liberté » . Quant à Alain Minc, plus nuancé encore, il a diagnostiqué que ces antilibéraux face à la Constitution Européenne, sont dans la position d’individus « à côté d’un bidon d’essence avec des allumettes à la main » ... La violence mal maîtrisée de ces diatribes est, en tout cas, le symptôme de ce que le projet de Constitution Européenne constitue le marqueur d’un authentique clivage politique entre d’une part, les libéraux de toutes obédiences, et d’autre part, ceux qui restent attachés au « modèle social » inhérent, en France, au « Pacte Républicain » évoqué dans les propos introductifs...

Serge Regourd est Professeur de droit public à l’Université Toulouse 1 - Sciences Sociales


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lundi 26 octobre 2009 à 18h11


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