Le « Changement », c’est pour Quand ?

lundi 9 juillet 2012
par  Jean-Luc Gonneau
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Le lecteur attentif aura remarqué les guillemets qui entourent, dans le titre, le mot changement. Il en saura plus en lisant plus loin la rubrique que João Silveirinho, immense chercheur de petites bêtes, consacre à Redonner un sens aux mots. Ainsi donc, un mois après les élections, quelques jours, quelques jours après le discours de politique générale du nouveau premier ministre, en tous points conforme au programme proposé aux électeurs par François Hollande, nous avons confirmation du chemin proposé. On connaît l’anecdote dont l’éminent linguiste Emile Littré fut le protagoniste. Surpris par son épouse dans une position fort équivoque d’amours ancillaires avec la bonne, lui répondit, alors qu’elle avait exprimé sa surprise : non madame, c’est moi qui suis surpris, vous, vous êtes étonnée. Nous ne sommes ni surpris, ni étonnés par les grandes lignes du programme gouvernemental.

D’aucuns nous conseilleront de ne pas faire la fine bouche : c’est toujours mieux que Sarkozy. Dont acte. Et puis, comme il se disait à la télé, faut pas rêver. Ben si, justement : les rêves ne suffisent pas au bonheur, mais l’absence de rêves lui nuit gravement. Et le programme Hollande consent au rêve une portion bien congrue. D’autres nous diront d’attendre un peu. La réforme fiscale par exemple. Là-dessus, nous serons patients. La réforme bancaire ? Ha bon, il va y en avoir vraiment une ? Les mesures pour réconcilier la France profonde et ses minorités. A ce sujet, les propos de Manuel Vals montrent clairement les limites de l’exercice. Quelques avancées, certes, dont chacune est toujours bonne à prendre, mais dans le genre minimum syndical, il est difficile de faire mieux. Plus embêtant, sur des sujets sensibles (rétention, expulsions, naturalisation…), la rhétorique sarkozyste a laissé quelques traces. Nous espérions, sans grande illusion, que les projets européens seraient rendus au peuple, auquel ils furent confisqués par Nicola Sarkozy, avec la complicité du PS, on l’oublie, après le referendum de 2005. Rien de tel à l’horizon. Nous voulons bien être patients mais, comme on dit, cela aura des limites. Soyez raisonnables, suggèreront de bons amis. Il ne s’agit pas d’être raisonnable, mais raisonnant et raisonné. Et quitte à paraître répétitifs, ne nous lassons pas de dire que sans changement, cette fois sans guillemets de paradigme, sans passer d’une société façonnée par l’économie libérale à une société solidaire, il n’y aura pas vraiment de « changement ».

Le programme du candidat Hollande, le discours du premier ministre Ayrault ont certes tracé un chemin. Rien ne permet aujourd’hui d’affirmer qu’il ne conduira pas à une impasse politique et sociale. Nous le souhaitons d’autant moins qu’un échec pourrait être lourd, très lourd, de conséquences, avec le risque désormais plausible d’une recomposition à droite autour d’un axe du genre Copé-Le Pen.


Commentaires

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vendredi 10 août 2012 à 15h33 - par  SIMON

Sarkozy : révolutionnaire ou enfant barbare ?
Jacques-Robert Simon

Syrie : M. Sarkozy regrette le manque d’allant des pays occidentaux pour soutenir la « révolution » Syrienne. En règle générale, on soutient des révolutionnaires pour des motifs nobles : des idéaux, des principes, une « morale » … Les électeurs Français sont parfaitement à même d’estimer la noblesse des sentiments qui animent cet ancien Président, même ses fidèles furent quelquefois consternés par son désir de réussite matérielle. Permettons-nous donc d’essayer de comprendre les traits dominants de ses actions.
M. Sarkozy estime que les pays occidentaux, dont la France au premier chef, font partie de la « civilisation de Davos ». Dans cette civilisation, les Nations représentent des structures dépassées. Le profil type de l’organisme « décideur » est une entreprise multinationale réalisant un chiffre d’affaire important, supérieur à 3 milliards d’euros par exemple. Ces entreprises s’auto-classent parmi les meilleures dans leur secteur d’activité et jouent un rôle prédominant dans l’évolution de ce secteur et par contrecoup de toute la société. Cette civilisation universelle ou culture de Davos rassemble des hommes du monde entier partageant, du moins par le verbe et les médias, les mêmes valeurs : démocratie, droits de l’Homme, liberté économique, libéralisme. Les peuples de Davos regroupent plus de 700 millions de personnes dans le Monde et engendrent un PIB par habitant allant de 50 000 à 20 000 US dollars dans chacun des sous-ensembles (Nations). Le terme « occident » est aussi quelquefois utilisé pour désigner la civilisation de Davos, mais cette dénomination occulte les aspects idéologiques de ce regroupement.
Une civilisation se construit dans l’affrontement, des propositions de « choc des civilisations » ont été de fait décrites par le menu. Au moins dans l’esprit des idéologues précédents, le principal adversaire des peuples de Davos est représenté par les pays de l’Islam. Au total 1,57 milliards d’individus générant un PIB par habitant n’excédant pas 16 000 US dollars (en Arabie Saoudite). Clivage idéologique, religieux, financier, économique qui constitue le cœur de toutes les confrontations actuelles trop nombreuses pour être listées d’une façon exhaustive. Il peut être plus simplement affirmé qu’une guerre sans pitié entre un Davos prétendument judéo-chrétien et l’Islam a été déclarée.
Les derniers épisodes de cette guerre ont été décrites sous le terme générique de « révolutions arabes ». Croire ou penser une seconde que la civilisation de Davos soutient autre chose qu’elle même ne peut pas être proposé. La guerre consiste uniquement à exterminer les adversaires, pas à les comprendre, encore moins à les conforter. Et qui peut douter que la guerre fait rage ? Il suffit de promener son regard à peu près partout dans le Monde, de l’Afghanistan à la Libye.
En Egypte, en Tunisie, en Libye, en Syrie … le pouvoir s’exerçait d’une façon absolue, il n’est pas scandaleux de parler de dictatures. Dans un passé récent, les dirigeants démocrates de la civilisation universelle manifestaient une amitié sans réserve envers les dictateurs. Le pragmatisme n’est pas exclu dans les relations internationales, elle est même une nécessité dans le monde entrepreneurial. Aimons, puis dénonçons et enfin lynchons puisque le réalisme l’exige. Pour installer quel type de succédané ? La teinture religieuse des nouveaux détenteurs du pouvoir est incontestable. Pour contenter les populations locales tout en ne gardant intact les possibilités d’installation de l’idéologie de Davos ? Pourquoi pas ! Les ressources de la planète étant limitées, il faut, selon les augures, installer une société mondialisée duale : les pauvres n’ont rien et doivent s’en contenter, les autres ont tout et construisent un mode de non-pensée leur permettant de surmonter les problèmes moraux qu’ils ne cessent de mettre verbalement en avant. Que M. Sarkozy se prenne pour un « grand homme » qui peut en douter ? Que ses amis pataugent dans les plus bourbeux des sentiers de Davos, c’est une évidence. Il a déjà abandonné les principes de la République, son amour de l’humanité se limite à sa propre personne, est-il nécessaire de « croire » en sa morale d’enfant barbare ?

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jeudi 12 juillet 2012 à 07h59 - par  SIMON

Sans vraiment que ce soit une surprise pour quiconque, j’approuve la teneur du texte de Jean Luc. Il faut toutefois prendre garde de ne pas déstabiliser M. Hollande. C’est à l’évidence un humaniste, c’est à l’évidence une personne pleine de talent, c’est à l’évidence quelqu’un qui sait faire la différence entre le possible et le souhaitable ...mais il y a aussi l’absolue nécessité.

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mercredi 11 juillet 2012 à 22h27 - par  Dazen-Li

J’aime votre grincement d’humour....
Oui, je crois qu’à la saison prochaine, les marrons seront chauds, partout, et ce, quoiqu’il se passe....
N’est pas que climatique, le dérèglement, l’est humain aussi, et prévisible de longue date....
Et merci pour votre (vraie) chaleur humaine, toute piquante, ici, sur votre blog.

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