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AU PIED DU MUR

vendredi 10 août 2012
par  Jean-Pierre Lefebvre
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L’oligarchie n’y va pas de main morte. Les arrogants qui ont mis la France dans le mur veulent vite enrayer les timides velléités hollandaises. Non content d’avoir exempté leur commensal Sarkozy de la patate chaude de Peugeot, le lendemain même de sa conférence sociale, ils veulent mettre Hollande à genoux et le ranger au catalogue des abandons jospiniens. Ils auraient tort de se priver d’exiger de leurs gérants loyaux l’obéissance. Voilà belle lurette que dans une belle unanimité ceux-ci abandonnaient tous, de Fabius à Hamon, toute référence à Marx et à la lutte de classe ! Peugeot lui, la mène, lui, et comment ! Toute la France salariée mais aussi la démagogie sinistrement bleu marine guettent. Il faut donc répondre. Le plan Peugeot est inacceptable. Mais comment donc le signifier par des moyens légaux qui ne risquent pas de se faire retoquer par le conseil constitutionnel (éminemment démocratique : Debré, Giscard, Chirac, Sarkozy et quelques autres !) ? On ne peut dénier non plus toute possibilité aux directions d’entreprise d’adapter leur outil quand le marché ne suit pas. Tout juste leur reprocher – ce qui est précisément le cas – de ne pas avoir vu venir les choses et pris à temps les mesures de reconversion comme d’autres mieux avisés. L’outrecuidance mercantile des rejetons Peugeot planqués en Suisse n’en est que plus scandaleuse. C’est la vieille France capitaliste qui se dénude, celle des mamie Zinzin, des ciments Lambert et autres parasites héréditaires, assis sur leurs milliards, rejetons de cagoulards et spéculateurs fonciers qui préfèreront toujours Hitler au Front Populaire. Ils sont désormais incapables même de jouer leur propre rôle de classe bourgeoise : défendre et développer l’économie nationale qui les nourrit. Si le prolo coûte trop cher ici, on délocalise pour maintenir le taux de profit, lequel de toute façon fout le camp avec la mécanisation. Leurs homologues des BRIC se passeront d’eux quand ils maîtriseront la technologie, transformant la France en désert industriel ? Après nous le déluge ! Emprunter à 1 % à la BCE pour reprêter aussitôt à la Grèce à 7, voilà du profit facile dans nos banques ! En matière de technologie, ils excellent surtout à gérer pétrole, autoroutes et supermarchés, c’est-à-dire à surexploiter les caissières, escroquer le client, pressurer les fournisseurs ou bien à vendre des articles d’un luxe illusoire qui n’abusent plus que la planète des nouveaux riches, envahir les rues du monde de la laideur de leurs panneaux publicitaires, fabriquer des avions qui ne volent pas ou des armes, etc., etc. : en dehors d’Airbus et TGV, quelles inventions technologiques ? Faut chercher.

Rappels : Jaurès dont il était secrétaire, à peine assassiné par les bellicistes, Blum rejoignit aussitôt le ministère pour mener la guerre de 14 ! En 1920, il dirigea la scission de la minorité contre la majorité du parti socialiste qui soutenait la révolution russe et quand bien même les 21 conditions de Lénine étaient inadaptées à la situation française. La gestion loyale ne cessera pas de mener les guerres coloniales et d’alimenter à l’autre pôle le sectarisme stalinien du prolétariat hexagonal et réciproquement, dans une polarisation réduisant la gauche à un siècle d’impuissance. En 1936, son ministère de gauche molle est obligé par la grève ouvrière de faire la loi des 40 heures et les congés payés. Il assume avec un certain courage pendant dix huit mois avant de reculer devant le mur de l’argent en prônant la non intervention en Espagne et la pause sociale !

Fidèle héritier de ce courant réformiste, le Président Hollande est au pied du mur d’Aulnay. Que peut-il faire ? Existe-t-il une loi actuelle lui permette d’agir contre Peugeot quand la firme a encaissé 4 milliards en trois ans de l’Etat et distribué 458 millions à ses actionnaires en 2011 ? A l’annonce des milliers licenciements, la Bourse insolente répond en augmentant le cours des actions Peugeot, insulte aux drames ouvriers ! Le gouvernement devrait donc légiférer pour combler le vide juridique. Une majorité existe aux deux Parlements. En s’appuyant sur la loi des comités d’entreprise qui fait obligation aux directions d’informer les salariés des perspectives d’activité (ce sur quoi Peugeot leur a menti), la loi nouvelle devrait aller plus loin et interdire en urgence ces licenciements boursiers. La perspective d’une négociation équilibrée avec Peugeot prendrait alors tout son sens : il faudrait bien, sous la menace légale, trouver un compromis. Seule la peur du gendarme peut faire reculer les brigands qui condamnent sans sourciller des milliers de familles à la misère.

Cette loi devrait aller plus loin en tirant les leçons de cette première épreuve de force. De telles provocations ne doivent pas se renouveler. Les salariés sont dans ce pays 92 % des actifs. Les gros actionnaires du CAC40, cent familles en tout ! Tout ce qui est produit et accaparé par le capital est le fruit du travail des salariés, ceux-ci sont donc leurs propriétaires potentiels de droit, sinon légalement. Il leur faut des moyens nouveaux pour protéger leur outil de travail contre les licenciements, les délocalisations et la crise. La loi nouvelle devrait donc prolonger celle, gaulliste, qui institua en 1947, les comités d’entreprise. Ceux-ci doivent partout voir leurs prérogatives étendues. Ils doivent avoir un droit d’information poussé sur la santé économique de l’entreprise, sur l’état de ses marchés, sur sa trésorerie, sur ses perspectives d’avenir, son plan de recherche développement, un droit de veto sur les projets de bilan annuels, le partage des profits, les embauches ou les compressions de personnel. Ceci devrait satisfaire nos entrepreneurs, béats admirateurs, de loin, des vertus et succès économiques allemands. Ce ne serait en effet rien d’autre, dans les conditions françaises, que l’installation d’une co-gestion dont sait le rôle qu’elle joue dans la santé économique d’outre Rhin. Le dialogue social du président M. Hollande trouverait son support permanent.

Pour Aulnay même. Il faut obtenir l’engagement d’une nouvelle activité industrielle reprenant les savoir-faire des ouvriers et cadres de la région sinistrée. Sinon Peugeot doit rembourser les 4 milliards. Pourquoi par exemple ne pas mettre à l’étude une forte filière française des deux et trois roues (y compris électriques voire protégeant de la pluie) dont la demande en expansion nourrit pour le moment surtout des entreprises étrangères ? Sans doute d’autres filières pourraient être examinées. Comment ne pas s’interroger sur l’indigence de la gouvernance industrielle hexagonale : 32 000 robots dans notre industrie contre 128 OOO en Allemagne et même 62 000 en Italie ! L’avenir des fabrications mécaniques de grandes séries capables de résister au dumping des BRIC consiste pourtant à automatiser au maximum les chaînes de montage. Ce que même les Coréens ont compris en concevant à Shengen une usine chinoise entièrement automatisée ! M. Montebourg l’innovant : créons donc une entreprise expérimentale capable de tracer la voie de la résistance française à la mondialisation ! Automatiser fait perdre des emplois ? Slogan archaïque, il faut dépasser le dilemme par l’avant : la diminution des temps de travail globaux n’est une calamité qu’en régime d’exploitation éhontée, l’automatisation peut être synonyme de partage des richesses et du travail, la RTT de M. Jospin trouverait enfin sa pleine justification progressiste et mondialisée comme solution de rechange à la précarisation ravageuse, de même qu’au souci écologique de ne pas détruire la planète par un productivisme aveugle. Que du bonheur !

Chacun l’aura compris : les mesures les plus efficaces propres à contrer l’offensive réactionnaire de Peugeot sont celles qui engagent un avenir plus lointain. Elles peuvent, sans verser dans l’utopie délirante, sans verser non plus dans la gabegie d’une intervention étatique bureaucratisée, devenir stratégiques et ouvrir les pistes d’une sortie de la crise mondiale en marquant de premières étapes vers l’autogestion et le dépérissement de l’Etat, rendues à long terme impérativement nécessaires par une crise sinon sans doute insurmontable : l’austérité pour rembourser la dette nourrit la crise qui nourrit à son tour la dette et donc à nouveau l’austérité en un maelstrom délétère ! Il faut rompre ce cercle vicieux. Créer un nouveau logiciel pour le mode de production.

Jean-Pierre Lefebvre est urbaniste


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