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PAUVRE PS VALLSANT DE VALMY A CANOSSA

lundi 5 mai 2014
par  Gérard Bélorgey
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Sous la tonique vivacité du style allant jusqu’à mobiliser Valmy - comme d’autres ont mobilisé Jaurès ou Péguy - le contenu du discours programmatique du nouveau PM( vis à vis desquels on peut prendre aujourd’hui quelques premiers reculs) n’a pas cassé trois pattes à un canard : il a été gouverné par quelques postulats simplistes dont notamment que, selon la conviction désormais affichée par le PR, l’emploi doit résulter du taux de profit que les entreprises peuvent espérer sur le territoire français ; et que la compression de la dette est l’alpha et l’oméga de toute politique économique et européenne, ce qui est simplement le verso de notre incapacité, par abandon de toute souveraineté monétaire, de monétariser une part de notre endettement pour en faire de l’investissement public (cf. dans un esprit voisin, article de Robert Salais, in Le Monde du 15 avril 2014) ; enfin, qu’on peut faire en même temps plus d’économies dans les services de l’État et moins de services décentralisés en n’indiquant pas par quoi on remplacerait des départements (toujours en charge de l’aide sociale, mais voués à la suppression) sans que, évidemment, des régions agrandies puissent bien tenir le même irremplaçable rôle de proximité : c’est l’addition de l’idéologie libérale du moins d’État et d’une vision régionaliste européenne en faveur de grandes unités se substituant peu à peu à l’État unitaire républicain. Jusqu’à plus de précisions, il faut redouter que ces reformes territoriales annoncées en deux coups de cuillers à pot soient contraires au bon sens.

L’art de l’illusion est accompli lorsque l’emballage sonne comme "Fanfan la Tulipe" mais s’ouvre sur "Bouvard et Pécuchet" : d’absolues médiocrités de fond sont enracinées dans de piètres orthodoxies et l’on cherche en vain un effort réflexion et d’imagination, ce que d’ailleurs, hélas, a transcrit parfaitement la pondération du gouvernement au sein duquel Sapin prévaut sur Montebourg et où Hamon qui aurait pu représenter une aile gauche a le plat de lentille d’un ministère sociétalement capital mais économiquement non stratégique.

Dans ces conditions, il faut d’abord, alerter sur la totale absence de bonne portée de l’espèce de contestation du plan Valls qui court dans des rangs socialistes, car les contestataires sont eux-mêmes, à nos yeux, complètement embourbés dans les erreurs des conformismes. Les essais de variantes du plan Valls s’articulent en effet autour de traitements différents des entreprises selon leur taille, dans l’intention d’atténuer, par le jeu de décalages dans le temps, le besoin d’économies correspondant aux allégements de leurs charges. Ces hypothèses sont évidemment balayées d’un revers de main par Sapin, car celui-ci, aux légitimes et urgentes attentes de bien des entreprises, ajoute les exigences européennes et allemandes de réduction des dettes et déficits, elles, bien discutables et que les autorités françaises - au temps des débats sur le TSCG auquel elles se sont si allègrement soumises - n’ont su ou n’ont voulu contester . C’est pourquoi, après ces tours de pistes, Valls va consentir quelques aménagements à la marge. Il ne subira pas la défiance ; il n’y aura pas de crise de régime dès lors que le PS qui sent de plus en plus le sapin ira à Canossa.

Dans un climat de désenchantement, de découragement, de sentiment d’impuissance sur notre capacité nationale - parce qu’on n’a pas su lui sauvegarder ses propres moyens - une razzia de tous les espoirs est devenue possible dans les mains des manipulateurs de tous les simplismes. Il n’y aurait aujourd’hui, toutes choses égales par ailleurs, qu’un seul moyen efficace de diminuer le coût des allègements de charges et, corollairement, le niveau des besoins d’économies - et plus efficace que le pacte de responsabilité parce que ce moyen pourrait concentrer allégements et soutiens aux entreprises en ayant vraiment besoin, sans gaspiller des dizaines de milliards pour celles qui récoltent des effets d’aubaine, en prenant de l’argent aux ménages en détresse, aux retraités en précarité pour augmenter les dividendes des actionnaires des sociétés déjà prospères ou bonifier de diverses manières les situations personnelles très appréciables de certains gérants et propriétaires - et ce moyen ce serait de distinguer de deux manières parmi toutes les entreprises. D’abord en bonifiant les prix de revient des seules entreprises effectivement exposées à la compétition internationale, c’est à dire dont les emplois peuvent être localisées ailleurs qu’en France, et au premier chef opérant donc dans les secteurs de l’agriculture, de l’industrie, des transports, de la recherche, à l’exclusion - sauf si intervention du second critère ci-dessous - de celles opérant dans les secteurs des services (comme banques et assurances), dont notamment le négoce et la grande distribution, du BTP (pour la part de celui-ci qui est inéluctablement attaché à notre sol) et des activités multiples de proximité (qui, par définition, ne peuvent s’exercer ailleurs... tels que les services touristiques et domestiques). Lorsqu’une même unité entrepreneuriale réunit des activités de production et de négoce, rien n’interdit (que la prévention à l’encontre d’audit public de comptes privés) des calculs de proratas.

À l’encontre de ces distinctions, un lobby doctrinal bien connu soutient que tout allégement général de charges bénéficie automatiquement aux entreprises qui en ont le plus besoin. Certes... mais au prix collectif maximum en gavant en priorité celles qui n’en ont pas du tout besoin et dont il n’y a aucune certitude que les profits soient réinvestis en leur sein ou au profit de l’économie nationale. On peut certes soutenir que par leurs achats de services et approvisionnements en France , les entreprises directement exposées peuvent indirectement bénéficier des diminutions de prix de revient des autres entreprises, mais c’est tout à fait aléatoire : il faudrait que les allégements de charges soient à coup sûr répercutés alors qu’on a vu, tout à l’inverse, que le CICE a cherché à être employé pour maximiser les profits (mais n’est-ce désormais notre objectif d’attractivité du capital ?) et non pour baisser les prix. De toute façon, une clause générale d’allègement ne peut aboutir d’une part qu’à un insatisfaisant saupoudrage anti économique et, d’autre part, à un injuste gaspillage anti social,

Le second chef de sélectivité pourrait tenir compte des résultats des entreprises et des affectations de ceux-ci, d’une part pour écarter des allégements des activités certes théoriquement exposées, mais gagnant régulièrement beaucoup d’argent (notamment en raison d’activités externes ou de résultats externalisés échappant largement à l’impôt) et, loin de largement réinvestir leur profit, distribuant une large part de celui-ci à leurs actionnaires, d’autre part pour intégrer dans le champ des allégements de charges des entreprises du secteur des services théoriquement non éligibles, mais en difficultés et en besoin de refinancement. L’utilisation de telles approches fait intervenir un interventionnisme public pointu qui serait difficile à manier, même si ce devrait être le propre d’un effort socialiste de correction de l’économie libérale de s’y essayer.

L’essentiel serait que l’esprit inspirant une stratégie économique comporte de chercher à construire une sélectivité selon les situations économiques et sociales considérées, non seulement en ciselant le champ des allégements de charges, mais aussi en mettant au point un système parallèle indispensable d’incitation à l’investissement national notamment par des taux différenciés d’IS selon l’affectation des résultats, et par une certaine canalisation des profits et des épargnes vers la souscription d’emprunts d’État pour permettre des investissements publics dans le secteur marchand de manière à rebâtir un noyau de capitalisme d’État dont la France s’est privée depuis les années Balladur et Jospin. Que l’État retrouve un pouvoir direct d’investisseur et qu’il ait une capacité de direction de l’investissement privé est la voie par laquelle échapper d’une part à la confiscation de souveraineté par le capitalisme financier, d’autre part à l’obligation d’acheter des éventualités d’amélioration de l’emploi par l’aggravation des inégalités sociales.

Or aucun appel à de telles réformes structurantes n’apparaît dans des "alternatives" qui cherchent seulement à minimiser l’ampleur des dégâts. Qu’on en soit arrivé à admettre qu’augmenter les inégalités soit la seule bonne recette socialiste pour espérer développer l’emploi en dit terriblement long sur la catastrophe idéologique qui s’est produite, si bien qu’aujourd’hui les approches alternatives restent enfermées dans une inadmissible logique libérale. La base de celle-ci est d’abord la domination de l’appropriation privée des moyens de production. Si, confronté à la concurrence internationale, un capitalisme qui serait, pour une part un capitalisme d’État demandait des efforts au pays et même aux plus modestes de ses habitants, ces efforts pourraient être légitimes parce que les moyens de la production et de sa capacité concurrentielle appartiendraient à tous. Mais comment des sacrifices peuvent-ils être reconnus comme non injustes lorsque les profits nécessaires se trouvent destinés à des détenteurs de titres ou de situations privilégiées qui n’ont aucune obligation d’en faire ensuite un usage d’utilité publique, ni même suffisamment de bonnes incitations à le faire.

Le second pivot de la mécanique néolibérale, systématisée par l’U.E. , est, au nom de "la concurrence non faussée" ayant reçue force de droit par les règles européennes, de ne pas faire de distinction ni selon les types d’activités, ni selon la situation des entreprises considérées, si bien que tout entrepreneur quelle que soit son activité, sa situation, ses capacités ou toute entité se prétendant apte à créer de l’emploi est automatiquement bénéficiaire de ce qui ne devrait aller qu’à certaines catégories d’opérateurs opérant sur des marchés difficiles. Or ce marché de dupes est bien celui qui est, d’une certaine manière, au cœur du "pacte de responsabilité" : "donnez-nous à tous les moyens de gagner plus d’argent, y compris à ceux qui ne connaissent pas de difficultés, de devenir plus riches, et nous vous accorderons une chance de travail contre de l’appauvrissement."

Des provocateurs (du type de Denis Kessler) demandent toujours plus en ce sens. L’ancien numéro 2 du MEDEF affirme que ce sont les entreprises plus que les ménages qui ont eu à souffrir de la crise : « Les entreprises ont payé un très lourd tribut à la crise, comme en témoignent l’évolution de leurs taux de marge et le nombre de faillites. Si l’on regarde le pouvoir d’achat des ménages dans leur ensemble, il n’a en revanche pas véritablement été affecté par la crise. Aujourd’hui, la priorité doit être plus que jamais de faire de la croissance par l’investissement, le travail, l’effort, la prise de risque, l’innovation. Il faut promouvoir l’entreprise et réduire l’Etat : c’est un renversement copernicien ». Toute cette idéologie de renversement a pour axe le plus simpliste la prise en compte du taux de marge et, en définitive, de la rentabilité totale (revenus +plus value) du capital investi comme pivots de l’économie. Or on sait que ce taux, dont le calcul peut déjà résulter de bien des approches et de jeux comptables, n’ a aucun sens en tant que moyenne inter entreprises et que les profits de certaines des plus importantes d’entre elles restent au contraire très significatifs. Le taux de marge n’est surtout qu’une boussole au service des actionnaires libres de conserver ou de réinvestir le profit, tandis que des financements publics, souvent moins chers, garantiraient mieux les besoins de réinvestissements. Tout au contraire de diminuer l’État selon l’idéologie de Kessler, la croissance et l’emploi exigent un État fort capable de diriger intelligemment et sélectivement les investissements privés et capable d’assurer une part indispensable de capitalisme public pour garantir non seulement les infrastructures, mais encore et toujours les priorités industrielles à long délai de retour sur investissement (ce que les actionnaires privés sont souvent incapables d’assurer).

Aussi longtemps que les "oppositions" socialistes internes ne poseront pas ces questions fondamentales, ne sortiront pas non plus des règles du jeu européen et se satisferont de proposer une espèce de politique plus axée sur la demande que sur l’offre, elles ne pourront déboucher sur aucune alternative stratégique. On ne répétera jamais assez que l’échec socialiste - cette espèce de gouvernance social démocrate au service à la carte des intérêts indifférenciés les plus sommaires de quiconque se prétend pouvoir être porteur d’activité créatrice d’emplois - est le résultat d’une totale absence, au sein du PS et de ses satellites, d’une réflexion doctrinale apte à faire face à la vague idéologique néolibérale qui a conquis la quasi totalité de la "gauche". À cette intoxication n’échappent que quelques héritiers du colbertisme et du gaullisme et, parmi des "économistes atterrés", mais souvent conformistes, que quelques rares véritables explorateurs de systèmes alternatifs.

Il est dès lors normal que la politique économique française se fasse, sous l’œil d’un président qui a toujours été un politique, mais ni un technicien, ni un chercheur, ni un novateur, dans le triangle fermé des principes européens, des conformismes transmis par l’ENA et entretenus par Bercy et des catéchismes sommaires des plus démagogues et des moins pertinents des représentants patronaux. Bien sûr, on nous a dit que les Français approuvaient plutôt le plan Valls. Évidemment puisqu’il tape sur les fonctionnaires, ce qui est toujours fédérateur, même si c’est incohérent : s’il faut soutenir justice, sécurité, éducation, il ne reste, comme grand ensemble d’agents publics, que les impôts. On comprend que nos compatriotes ne veulent pas plus de percepteurs que de taxes, mais ils apprécient quand même que leurs feuilles d’IR soient pré-remplies, tandis que s’il y avait plus d’agents du fisc, il y aurait peut-être moins de grande fraude, ce qui rapporterait plus que les économies sociales. Il est vrai que nos compatriotes souhaitent voir réduire les dépenses de la sécu : pour être moins bien couverts en cas de maladie ? Ou parce qu’ils croient qu’il y a des abus ? Mais de qui donc, sinon de ces vilains immigrés qui seront sans doute les prochains dans le collimateur du pouvoir en place.

Le blog de Gérard Belorgey : http://www.ecritures-et-societe.com


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