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FRONT DE GAUCHE : UNE ALTERNATIVE CREDIBLE ?

lundi 5 mai 2014
par  Jean-Luc Gonneau
popularité : 56%

Depuis l’élection présidentielle, porteuse d’espoirs, le Front de Gauche (FG) n’a pas réussi à peser significativement sur la vie politique française. Il y a des raisons diverses pour en donner des éléments d’explication. Certaines liées au fonctionnement des institutions, d’autres à des insuffisances, d’autres encore à des maladresses. Petit tour d’horizon, sans prétendre à l’exhaustivité.

On peut situer l’acte de naissance politique du Front de Gauche à la fin de 2005 et au début de la campagne du référendum sur le projet de traité constitutionnel européen de 2005. Rejeté par une nette majorité d’électeurs, la « gauche du non », rassemblant dans une campagne quasi-commune des partis (Parti Communiste, Ligue communiste devenue depuis NPA, Alternatifs, MRC, PCOF, Mars, dissous depuis dans le Parti de Gauche…), des minorités d’autres organisations (Verts, PS), des associations (dont Attac, la Gauche Cactus), des personnalités, dont Christiane Taubira) et nombre de citoyens non encartés. Cette coalition de circonstance fut pour beaucoup dans la victoire du Non, même s’il ne faut pas oublier la part qu’y prirent une « droite du non » souvent extrême (Front national), des socialistes prudents (tel Laurent Fabius), et quelques autres organisations.

Ce succès, joint à la chaleur d’une campagne commune réussie, ou se retrouvèrent des militants qui d’ordinaire se parlaient peu hors quelques noms d’oiseaux, laissa penser qu’il était possible de lui donner une suite politique dans le jeune électoral traditionnel, avec une élection présidentielle qui se profilait en 2007. Beaucoup des comités locaux pour le Non se transformèrent pour préparer cette échéance. Un programme fut mis au point, grand moment de démocratie participative (si, si). Et celles et ceux qui ont vécu les fièvres et les enthousiasmes de cette époque ont en mémoire la sinistre conclusion de l’épisode, où l’on vit trois candidats (Olivier Besancenot, José Bové, Marie-George Buffet) partir à l’élection avec…le même programme de base, celui élaboré par les comités locaux. Situation très originale, susceptible peut-être d’inspirer des doctorants en sciences politiques. Mais le résultat électoral fut cinglant, notamment pour Marie-George Buffet, qui ne méritait pas ça. Tel que nous le connaissons, le brave vieux Vladimir Oulianov eut dit, en se grattant la barbiche « les conditions objectives n’étaient pas réunies ».

Après le désastre, et les rancœurs qu’il produisit, c’est peut-être le départ du PS de Jean-Luc Mélenchon et des amis qui permit un second pas vers une perspective unitaire de la « gauche de gauche », celle qui se situait à gauche d’un PS poursuivant plus ou moins lentement sa dérive (son évolution diront d’autres) vers le social-libéralisme qui s’est débondé depuis la victoire de François Hollande. Pour le PCF, le nouveau Parti de Gauche (PG) de Mélenchon constituait un partenaire plus acceptable que le NPA, et, parti naissant ne remettait pas en cause le fait que lui, PCF, fournissait les gros bataillons militants de la gauche de gauche. Pas question toutefois d’envisager une fusion (toujours ces problèmes de conditions objectives, qui, comme chacun sait ou devrait savoir, masquent aussi des conditions tout ce qu’il y a de subjectives). On s’orienta donc vers un cartel d’organisations, ce qui tenait et tient encore aux lisières de l’engagement celles et ceux qui se reconnaissent certes dans le Front de gauche mais pas dans telle ou telle de ses composantes. Ce qui constitue une faiblesse.

Malgré l’hétérogénéité des parcours des uns et des autres, le Front de gauche parvint à s’accorder sur une candidature commune en 2012 autour de Jean-Luc Mélenchon, attirant même au fil des mois des courants se séparant du NPA. Cette candidature, portée avec talent par l’orateur hors pairs qu’est Jean-Luc Mélenchon permit à la gauche non socialiste de passer, pour la première fois depuis Georges Marchais, la barre des 10% à une élection présidentielle. Succès donc, assombri immédiatement par des législatives où la vague rose dévasta les îlots rouges, la gauche de gauche perdant la moitié de ses députés. Résultat du montage institutionnel qui a renforcé encore avec le quinquennat et son calendrier la prééminence de la présidence sur le parlement (merci Chirac et Jospin) et le maintien de celle d’un bipartisme dont on constate par ailleurs qu’une frange de plus en plus large de l’électorat de détache.

Il serait tentant d’analyser aussi la toute fraiche déroute municipale de la gauche, qui a frappé lourdement le tissu électoral communiste, comme une conséquence du rejet par une majorité de nos concitoyens de la politique gouvernementale et par conséquent du PS, et par conséquent de la gauche, puisque, médias y aidant puissamment, la gauche est trop souvent assimilée aux socialistes. Injuste ? Oui. Oui mais. Car il a manqué au Front de Gauche plusieurs éléments pour que son positionnement politique soit à la fois clair et crédible. Clair, car les alliances à géométries variables (les composantes du Front de gauche ne furent pas les seules à la pratiquer, le Modem, par exemple, étant champion toutes catégories de ce sport) ont brouillé l’image, d’autant que certaines querelles, notamment dans le cas de la capitale, ont défrayé la chronique, et que cette géométrie variable, surtout portée par le PCF, n’a pas permis à celui-ci de stopper son lent déclin local. Crédible car le Front de Gauche ne parvient pas à faire connaître clairement les termes d’une alternative politique cohérente. Les éléments de cette alternative existent pourtant, ils ont été développés lors de l’élection présidentielle et pourraient sans difficultés majeures êtres réactualisés, quoiqu’il faille s’y coller. Mais la communication est faible. Faible, certes, parce que les médias sont davantage attirés par les deux « gros » partis. Faible aussi, parce que la personnalité la plus connue du Front de Gauche, Jean-Luc Mélenchon en a sans doute trop fait dans la provocation et la formule assassine. Nous avons bien entendu tel de son entourage expliquant que cela était nécessaire pour être repris par les médias. Peut-être, mais si les médias ne reprennent que la forme (et surtout dans ce qu’elle a de plus spectaculaire, au sens debordien du terme) au détriment du fond, alors, problème il y a. Pour avoir, un peu, fréquenté le bonhomme, nous savons qu’il peut être charmant, que son humour est ravageur. Alors, Jean-Luc, des morsures, il en faut sans doute, mais des sourires aussi. Au-delà du cas Mélenchon, la communication du Front de Gauche demeure collectivement inexistante : celles et ceux qui sont le plus cités dans la presse (Pierre Laurent, Clémentine Autain…) le sont presque toujours au nom de leur organisation ou à titre personnel, mais jamais en tant qu’expressions du Front de Gauche. Mauvais, ça. Mauvaise aussi la manie qui a pris le Parti de Gauche de lancer des pronostics électoraux hasardeux. Je vais battre Marine Le Pen, disait Mélenchon, tant dans la course à l’Elysée que dans celle à Hénin-Beaumont. Raté. Nous serons dans le trio de tête à Paris, clamait la très dynamique Danielle Simonnet, tête de liste PG d’un Front de gauche sans le PCF. Encore raté. Comme quoi une élection n’est pas du même genre qu’un loto sportif, et si on se goure à chaque fois, la crédibilité en prend un coup. Et le management par objectif, qui fait tant de dégâts dans les entreprises « modernes », est moins encore adapté auprès de militants, sauf à les prendre pour des buses. (A suivre)


Commentaires

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lundi 2 juin 2014 à 19h38 - par  Sabrina319

Juste merci

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mercredi 7 mai 2014 à 21h27 - par  init6a

C’est bien, merci pour le rappel historique.
Cependant, l’article me paraît trop

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