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LES DIEUX SONT MORTS

jeudi 18 décembre 2014
par  Jacques-Robert Simon
popularité : 91%

Des dieux ont de tout temps coexistés avec les humains. Les Romains croyaient en un certain nombre de puissances divines : Jupiter, Zeus, Mars … La religion romaine était basée sur des rituels et était organisée par l’État. La paix des dieux était recherchée afin de garantir le bon fonctionnement de la société et des institutions. Il n’y avait donc pas de caractère mystique. Les dieux avaient un rôle utilitaire, ils permettaient l’acceptation par le peuple d’une soumission aux autorités et un renforcement de la cohésion « clanique » pour vaincre d’éventuels adversaires.

L’idée du Dieu unique, à la fois miséricordieux et tout-puissant, s’est faite au terme d’une lente évolution du monothéisme juif. Les chrétiens reconnurent le messie en Jésus de Nazareth. Venaient alors presque deux millénaires pendant lesquelles les vertus chrétiennes (Foi, Espérance, Charité) ont guidé les « croyants ». Il faut insister sur l’un des aspects, la Charité : l’amour de Dieu et de son prochain. Les relations interhumaines ne devaient donc plus s’inscrire dans un rapport de force ou dans un processus de domination puisque l’application du commandement « Aimez-vous les uns les autres » les rendait (théoriquement) impossible. Les instances de pouvoir comprirent très vite (en fait dès Constantin qui plaça Dieu au-dessus de lui) tout le parti que l’on pouvait tirer d’une divinité insaisissable. La bonne application dans la vie de tous les jours des vertus devait être vérifiée par une « autorité » : les puissants et leurs proches s’en chargèrent. Les soumis acceptaient tant bien que mal leur condition car en échange de leur soumission ils pouvaient avoir accès à la vie éternelle.

Les gens finirent par comprendre que ce « marché » était (peut-être) un leurre. A l’issue de la Révolution, la république en France prit son essor en 1792 avec l’abolition de la monarchie. Aux vertus théologales succédèrent des valeurs : la liberté et l’égalité dès 1789, auxquelles s’ajouta la fraternité par la suite. Le libellé des principes était bien différent mais des notions transcendantes étaient également présentes : l’Homme devait s’élever au dessus de lui-même. La fin du règne du Dieu, créé deux millénaires auparavant, fut ensuite officiellement proclamée : « Dieu est mort ! … Et c’est nous qui l’avons tué ! … Ne sommes-nous pas forcés de devenir nous-mêmes des dieux … ? ». Dieu n’était (apparemment) plus nécessaire puisque une voie purement humaine semblait pouvoir mener à un résultat du même ordre : faire vivre en bonne intelligence une collectivité.

A partir de ce constat, de multiples routes furent proposées pour atteindre les idéaux affichés : la République, le Communisme, le Socialisme, la Démocratie, le Libéralisme (du moins celui qui affirme la liberté comme principe politique suprême) Les visions différent considérablement si l’on s’en tient à l’exprimé. Cependant toutes les voies ont en commun de tenter de se débarrasser des instincts de domination pour se plier à un code moral ou politique respectueux de tous. Il s’agit de mettre en place des substituts de Dieu, conçus pour faire, dans le concret, la même chose.

Des tentatives louables furent mises en oeuvre pour rendre vivants ces ersatz, la plus probante fut la Démocratie. Celle-ci tient compte de la volonté populaire grâce à des élections. L’attente des gens vis à vis des élus, surtout les principaux d’entre eux, est tellement immense que les vainqueurs des élections sont (étaient) (presque) considérés comme des dieux. Cependant, leur proximité avec les Hommes du commun est trop grande pour que ceux-ci ne s’aperçoivent pas rapidement de leurs manquements voire de leurs tares ou de leurs vices. Les règlements et les lois (faites par le peuple) devaient remplacer les tables de la loi (écrites par une divinité), la loi se substituer à la morale. Ce remplacement s’effectua tout d’abord de façon satisfaisante : les lois permirent de concrétiser l’intérêt collectif qui s’imposait aux désirs individuels. Mais peu à peu, les lois découlèrent des rapports de forces ou d’influence et l’ « on » tenta de légiférer en sommant les égoïsmes particuliers. Cette opération est cependant rigoureusement impossible : un grain de sable ne se comporte absolument pas comme un tas de sable

A la place d’une morale (pour les individus) et de valeurs (pour une collectivité), un dogme fut proposé : la « concurrence libre et non faussée ». Pour tenter de préserver quelques valeurs essentielles dans un monde devenu sans morale, une quantité invraisemblable de règlements fut édictée. Ceci conduisit à deux conséquences. D’une part, les profanes (hors du cercle des législateurs) furent submergés et consacrèrent une part croissante de leur temps à constituer des dossiers, la tertiarisation de la société devenait inéluctable. D’autre part, l’application du dogme conduisit à la perte d’intelligence innovante dans toutes les strates de la société, y compris pour les travaux manuels. Cet enchevêtrement de lois, réglementations, décrets, recommandations ou normes limita à quelques uns la possibilité de les comprendre : ceux qui pouvaient s’offrir les services de spécialistes chevronnés qui savaient le contourner ou trouver un pays où les contraintes étaient moins lourdes. Il semble acquis que la réglementation ne tient lieu ni de morale, ni de valeurs.

C’est l’amas de richesses qui devint la seule source de pouvoir réel : la concurrence permit aux plus puissants de dominer ; le caractère non faussé de cette concurrence devint théoriquement le garde-fou mais il fut biaisé par un immense fatras législatif sans fil directeur par l’absence d’idéaux. Le capitalisme a donc tué les derniers dieux, ceux que les Hommes avaient eux-mêmes construits : les consommateurs ont remplacé les citoyens, les puissants sont devenus inaccessibles et invisibles des électeurs, des citoyens, du peuple. Comment va-t-on se débarrasser ou au moins contenir : l’Orgueil, l’Avarice, l’Envie, la Colère, la Luxure, la Paresse, la Gourmandise ?


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