CARLOS DO CARMO : LE FADO EN PERSONNE
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L’équipe de l’émission So Fado, Fernando Silva en ingénieur du son, Odete “the Voice” Fernandes et Manuel Miranda, était mobilisée pour cette soirée de fado organisée par Radio Alfa. Carlos do Carmo est venu y fêter ses 50 ans de carrière et a illuminé la soirée par son talent, son métier, sa présence auprès du public, et quelques discours à la fois émouvants et ironiques, incitant le public à être fiers d’être portugais malgré les vicissitudes que le pays traverse, invitant les français à visiter le Portugal, un « beau pays où les gens sont merveilleux, enfin pas tous, mais presque tous », et à en apprendre la langue.
Carlos do Carmo n’était pas le seul invité de la soirée, qui commença avec la violoniste polonaise installée à Lisbonne Natalia Juskiewicz, accompagnée par deux remarquables musiciens, Rodolfo Godinho à la guitare portugaise et Carlos Manuel Proença à la viola, ce dernier étant l’un des tout premiers viola du fado, accompagnateur des plus grandes stars, et que nous retrouverons plus tard aux côtés de Carlos do Carmo. Natalia Juskiewicz a une solide formation classique. Le violon fait partie de l’histoire du fado, version fado des rues. La prestation fut de qualité, mais peut-être manque-t-il encore à Natalia une accoutumance au rythme spécifique du fado, à ce compasso particulier. Cela viendra car la demoiselle a du talent. Un talent qui ne manque pas non plus à Cuca Roseta, jeune fadiste couvée à ses débuts par le guitariste Mario Pacheco. Elle aussi a bénéficié ce soir là d’un accompagnement de luxe avec, à la guitare portugaise, l’un des jeunes « monstres » de l’instrument, Bernardo Couto, avec André Ramos (viola) et Frederico Gato (viola baixa), excellent accompagnateurs eux aussi. Tant Natalia que Cuca Roseta ont offert au public un répertoire presque entièrement issu de celui d’Amalia Rodrigues. C’est bien, mais elles sont évidemment capables d’aller au-delà. Cuca Roseta a des moyens vocaux remarquables, une jolie présence, souriante. Elle est une des promesses du fado pour les années à venir.
Carlos do Carmo était fatigué. Il devait d’ailleurs prendre un court repos à la fin du concert avant de rejoindre ses admirateurs. Mais cette fatigue physique fut imperceptible lors de son tour de chant. De fatigue intellectuelle, il n’y avait pas. Alternant quelques uns des succès qui ont marqué sa carrière et des morceaux plus récents et moins connus, il a donné là, à notre avis, sa meilleure prestation parisienne depuis quelques années. La voix demeure chaude comme aux premiers temps, la présence scénique confine à l’évidence. Il paraît, et on sait, avant la première note qu’on va vivre un grand moment de fado. Sûreté rythmique, émotion, humour aussi, tout y est. A la guitare portugaise, un autre « monstre » est là, José Manuel Neto, plus, comme on l’a dit Carlos Manuel Proença à la viola, et à la viola baixa, Didi, venu du jazz et, comme l’a dit Carlos do Carmo, digne continuateur de l’ « inventeur » de la viola baixa dans le fado, Joel Pina, 94 ans aux prunes et qui continue de jouer après une longue présence auprès d’Amalia Rodrigues. Ces trois là ont offert un écrin superbe aux bijoux distillés par la voix magique de Carlos do Carmo. Belle soirée donc, une réussite pour Radio Alfa.
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