SOIREE DE FADO A RADIO ALFA

lundi 2 mars 2015
par  Jean-Luc Gonneau
popularité : 1%

Je me souviens que vers la fin du siècle passé, un ami critique de jazz, lui-même musicien amateur, me confiait la gêne qui le gagnait lorsqu’il devait chroniquer une soirée de jazz où officiaient des musiciens de ses amis. « Quand un jazzman vient des Etats-Unis pour un concert, disait-il, c’est facile. Mais quand il s’agit de potes avec qui tu as passé des nuits, avec qui tu as parfois toi-même joué, difficile d’être impartial. Et chacun peut être dans un mauvais jour, ça arrive aux plus grands. Et puis, qui suis-je pour juger ? »

J’étais dans cet état d’esprit quand je me rendis à la 4e soirée annuelle de fado de Radio Alfa consacrée aux artistes résidant en France, le 20 février, à la salle Vasco de Gama, située, comme le savent les habitués, au « middle of nowhere » au large de Valenton, bonjour les amis des transports en commun. Certes, la perspective d’un aller dans le véhicule du sympathique Mario Cantarinha, le talentueux photographe de Lusojornal, mais pas que, la certitude de l’accueil chaleureux de Natacha, la très charmante attachée de communication de la radio, et de l’équipe de l’émission So fado, à savoir la non moins charmante Odete Fernandes, présentatrice de la soirée, son grand ordonnateur Manuel Miranda, et le maître du son Fernando Silva, atténuaient ma perplexité, mais enfin, à y bien regarder, j’allais entendre Conceição Guadalupe et Filipe De Sousa, qui sont des « titulaires » des soirées du Coin du fado que nous organisons de temps à autre à Paris, Pompeu Gomes, vieil ami qui en fut longtemps, Monica Cunha que je connais depuis son arrivée à Paris, Nina Tavares et Tony do Porto, tant de fois croisés dans des soirées de fado, sans même parler de Vitor do Carmo et de Manuel Miranda, des amis de plusieurs décennies. Qui suis-je pour les juger ? La phrase de mon ami critique de jazz me taraudait. D’autant que ce genre de soirée, où interviennent six chanteurs dans une atmosphère de concert (c’est différent dans une petite salle) suppose de prendre d’un compte bien des aspects. Gérer les egos, par exemple : qui commence, qui finit, le tout dans quel ordre ? Le regretté José Renato m’avait conté les heures passées à concilier les vedettes du fado (Katia Guerreiro, Camané, João Braga, Antnio Zambujo, Carla Pires, Maria da Fé, Ricardo Ribeiro) qu’il avait programmé il n’y a pas si longtemps au Cirque d’hiver à Paris. Sans parler de l’organisation éventuelle de répétitions, car une prestation en concert demande davantage de précision que la même dans une petite salle, mais qu’il est difficile de réunir tout le monde en même temps. Je me disais que l’ami Miranda avait peut-être souffert.

Mais trêve de préambules, j’arrivai à Valenton. Accueilli comme prévu avec gentillesse, petit salut aux artistes (de répétition, me disent-ils, il y eut à peine, mais on va assurer). Et ils assurèrent, chacun dans leur style. Passage en revue. C’est Vitor do Carmo qui ouvre le show, avec sa simplicité et sa chaleur habituelle, synthétisant les influences de Carlos do Carmo et de Tony de Matos (on peut choisir plus mal comme figures tutélaires). Suit Nina Tavares, toute de bonhomie populaire, faisant honneur dans ses textes aux toiros de son Ribatejo natal. Puis, après entracte et stage au bar, Tony do Porto, dans son style théâtral (on le verrait bien dans une jolie comédie musicale genre revista à portuguesa) et sa solidité vocale. Il est suivi par Conceição Guadalupe, dont on connait les capacités vocales, qu’elle utilise avec maîtrise et le contact chaleureux avec le public. Second entracte, second stage au bar. Arrive Monica Cunha, à la diction impeccable et dont la sûreté rythmique n’est jamais prise en défaut. Un fado chanté par Odete Fernandes, qu’on entend trop rarement, accompagnée par Manuel Miranda et… Fernando Silva à la viola, puis la conclusion par Manuel Miranda, plus connu comme guitariste mais qui a démontré qu’il s’y entendait aussi comme interprète et comme auteur dans des fados de Lisbonne mais aussi de Coimbra.

Un mot sur les musiciens : impeccables Pompeu Gomes à la viola et Tony Correia à la viola baixa. On attendait avec curiosité la présence ensemble, événement rare, de Filipe de Sousa et de Manuel Miranda, tous deux excellents guitaristes comme on sait, mais aux styles bien différents. Synthèse réussie, les deux virtuoses se complétant fort bien, ce qui ne fut pas indifférent au succès de la soirée. Artistes satisfaits, public aussi. Que demander de plus ? Un stage final au bar pour fêter tout ça.


Commentaires

Brèves

11 octobre 2022 -  LE FADO CES PROCHAINES SEMAINES A PARIS... ET AILLEURS EN FRANCE

Pour écouter du fado ces prochaines semaines, tous les événements (sauf ceux qui ne nous ont (...)

20 septembre 2020 - LE FADO CES PROCHAINES SEMAINES A PARIS... ET AILLEURS EN FRANCE

Bonjour ! Pour écouter du fado ces prochaines semaines, tous les événements (sauf ceux qui ne (...)

26 mars 2018 - DES NOUVELLES DU COIN DU FADO

Ceci pour informer celles et ceux qui y ont participé ou se sont intéressés aux soirées de (...)