Les Augustes d’Or de la campagne référendaire
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Le cinéma a ses Césars, la musique ses Victoires. Il fallait bien trouver quelque chose pour les campagnes électorales. Le Cactus s’y est collé et a créé les Augustes d’Or. Nous avons donc réuni un jury prestigieux. Pour le présider, nous avons fait appel à celui dont l’indépendance est proverbiale, l’impartialité légendaire, notre rédac’ chef João Silveirinho, qui a bien voulu nous commenter le palmarès que voici de la campagne référendaire :
Auguste d’Or du meilleur critique
Dominique Rousseau
Auguste d’Or de la meilleure diffusion
Etienne Chouard
Auguste d’Or du meilleur rôle collectif
Appel des 200
Auguste d’Or du meilleur espoir féminin
Clémentine Autain
Auguste d’Or du meilleur espoir masculin
Olivier Besancenot
Auguste d’Or du meilleur second rôle féminin
Christiane Taubira
Auguste d’Or du meilleur second rôle masculin
José Bové
Auguste d’Or du meilleur senior
Charles Pasqua
Auguste d’Or du meilleur rôle étranger
Raoul-Marc Jennar et Fritz Bolkestein
Auguste d’Or du meilleur rôle de méchant féminin
Ségolène Royal
Auguste d’Or du meilleur rôle de méchant masculin
Jack Lang
Auguste d’Or du meilleur plantage
François Hollande
Auguste d’Or du meilleur rôle féminin
Marie-Georges Buffet
Auguste d’Or du meilleur rôle masculin
Jean-Luc Mélenchon
RlB- João, difficiles, les délibérations ?
JS- Il y a eu des débats, c’est certain, mais, hors une ou deux bagarres et une douzaine de crises, tout s’est bien passé.
RlB- Quelques commentaires, peut-être.
JS- On peut prendre les choses dans l’ordre. Pour la meilleure critique, deux noms se sont détachés : Yves Salesse et Dominique Rousseau. Nous avons préféré Dominique Rousseau, qui est moins apparu médiatiquement. Pour la meilleure diffusion, Etienne Chouard a fait l’unanimité, et pour l’Auguste du meilleur collectif, ATTAC et Copernic ont obtenu des voix, mais nous avons choisi la nouveauté.
RlB- Venons-en aux acteurs
JS- Pour le meilleur espoir féminin, il y a avait peu de nominées, ce qui est inquiétant pour l’avenir. Clémentine Autain a pris pendant cette campagne davantage de sérénité et de recul et fait un très joli parcours. Aurore Filipetti, qui aurait pu avoir des partisans, est passée complètement à côté de son sujet. Anne Hidalgo a été finalement assez discrète. Marielle de Sarnez a été citée. Chez les espoirs masculins, Olivier Besancenot a confirmé son excellente prestation de 2002. Il lui faudra à l’avenir s’émanciper de ses rôles de cycliste, mais il en a les moyens. Ses rivaux potentiels ont déçu : Hervé Gaymard était absent pour d’obscures raisons de mètres carrés, Jean-François Copé a beaucoup déçu. Et François Baroin a été très transparent pendant cette campagne. Un membre du jury a cru bon d’ajouter « pendant la campagne seulement ? », mais c’est une mauvaise langue. Quant au meilleur second rôle féminin, Christianne Taubira s’est imposée. Si elle avait débuté plus tôt sa campagne, elle aurait pu être une très sérieuse candidate au meilleur rôle principal. Il faut dire aussi qu’elle ne travaille pas pour une grande production, ce qui est handicapant. Mais on reparlera d’elle. José Bové aurait aussi pu concourir à un premier rôle, il a préféré le terrain , où il excelle. Dans cette catégorie, les favoris, Michel Barnier, très pâle, Thierry Breton et Jean-Louis Borloo, très décevants, n’ont pas convaincu. Claude Bartolone a été cité.
RlB- Charles Pasqua meilleur senior, la décision a dû être disputée, non ?
JS- C’est vrai qu’il y avait du monde au balcon, entre des conseillers constitutionnels en goguette, des retraités soustraits à leurs charentaises, des vrais-faux retirés de la politique, des sénateurs plus ou moins rangés des voitures. Nous avons tout de suite été d’accord pour éliminer Barre, Jospin et Simone Veil, qui n’ont trouvé aucun défenseur. Giscard et Delors avaient quelques partisans. Mais le numéro de Pasque face à Hollande chez Mme Ockrent a emporté la décision. Du grand Pagnol.
RlB- Pouvez -vous nous le rappeler ?
JS- A un moment, à brûle pourpoint, Pasqua dit à Hollande ; « de toutes façons, vous n’avez jamais travaillé de votre vie, vous n’avez jamais rien fait de vos dix doigts ». L’autre s’étouffe d’indignation, pointe son doigt vers Pasqua, « et vous ? et vous ? ». « Vingt ans de Ricard ». Hollande ne méritait pas ça, mais c’était une pittoresque illustration du fossé qui sépare bien des électeurs de leurs « élites » formées dans les mêmes cercles. Pasqua a appuyé, avec sa trivialité coutumière et l’accent marseillais, à un endroit où ça fait mal.
RlB- Deux lauréats pour le meilleur rôle étranger...
JS- Nous voulions éviter les doubles distinctions, solution de facilité. Nous y sommes parvenus sauf dans ce cas. D’un côté, Jennar est un fantastique pédagogue. De l’autre, Bolkestein est un comique impressionnant. Déjà, hein, une résidence secondaire à Maubeuge, sauf le respect que nous devons à l’ami Rémi Pauvros, le maire du coin, c’est original. Durão Barroso, excellent dans le rôle de l’ahuri qui s’aperçoit de la catastrophe après coup, a aussi eu des partisans.
RlB- Récompenser des rôles de « méchants », c’est une innovation, non ?
JS- C’est un clin d’œil à la tradition hollywoodienne du « bad guy ». Pour le rôle féminin, le vote a été unanime. Ségolène a été époustouflante d’agressivité et de langue de bois. Pour les hommes, ce fut plus difficile, d’autant que les meilleurs dans cette catégorie, Hollande et Lang, jouaient à contre emploi, alors qu’un vrai spécialiste, comme Nicolas Sarkozy, a été curieusement discret.
RlB- Pas si curieusement que ça...
JS- On sait, il a d’autres objectifs en tête. Bref, Lang a gagné d’une courte tête. Emmanuelli a été aussi cité.
RlB- Alors, le meilleur plantage, une autre innovation. Pourquoi pas Chirac ?
JS- En matière de plantage, Chirac a déjà été maintes fois récompensé. Nous avons préféré, là aussi, la nouveauté.
RlB- Les grands vainqueurs, pour finir. Beaucoup attendaient Fabius.
JS- Parlons d’abord de Marie-Georges. On l’avait plutôt vue jusqu’à présent dans les seconds rôles, où elle avait été très bonne, dans « Jeunesse et Sport » , par exemple. Là, elle a vraiment éclaté. La décision du jury a été facile. Vous avez parlé de Fabius. Il a réalisé une grande performance avec un sens de l’économie admirable. Mais nous avons privilégié Mélenchon, qui est aussi sorti des seconds rôles auxquels nous étions habitués, comme « Le trublion » ou « Enseignement professionnel ».
RlB- Il est quand même resté trublion...
JS- Oui, mais il acquis une autre dimension. Il faudra maintenant qu’il se donne les moyens logistiques pour confirmer.
RlB- Une dernière question : vous avez récompensé Ségolène Royal et François Hollande, qui sont conjoints dans la vie. Ce n’est pas un peu trop pour une seule famille ?
JS- Nous avons cherché à récompenser les meilleurs dans leurs catégories. Nous n’avons pas à tenir compte de la vie privée de chacun. C’est notre devoir d’impartialité.
RlB- A ce propos, certains ont trouvé étrange que quatre des lauréats, Dominique Rousseau, Clémentine Autain, Christiane Taubira, Etienne Chouard aient participé aux Jeudis Non de Résistance 7e Art, soutenus par le Cactus...
JS- La bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe. Certains participants des Jeudis non n’ont pas été primés, et la majorité des récompensés n’y ont pas participé. Et est-ce notre faute, à nous, si les Jeudis Non ont su attirer les talents. Pour ma part, je m’en réjouis.
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