Féminicides : stop com

vendredi 14 mai 2021
par  Fatima Benomar
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Le 39ème féminicide de l’année commis le 4 mai à Mérignac aurait pu être évité. Brûlée vive par son mari qui venait d’être condamné pour violences conjugales et libéré sans qu’on daigne la prévenir ou organiser sa protection, Chahinez, 31 ans, voulait vivre et avait tout fait pour défendre son droit à l’existence. Mais les habituels dysfonctionnements judiciaires ont eu raison de sa combativité.

Nous oscillons depuis plusieurs décennies entre les chiffres d’une femme qui meurt tous les 2,5 jours, ou tous les 3,5 jours, quels que soient les gouvernements qui se succèdent. L’Inspection Générale de la Justice évoque dans son rapport d’octobre 2019 « de véritables dysfonctionnements en matière de suivi des auteurs de violences et de protection des victimes = ». 41% des victimes de féminicides avaient dénoncé des violences antérieures.

Le suivi des hommes violents après leur incarcération est également un sujet primordial, afin qu’ils arrivent à dépasser les schémas machistes qu’ils ont intégrés et le rapport d’appropriation qu’ils développent envers leurs compagnes. La prison étant en soi un environnement pathogène, les peines peuvent ne faire qu’aggraver ce rapport à la violence si elles ne sont pas assorties d’un travail de fond, comme l’a plusieurs fois plaidé le Magistrat Luc Frémiot. Les forces de l’ordre doivent aussi déconstruire les idées reçues qui les amènent à jeter le discrédit sur les victimes de violences conjugales, à ne pas prendre au sérieux les menaces qu’elles reçoivent, sous prétexte qu’elles n’ont pas l’attitude ou les éléments de langage qu’ils attendent d’elles.

Sans oublier les faibles moyens financiers alloués à la cause comme le dénoncent les associations qui réclament un milliard d’euros, soit un budget calqué sur ce qui se fait en Espagne, un des meilleurs modèles en la matière. Pendant le premier confinement, en pleine explosion des violences conjugales, le gouvernement qui mettait des milliards sur la table au nom du quoi qu’il en coûte dans de nombreux secteurs, s’est entêté à refuser de nous entendre concernant ce qui est censé être la grande cause nationale. Les signalements pour violences sexuelles ou sexistes ont aussi augmenté de 60% durant le deuxième confinement.

Nous avons aussi assisté à une répugnante récupération raciste de ce féminicide de la part de plusieurs personnalités de droite et d’extrême-droite. Lydia Guirous, Valeurs Actuelles ou encore William Goldnadel ont voulu mettre en exergue un lien entre féminicides et immigration sous prétexte que l’assassin avait un patronyme arabe. Certains ont fustigé le prétendu "silence des féministes". Depuis, les a-t-on entendu, eux ?

Trois autres femmes ont été tuées par leurs compagnons. Jeudi 6 mai à Forges-de-Lanouée, une sexagénaire a été abattue par son conjoint qui s’est ensuite suicidé, laissant une lettre confirmant le meurtre et évoquant une affaire d’agressions sexuelles sur mineur de moins de 15 ans dont il avait reconnu les faits. Mardi 11 mai à Reims, on a retrouvé le corps de Coralie, trentenaire tuée à l’arme blanche par son conjoint Vincent Philippon. Son entourage nous apprend qu’elle avait décidé de rompre, et qu’elle le lui avait annoncé le soir où il l’a tuée. Dimanche 9 mai à Longpré-lès-Amiens, Claire, 34 ans, mère de 2 enfants, a été poignardée à mort par son compagnon Gwénaël Welsch, déjà connu des forces de l’ordre, qui étaient intervenues en 2020 à son domicile alors qu’il possédait une arme. Aucune de ces affaires ne montre un quelconque lien entre immigration et féminicides. On entrevoit, en revanche, ce que les féministes ont mille fois pris la peine d’analyser. Désir misogyne d’empêcher une femme de faire le choix de partir. Continuum des violences sexuelles, pédocriminelles et sexistes. Dysfonctionnements judiciaires. Patriarcat culturel et institutionnel.


Commentaires

Logo de Elodie Pichon
jeudi 20 mai 2021 à 14h40 - par  Elodie Pichon

Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi certaines personnes tuent les femmes à cause de son sexe. C’est assez absurde quand même. C’est déjà dur à supporter pour nous de vivre avec des machos sexistes et prétentieux. Et voilà qu’il y a encore des gens qui en veulent à notre vie.

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