« Il est quand même fort, ce Mélenchon… ».

jeudi 19 mai 2022
par  Jean-Luc Gonneau
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Le fait est là : la gauche a perdu l’élection présidentielle, ne rassemblant qu’un petit tiers des suffrages exprimés lors du premier tour, où les partis jadis dominants, PS et PCF, réalisèrent des scores faméliques. Ce qui permit à Jean-Luc Mélenchon, candidat de la France Insoumise, porté de plus par une campagne militante vigoureuse et un programme charpenté, de frôler une qualification pour un deuxième tour. Et de laisser entrevoir des espoirs pour les élections législatives toutes proches si les organisations de gauche, parties en soli à la présidentielle, parvenaient à s’unir. Pari improbable compte tenu de la pluie de critiques qui s’abattit sur Mélenchon de la part de la gauche, et particulièrement, mais pas que, du PS lors de la campagne présidentielle. Et pourtant pari gagné, ce qui raviva quelque enthousiasme à gauche. Enthousiame palpable dans les locaux de la Gauche Cactus (tenus secrets, on ne sait jamais) terrés au cœur du 9-3, proximité populaire oblige. Ainsi, notre rédac’chef João Silveirinho, lors d’une conversation animée avec Mick et Paule lançait : « Il est quand même fort, ce Mélenchon… », ce dont convinrent nos deux pétroleuses autoproclamées. Ainsi eûmes la joie d’accueillir l’ami Sébastien Voilade, qui fut notre chroniqueur culturel voilà des lustres, qui consentit ainsi à quitter aux heures apéritives le tabouret du Rosebud, bar dont il ne s’absente guère et d’où il observe avec persévérance les turbulences culturelles parisiennes. Ainsi Jancry nous assura être toujours à l’affût de thèmes pour ses illustrations. Et même notre présidente, qui passe tout son temps à édifier les jeunes générations et à sillonner Paris, ses banlieues, les provinces françaises, l’Europe et le monde, nous signifia par courriel envoyé d’on ne sait où, son envie de reprendre des activités militantes délaissées depuis un temps certain.

Cette union réalisée sans trop de douleur (sauf au sein du PS, mais on y reviendra) a conforté les espoirs législatifs, que Mélenchon a fixé très haut : une majorité parlementaire qui le conduirait à devenir premier ministre. Ne rêvons qu’un peu : il faudrait pour cela non seulement une mobilisation de tout l’électorat habituel de la gauche, mais celle d’une partie significative de la masse des abstentionnistes. Pas sûr que le talent d’orateur mobilisateur de Mélenchon et une campagne au canon y suffisent. Par contre, il apparaît vraisemblable que la dynamique unitaire permette une hausse non négligeable du nombre de parlementaire de gauche, et c’est toujours ça pris. Ce qui pourrait priver les macronistes « renaissants » (ils étaient donc morts ou comateux ? Macron nous aurait menti à l’insu de son plein gré) d’une majorité absolue et les pousser à des combinaisons embarrassantes avec les Républicains, voire le RN. La démarche unitaire aura aussi permis une clarification, ou plutôt une confirmation de clarification quant au socialisme français.

Pour beaucoup de militants ou de sympathisants de l’ensemble de la gauche, la question de savoir si le PS, à l’aune de certaines des mesures prises par les gouvernements socialistes du passé, notamment (mais pas seulement) pendant le mandat de François Hollande, et de l’évolution des prises de position du parti au fil du temps demeurait un parti de gauche. Il y a au PS des « socio-démocrates sincères » demeurant attachés aux valeurs traditionnelles de la gauche, dont la figure historique est aujourd’hui Martine Aubry, il y avait des « socialistes marxistes », mais il semble qu’ils n’aient pas survécu à la disparition de Jean Poperen (1997), il y a des « socialistes modérés », difficilement classables quant à leurs références, des « socio-libéraux », dont le père spirituel est Jacques Delors, et l’agent principal François Hollande depuis l’époque des « transcourants » voici une trentaine d’années, qui prenaient explicitement comme modèle le parti démocrate américain : démocrate, oui, socialiste, bof, et il y des « socialistes opportunistes » pour lesquels l’étiquette était surtout un moyen de s’ouvrir des perspectives de carrière : on en vit arriver un paquet en 1981, quelques-uns en 2017. Certainement moins maintenant. Manuel Valls en est un exemple. C’est en tout cas parmi ceux-ci et les « socio-libéraux » qu’Emmanuel Macron fit son marché pour son « aile gauche » : des gens qui n’étaient plus de gauche depuis longtemps ou qui jamais ne l’avaient été. En ce sens, l’accord programmatique entre le PS et les autres formations de gauche constitue une clarification. Fragile, peut-être, mais donnant au PS des perspectives de renouvellement. Décidément, « il est fort, ce Mélenchon ». D’ailleurs, depuis le début de la campagne législative, on ne parle que de lui : pas mal pour un battu aux présidentielles !


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