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Construire un front large pour la démocratie

mardi 2 mai 2023
par  Patrick Le Hyaric
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Selon une enquête ViaVoice pour nos confrères de Libération (1) plus de trois Français sur quatre estiment que la démocratie française est en « mauvaise santé ». C’est dire la profondeur de la crise démocratique. Nous assistons, pour le moins, à une dérive autoritaire du pouvoir macroniste. Elle est grosse de dangers pour l’avenir. En effet, alors que la plupart des enquêtes d’opinion confirment la progression de l’extrême droite, les actes et les déclarations du pouvoir, validant de nombreuses thèses portées par celle-ci, l’encouragent. Au-delà, elles créent des jurisprudences permettant de saper les fondements de la République telle qu’énoncée dans le préambule de 1946 de la Constitution française, partie intégrante de notre bloc de constitutionnalité.

Celle-ci qualifie notre République de « sociale et démocratique ». Et, l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen déclare que « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément ». M. Macron s’en affranchit allègrement. Les institutions présidentialistes plaçaient déjà le Parlement sous contrainte d’un ordre du jour dictée par le pouvoir exécutif. Aujourd’hui c’est le président seul qui en détermine le calendrier, comme en témoignent ses prises de paroles, ou même les ministres découvrent les décisions concernant leurs périmètres de compétences. Il a expliqué ces derniers jours que l’utilisation de l’alinéa 49.3 de la Constitution serait utilisée autant que de besoin pour contraindre le Parlement. Il envisage même de gouverner par « ordonnances ».

Et, l’accumulation des lois sécuritaires constitue un inquiétant arsenal aux mains du pouvoir. Ce qui a été présenté comme des outils pour lutter contre le terrorisme peut devenir un rouleau compresseur contre toute opposition, toute idée subversive, toute action populaire. C’est ce qui a conduit la défenseuse des droits à s’alarmer ces derniers jours des « risques d’atteinte aux droits et libertés ». Cette alerte est inédite ! En effet, le gouvernement multiplie les interdictions de manifester. Il a été jusqu’à assimiler récemment le port d’une casserole à une menace terroriste. Un mot désormais utilisé à tout va pour faire taire toute contestation. C’est une insulte à celles et ceux qui en sont victimes ! C’est vraisemblablement au nom de la lutte contre « l’éco-terrorisme » que l’ambitieux locataire de la place Beauvau à tour à tour promis la dissolution de la coordination d’associations regroupées dans « les soulèvements de La Terre », d’Alternatiba, inquiété des associations d’aides aux migrants, de droit au logement au nom du délit de « promotion du squat », inscrit récemment dans une loi.

Plus facile d’accuser des associations que de créer des structures d’hébergement d’urgence et de lancer un grand plan de construction et de réhabilitation de logements à prix abordables et de faire respecter le droit au logement. Une étape supplémentaire a été franchie avec les menaces de ce même ministre visant à discréditer et à punir du retrait d’aides publiques la Ligue des droits de l’Homme. Celle-ci a commis le crime de documenter la réalité des violences policières lors du mouvement de Saintes-Soline. Cette vile attaque est d’ailleurs fortement soutenue par les grands médias du système pour discréditer cette grande association créée pour défendre le capitaine Dreyfus et qui, depuis, n’a jamais failli à son devoir, contrairement aux dires de la Première ministre et du Figaro. Contre les faits, ce dernier s’est permis d’accuser l’organisation des droits humains d’avoir couvert les crimes staliniens pendant que la cheffe du gouvernement lui fait un procès en… islamo-gauchisme. Quelle bassesse dans ce continuum de discrédit de l’organisation de Francis de Pressensé, de Paul Langevin, de Ferdinand Buisson, de Daniel Mayer, d’Henri Noguères, de Madeleine Rebérioux, d’Henri Leclerc et bien d’autres.

Il s’agit, en fait, pour le pouvoir d’empêcher toute contestation en disqualifiant des associations, en les accusant de ne pas se soumettre aux « valeurs » de la République. Et, la course à l’échalote est sans fin ! Voici que M. Ciotti, ancien camarade de parti de M. Darmanin, votant comme lui le recul de l’âge de départ en retraite est furieux contre ceux qui s’y opposent notamment les forces de gauche. Il qualifie son action de « terrorisme d’extrême gauche » et souhaite que le combat contre elle devienne une « priorité nationale à l’égal du combat contre le terrorisme islamique ». (Entretien dans le Figaro du 27 mars). Mieux encore le président du Medef a pu dans un silence assourdissant déclarer il y a quelques semaines que l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite est « un risque nécessaire » (2)

La boucle est bouclée. Pousse-t-il à décréter l’État d’urgence ? Décidément le fond de l’air sent mauvais ! En vérité, ce sont les « valeurs » du capitalisme que le pouvoir, la droite et l’extrême droite ne veulent pas voir contestées. L’outil pour ce faire est la fameuse loi baptisée à l’origine de « lutte contre les séparatismes » rendue plus présentable sous le vocable de « loi confortant le respect des principes de la République ». Celle-ci conditionne l’attribution d’aides publiques à la signature d’un « contrat d’engagement républicain ». Ainsi, une association portant une parole critique sur l’action de l’État peut être considérée comme attentatoire à la « République ». On croit rêver ! Pourtant c’est de cela qu’il s’agit lorsque le ministre de l’Intérieur suggère de dissoudre « Les soulèvements de la Terre » ou encore lorsqu’il appelle les collectivités et l’État à réduire les aides publiques à la Ligue des droits de l’Homme. Il est flagrant que ce même ministre de l’Intérieur a trouvé les premières manifestations trop tranquilles. Du coup, il a fait changer la tactique policière pour favoriser le développement de violences afin de discréditer le mouvement syndical.

D’ailleurs en refusant de recevoir l’intersyndicale au plus fort de la crise, M. Macron agit en conformité avec sa pensée profonde : Les confédérations syndicales sont pour lui, inutiles. Toutes les élucubrations médiatiques autour de ses rapports personnels avec Laurent Berger cachent cette conception fondamentale. Il fallait humilier les syndicats, les désigner comme inutiles aux yeux des travailleurs pour en affaiblir la force et le rôle. Or, c’est le contraire qui se produit. L’unité syndicale marque vraisemblablement une nouvelle étape dans le combat du travail contre le capital. Les mouvements syndicaux, citoyens et environnementaux, tirent leur force de leur capacité d’agrégation de toutes les résistances sociales jusqu’à réclamer une nouvelle République ; sociale et démocratique.

La décision du conseil constitutionnel, approuvant le recul de l’âge de la retraite, tout en refusant le référendum d’initiative partagé, a convaincu de nouvelles fractions de la population du verrouillage du système accélérant et réduisant encore le chemin qui mène à la crise de régime. Un régime qui, par nécessité, s’enfonce dans un néo-libéralisme autoritaire. Face à ce projet, les antagonismes entre le capital et le travail sont poussés à leur comble. De partout le peuple constitué veut se faire entendre, aspire à prendre son destin en main, pour qu’enfin ses intérêts, ses aspirations à mieux vivre soient pris en compte.

Le grand complexe du média-business, comme à chaque moment clés des mouvements populaires, se placent à contre-courant pour tenter de faire réussir l’entreprise macroniste*, notamment avec la survalorisation des « violences » et les mensonges à propos de la lutte contre les hausses des prix, ou encore en se félicitant d’une attitude prétendument responsable de l’extrême droite désormais présentée, tout naturellement, comme une alternative. Mais, il n’y a pas de démocratie véritable sans pluralisme des idées, sans pluralisme politique, sans pluralisme des médias. La démocratie sera amputée tant que la fine fleur du capital national détient la quasi-totalité de la presse et des médias. Dans un contexte si préoccupant, si inquiétant, les forces sociales, syndicales, associatives, les forces de gauche, écologistes et démocratiques ne devraient-elles pas lancer ensemble un puissant appel unitaire suivi d’une multiplicité d’actions pour la démocratie et les libertés, le respect de la personne humaine, le respect de la volonté et de la souveraineté populaire ? C’est une pressante nécessité au moment où la bourgeoisie capitaliste veut asphyxier la démocratie pour accélérer le démembrement des conquis sociaux. Article paru dans la Lettre internet de Patrick Le Hyaric


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