GISEMENTS D’EMPLOIS...
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Il est maintenant admis par (presque) tous que nos sociétés s’enlisent chaque jour davantage dans une opulente morosité et tendent vers un monde dual où une minorité aura tout, les autres se battant pour le reste. La mondialisation est le terme à la mode pour le processus d’optimisation de l’exploitation de l’homme par l’homme bien connu, décrit et analysé dès le milieu du XIXe siècle. L’appropriation par des particuliers de biens collectifs n’a rien de novateur et les mécanismes pour la mener à bien sont bien maîtrisés. Notre siècle connaît une difficulté supplémentaire par rapport aux temps précédents : il est acquis que la frénésie de consommation, même restreinte à une minorité - le reste de la population étant maintenu sous une contrainte de plus en plus féroce pour qu’elle ne se rebelle pas - ne pourra pas être satisfaite par les ressources de notre planète.
Les systèmes politiques les plus divers sont touchés par le même malaise. L’organisation en régions de l’Allemagne n’a rien de commun avec le centralisme jacobin. La démocratie du spectacle (mais aussi des contre-pouvoirs) des Etats-Unis n’a que peu de parenté avec la monarchie constitutionnelle anglaise. Le patriarcat japonais n’a aucun trait commun avec la « parité » établie entre hommes et femmes dans les pays du nord. Pourtant, malgré les rodomontades des uns ou des autres, toutes ces nations semblent souffrir de langueur.
Le vieillissement de la population conduit certes à une certaine frilosité. Les gens bardés de références n’osent plus rien, n’avancent plus et finissent donc par tomber. Une société vivante se définit par sa capacité d’adaptation et plus encore de création. La seule mesure véritable de la richesse d’une société ne se mesure pas en termes financiers (le célèbre Produit Intérieur Brut) mais par sa faculté de créer. Le progrès se mesure par ce que l’on peut nommer l’énergie créative. Mais il ne faut pas chercher la raison de notre apparente stérilité dans l’âge de la population, les créateurs ne connaissent pas de limite d’âge !
On distingue généralement trois secteurs d’activité : le secteur primaire qui regroupe les activités agricoles et l’exploitation des ressources naturelles : le secteur secondaire qui concerne la production de biens par une activité de transformation ; le secteur tertiaire qui a pour objet la production de service. Toutes les sociétés évoquées ont en commun un fort développement du secteur tertiaire au détriment des deux précédents. Un « service » a pour particularité d’être consommé en même temps qu’il est produit. Il a une seconde caractéristique, la notion de « progrès » y est remplacée par celle de complication. Les progrès en agriculture sont aisément visibles et quantifiables. Personne ne remplacerait les tracteurs par les chevaux de labour, l’agriculture raisonnée est objectivement supérieure aux méthodes productivistes. Le progrès se définit tout aussi aisément dans le domaine industriel : personne ne nie l’apport de la machine à vapeur, des antibiotiques, des ordinateurs....
La notion de progrès est beaucoup plus diffuse dans le secteur tertiaire. Il semble même que son développement coïncide avec la stérilisation des actions par des lourdeurs, annoncées pourtant comme de nouvelles facilités. Une illustration qui vaut exemple : le remplacement du numéro téléphonique (12) par 27 nouvelles coordonnées. L’invasion du tertiaire coïncide également avec la stérilisation des esprits : on ne fait plus ce qui est souhaitable ou nouveau mais ce qui est possible, légal, rentable. Le secteur tertiaire attirant à lui les jeunes les plus entreprenants, car c’est dans ce domaine que se font le plus facilement les gains dans l’immédiateté, des pans générationnels entiers se voient confiés pour tâche de compliquer la vie de leurs semblables en mettant en avant un monde de paillettes contraire à un monde de progrès. J’entends bien que les services aux personnes âgées doivent se développer et qu’ils représentent un progrès éthique. Mais il ne sera pérenne que grâce à l’apport des secteurs précédents. Il s’agit donc d’un progrès « par conséquence » : son seul développement n’entraîne pas toute la société.
Les « gisements d’emploi » ne se trouvent pas à long terme dans le secteur tertiaire mais dans ceux qui permettront une nouvelle marche en avant : des technologues capables de concevoir des transports ne faisant pas appel aux combustibles fossiles, d’autres qui sauront assainir l’eau et la produire, des paysans responsables et soucieux de l’environnement, respectueux également des animaux qu’ils élèvent. Il faut rendre aux individus et aux collectivités leurs capacités de création.
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