MEMOIRES DE LA GAUCHE UNITAIRE : CHAPITRE 2 : LES ELECTIONS REGIONALES DE 2004
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Résumé du Chapitre précédent : Une boulette d’Yves Salesse fait exploser « Ramulaud » dès sa première manifestation nationale à l’orée de l’automne 2003...
Ramulaud aura cependant enfanté quelque chose. Plusieurs animateurs de l’appel, tenants pour la plupart de l’idée de « pôle de radicalité » se constituent en réseau : Alternative Citoyenne. S’y côtoient des communistes « rénovateurs » (Patrick Braouzec, Pierre Zarka, Roger Martelli...), d’anciens ou actuels responsables syndicaux ou associatifs (Claire Villiers, Christophe Aguiton, le vibrionnant Pierre Cours-Salies...) et des « électrons » plus ou moins libres (Clémentine Autain, Hamida Ben Sadia, cette dernière venant de mettre les voiles du Parti Socialiste). On y croise aussi, plus épisodiquement, le Cactusien Jean-Luc Gonneau.
L’année 2004 offre aux ambitions d’une gauche unitaire deux perspectives électorales : les élections régionales et un peu plus tard les élections européennes.
Pour les élections régionales, la LCR décide de poursuivre la lune de miel commencée avec Lutte Ouvrière aux précédentes élections européennes, qui avait permis au tandem historique Laguillier-Krivine de siéger à Strasbourg. A l’intérieur du Parti Communiste, les rénovateurs et une partie de la direction envisagent des listes unitaires. Cette position est loin de faire l’unanimité. Les bastions picard (Maxime Gremetz) et nordiste (Alain Bocquet) en pincent pour des listes PCF pur sucre. Des « réalistes » veulent une alliance dès le premier tour avec le parti socialiste, plus productive, jugent-ils, en termes de sièges de conseillers régionaux. Prudemment, la direction du PCF laisse carte blanche à ses instances locales pour mitonner les configurations électorales qui leur semblent les plus conformes aux « spécificités locales ». On verra donc, au premier tour, des listes PCF « autonomes » (limitées de fait aux bastions susnommés, plus l’Auvergne), des listes d’union de la gauche genre « gauche plurielle » (les plus nombreuses), et des listes d’ « union partielle » (avec le MRC, ou le PRG, ou les deux : là où, en fait, le PS apparaissait trop gourmand : Alsace, Aquitaine, Franche-Comté avec dans les trois cas des résultats calamiteux). Seule exception, mais emblématique : l’Ile de France, la région de la capitale, et celle de la secrétaire générale du Parti. Les communistes franciliens, loin d’être unanimes sur ce point, décident finalement de ne pas faire alliance avec le Parti socialiste au premier tour. Des négociations bilatérales commencent avec diverses organisations. Elles achopperont avec le MRC de Chevènement, qui préfèrera (déjà) concourir avec le PS, et aboutiront avec Alternative Citoyenne (AC) et la Gauche Républicaine, des dissidents du chevènementisme. Liste unitaires un peu maigrelettes dans leur composition, mais unitaires quand même. Symboliquement, la campagne est conduite par deux têtes d’affiche au niveau régional, Marie George Buffet (PCF) et Claire Villiers (AC). Symboliquement, ce sont des non-communistes qui conduisent les listes à Paris (François Labroille, AC) et en Seine Saint-Denis, le fief de Marie-George (Mouloud Aounit, « associatif »).
Le soir du premier tour, hors les régions à « union partielle », n’atteignant pas les 5% permettant une fusion au second tour, les listes PCF « pur jus » réalisent entre 9 et 11% et fusionneront avec le PS au deuxième tour. En Ile de France, les listes « unitaires » dépassent les 7%. Il y a aura aussi fusion avec la « gauche plurielle » au second tour. Quant au PACS LCR-LO, il n’atteint nulle part les 5% fatidiques. En Normandie, une liste AC/ANPAG subit le même sort.
Au final, le PCF conserve un nombre respectable de sièges, Alternative Citoyenne compte quelques élus franciliens (Tarek Ben Hiba, François Labroille, Claire Villiers) et la Gauche Républicaine un. En Ile de France, nonobstant quelques tentatives en solo de Mouloud Aounit pour guigner une vice-présidence, c’est Claire Villiers qui l’obtiendra.
De l’épisode « régional », on peut retenir quelques éléments : à ce moment, la direction de la LCR demeure enfermée dans son alliance un brin et plus mortifère avec LO ; le temps du centralisme démocratique est bien fini au PCF, où ce sont les instances locales qui ont pris les choses en main, moins sur une ligne unitaire que sur une ligne identitaire ou pragmatique de type « gauche plurielle ».
Là où il y a « ouverture », elle demeure modeste : en Ile de France, les élus régionaux de la liste unitaire sont au final aux 4/5 membres du PCF. Enfin, les autres forces se réclamant à divers titres d’une alternative au libéralisme sont soit au chaud dans leur formation d’origine (PS, Verts...) soit en débandade électorale (MRC) ; en Franche Comté, la liste MRC-PCF-PRG, emmenée par le héros local, Chevènement himself, n’atteint pas 5%.
Au PCF, tous comptes faits, tout le monde ou presque il est alors content : les « unitaires » brandissent leur score honorable en Ile de France, les « identitaires » les leurs, à deux chiffres ou presque, et les « gauche plurielle » comptent leurs conseillers régionaux, acquis sans coup férir, portés par la « vague rose » qui est bien davantage un rejet du gouvernement Chirac-Raffarin qu’un élan passionné vers un Parti Socialiste lui-même ébaubi de se retrouver à la tête de toutes les régions métropolitaines sauf une.
La cause unitaire a-t-elle progressé à gauche au cours de ces régionales ? On vient de le voir : un (tout petit) peu.
(à suivre)
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