TRIPATOUILLAGES ET VASOUILLAGES : LES DEUX MAMELLES DE LA POLITIQUE EN FRANCE EN 2008
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On peut se réjouir du taux record d’insatisfaction obtenu par Nicolas Sarkozy après un an de mandat : 70% ! Comme d’habitude, le Nicolas n’y va pas avec le dos de la cuiller. Il faut reconnaître que lui et sa bande font tout ce qu’il faut pour : chaque semaine ou presque nous amène son lot d’incongruités : après le rapport Attali, présenté comme un programme-bis après celui du candidat, et défendu avec morgue par son auteur, mais plus ou moins escamoté par les députés, nous avons eu droit, si on peut dire, à un plan Banlieues vide, à une loi OGM prestement escamotée dans ses dispositions principales par les parlementaires UMP, désespérant l’élégante sous-ministre Nathalie Kosciusko-Morizet et dans l’indifférence (lâche, a-t-on dit) de son ministre Jean-Louis Borloo, qui ne fait plus rire personne, au cirage de pompes éhonté du Président auprès du Premier ministre britannique (il a déjà fait le coup à Bush, Kadhafi, Poutine et est en train de le faire avec Hu Jintao : Nicolas Sarkozy est devenu le leader incontesté des lèche-bottes internationaux), à une suppression du remboursement des lunettes, pourtant déjà ridiculement faible, par la sécu presque aussi vite retiré par Sarkozy qu’annoncé par Roselyne Bachelot (ah, ce Sarkozy en défenseur des mal voyants ! Soyons certains qu’il nous refera le coup : un ministre annonce une bêtise et le Président annule, jouant au chevalier blanc, mais les gens sont méchants car personne n’est dupe), à un plan d’ « économies » qu’il ne faut surtout pas confondre avec la rigueur, hein, nous en passons et des plus mauvaises. Retenons enfin la leçon de cha cha cha (deux pas en avant, deux pas en arrière) donnée, avec le gracieux concours de Rama Yade, par le Président concernant sa présence à Pékin pour l’ouverture des Jeux Olympiques : Ira ? Ira pas ?
Ce n’est certes pas le numéro d’acteur pour pièce de boulevard offert » aux téléspectateurs par le président le 24 Avril. Après nous l’avoir joué clinquant, il nous la joue modeste (relativement), mail il joue toujours, et rien ne change dans la musique : les étrangers (et d’autres dans le tas, pour peu qu’on ne présente pas le « bon profil » seront toujours raflés, les profs moins nombreux, les hôpitaux (tiens, il n’en a rien dit) peu à peu privatisés, le « paquet fiscal », quoique les français aient « sans doute raison » de pas accepter sera remis en cause. Quant aux mesures sociales annoncées, on frôle, soyons gentils, le foutage de gueule et on va le démontrer par deux exemples. Une incise, pas inutile, tout d’abord : voici quelques semaines, notre éminent confrère Le Canard Enchaîné, constatant la difficulté de nos imaginaires à appréhender les très fortes sommes d’argent (celles qu’on ne touchera jamais), proposait une nouvelle unité monétaire, le Bouton, un Bouton valant cinq milliards d’euros, soit la perte dite Kerviel subie par la Société Générale, qu’un M. Bouton préside. Nous encourageons vivement l’usage du Bouton. Fin de l’incise. Nicolas Sarkozy a promis la généralisation du RSA, permettant le cumul d’un minimum social et d’un revenu d’activité dans certaines limites. Cela coûtera, précise-t-il, entre 0,2 et 0,3 Boutons. Une misère à l’aune de la Société Générale, et au passage deux ou trois moins importante que le chiffrage demandé par le para-ministre Martin Hirsch. Il est dit de plus que le financement du RSA sera obtenu par un « redéploiement », quel joli mot, du dispositif du crédit d’impôt bénéficiant aux ménages modestes : comme l’indique avec à propos le député emmanuello-socialiste Alain Vidalies, « les plus modestes paieront pour les plus pauvres. Seconde mesure « sociale » phare, le cumul possible emploi-retraite ne concernera que peu de monde (plus de la moitié de nos concitoyens n’ont plus d’emploi après 55ans, et cette proportion s’accroît considérablement après 60 ans. Qui plus est, des possibilités de cumul existent déjà. Et on atteint l’ubuesque quand on relie cette annonce avec celle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite : si tous les fonctionnaires ayant droit à la retraite décident de rester en poste, on fait quoi ? Et le budget de l’Etat, déjà mal en point, il n’explose pas ? Se moque-t-il du monde ou est-il incompétent, l’un n’excluant pas l’autre ? Un sujet, pour finir, où l’incompétence présidentielle est manifeste, c’est celui de l’immigration, où son discours confond allègrement immigrants économiques, demandeurs d’asile et demandeurs de naturalisation, le tout assaisonné de chiffres fantaisistes.
Cet échec présidentiel (mais attention, rien n’est acquis, les sondages sont volages), ce devrait être du nanan pour la gauche. Nenni. Face aux multiples pitreries du gouvernement et à la continuation de la démolition, nettement moins amusante, des droits sociaux, des droits de la personne, des services publics (moins de profs, moins de juges, mais davantage de gardés à vue et de prisonniers même si pas plus de prisons, z’ont qu’à s’entasser, et se suicider tant qu’ils y sont, ça libère des places), les formations de gauche sont à la peine. Attention, car de la peine à la ramasse, le chemin peut être court, demandez aux joueurs du PSG.
La Parti Socialiste s’est fendu d’une déclaration de principe, cinquième du genre depuis 1905, qui doit encore être approuvée par les militants. Comme les grands chefs se sont mis d’accord, nul doute que les militants suivront. Pendant ce temps, les couteaux continuent de s’affûter dans l’ombre (ou presque) alors qu’une unité bonhomme comme un Hollande s’affiche en couverture. Nous avons bien entendu lu cet inoubliable chef d’œuvre, qui pourrait servir aussi pour le MoDem, à un ou deux mots près, et même à l’UMP, à une dizaine de mots près, si Nicolas Sarkozy se piquait à nouveau d’ouverture. Notons que le PS n’est maintenant plus, par principe, un parti révolutionnaire, mais le fut-il un jour ? Notons aussi que la lutte des classes, et même le concept de classes sociales a disparu des principes. « Mais la déclaration de principe n’est pas un programme », rétorque, du tac au toc, l’ineffable François Hollande. Nous apprenons donc que le PS préparerait un programme pour les classes sociales ? Il veut les réformer, sans doute ?
Du côté du Parti Communiste, des couteaux de pré-congrès s’affûtent aussi. Déjà, André Gérin a annoncé faire don de sa personne pour remettre le parti sur les rails du vrai communisme. Un retour à Lénine ? Et Jean-Claude Gayssot, le jovial ex-ministre des transports, fait de même, en appelant, lui, à un dépassement du parti en créant une nouvelle force à gauche. Il n’a pas tort, Gayssot, quand il dit que le PCF n’a pas tiré les leçons de sa lente érosion électorale. Et on peut craindre qu’un « recentrage orthodoxe » ait pour conséquence principale l’accélération de l’érosion. Ce qu’espère probablement la Ligue Communiste Révolutionnaire, toute affairée à la création du « nouveau parti anticapitaliste ». On parie qu’il n’y aura plus « révolutionnaire » dans le titre ? On parie que 80%, au moins, des effectifs seront issus de la LCR d’aujourd’hui ? Ne chipotons pas, il se dit partout que ce sera « le parti d’Olivier ». Sympa et talentueux, Olivier. Il vaut mieux qu’un fan-club.
Bref, il serait temps que la gauche, au moins celle de gauche, recommence à échanger et se mette à construire. Le seul lieu un peu large est la convergence « pour une autre Europe », où se retrouvent partis et clubs politiques (Collectifs unitaires, LCR, Mars-GR, PCF, PCOF, PRS…), des associations (ATTAC, Fondation Copernic, Forum citoyen, Gauche Cactus !, Ruptures…) et des syndicats (CGT-Finances, Solidaires, UNEF, et la FSU et UGFF-CGT en tant qu’observatrices). C’est mieux que rien, mais c’est encore trop peu.
Quelques mots sur les Jeux Olympiques, Pékin et le Tibet. Pour regretter tout d’abord la décision, après bien des hésitations, du Comité International Olympique de poursuivre la tournée de la « flamme » après les échauffourées de Londres et Paris : l’abandon de ce symbole aurait au moins montré les jeux pour ce qu’ils sont avant tout : une affaire de gros sous. Pour regretter aussi le manque total d’humour des manifestants, quand bien même il se passe des choses pas jolies jolies, et sans doute dramatiques au Tibet. Pour regretter encore, le stupide slogan choisi par les athlètes français pour orner un badge qui leur sera finalement refusé : « Pour un monde meilleur », quelle témérité. Florence Bray, notre estimée Présidente (du Cactus) en a imaginé un autre, qui nous plait bien, on en fera peut-être un badge ; « Toute médaille a son revers ». Et regretter enfin la décision de Bertrand Delanoë de faire citoyen d’honneur de Paris le dalaï lama. Après la place Jean-Paul II devant la cathédrale notre dame, encore un croche patte à la laïcité. A quand un boulevard Khomeiny ?
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