CHAHINE, AMIR RAMSES, L’EGYPTE, L’OUM ED’DONIA

Par Florence Bray
lundi 11 août 2008
par  Florence Bray
popularité : 84%

A peine trentenaire, Amir Ramses est une sorte de fils spirituel de la génération Chahine, comme lui chrétien athée, intellectuel, poète, cinéphile bercé par "Casablanca", sensible et délicat amoureux, jouisseur des plaisirs de la vie, trilingue par l’école des Frères, chrétiens s’entend, même si son français est "cassé", comme on dit là bas ; donc très sensible, et très isolé, traînant du "Café Suisse" à son appartement rempli d’absinthe et de DVD glanés comme des pépites à l’étranger, dans une Egypte où la bourgeoisie d’argent a depuis longtemps remplacé les intellectuels à la Cossery, et où le bilinguisme ne fait plus sonner que l’américain des universités flambantes.

Il fait des films pleins de douceur et d’élégance, qu’on aimerait bien voir en France, sur l’amour et l’altérité, lui aussi, non exempts de clichés romanesques parce qu’il est difficile tout de même, voire luxueux, ou déplacé, tout simplement, d’avoir de l’ironie et de la distance cynique sur la condition humaine quand on vit enfermé dans la violence de la censure contre la sensibilité, la sincérité, la spontanéité, l’humour, celle d’une société où chacun se sait surveillé par une couche de codes collectifs - famille, religion, Etat. Et il est encore permis d’être chaleureux, ailleurs qu’en Occident, et romantique...

Donc, il a fait des courts métrages* montrés au festival de l’IMA, à Locarno, Munich, Rotterdam, Sienne, Sousse, Valence etc, et deux longs métrages* montrés à Tanger et au Caire (un troisième est cours de finalisation). Il a travaillé comme premier assistant de Chahine, il fréquente l’autre star du cinéma d’auteur en Egypte, Yousri Nasrallah, et tourne des comédies parodiques aussi de temps à autre, parodies des grands feuilletons interminablement suaves dont l’Egypte à présent inonde les réseaux arabes, en sa qualité de deuxième et jadis première industrie du film au monde, après l’Inde maintenant, je crois, hélas seulement en volume à ce palmarès, qu’elle a longtemps tenu en qualité aussi, quand les films d’Hollywood étaient montrés en avant première au cinéma "Métro" d’Alexandrie à toute la société des anglais, arabes, arméniens, français, grecs, italiens, qu’on appelait les alexandrins, en un mot, dans les années 40. C’est par là que traînait le jeune Chahine, à qui l’on devra donc certaines des plus belles montées d’escalier de marbre en tap dance et robes à volants, virevoltant jusque dans les fresques historiques ou noires de ses films.

Voilà donc quelques mots sur l’ « oum ed’donia », l’Egypte « mère de la vie », comme dit l’adage, qui n’est plus qu’un vestige ou une chimère d’ancien régime au fur et à mesure des disparitions, Chahine et Cossery la même année, dur, (mais Dalida, à sa façon, aussi, c’était ça) sauf que ces grandes figures semblent avoir formé quelques disciples, qui ont la fibre bien sensible : inch’allah, pourvu que ça dure !

*Filmographie : 1998 : La chambre (court métrage), Green card (moyen métrage) 1999 : Pluie (court métrage) 2000 : Centre ville (court métrage), Seules (documentaire) 2004 : Chant des pigeons (documentaire) 2005 : Airlines (documentaire coréalisé) 2006 : Pas comme les autres (court métrage), Le bout du monde (long métrage) 2007 : Compte rendu (long métrage) En cours : Le code (long métrage). Assistant réalisateur de Youssef Chahine de 2001 à 2004 pour deux longs métrages (Silence on tourne et Alexandrie-New York) et le court métrage 11 09 01.


Commentaires

Brèves

22 septembre 2011 - Manifeste contre le dépouillement de l’école

A lire voire signer sur http://ecole.depouillee.free.fr Nous, collectif contre le (...)

20 avril 2010 - NON AUX RETOURS FORCES VERS L’AFGHANISTAN

A la suite du démantèlement du camp principal de Calais, le 22 septembre dernier, où résidaient (...)

31 juillet 2009 - PETITION POUR L’HOPITAL PUBLIC, A SIGNER ET FAIRE SIGNER

la pétition de défense de l’hôpital public, à faire signer au plus grand nombre possible (...)