CES CONGRES QUI S’AVANCENT, GRES QUI S’AVANCENT, GRES QUI S’AVANCENT…
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Le titre est bien sur un clin d’œil au morceau de bravoure de « La belle Hélène », œuvre allègre de Jacques Offenbach, Henri Meilhac et Ludovic Halévy. Les préparations de congrès des partis politiques (et les congrès eux-mêmes) ont parfois un fumet d’opéra-bouffe, en nettement moins rigolo que ceux d’Offenbach et de ses compères. Le millésime qui s’avance, pour les partis de gauche, ne manque pas à cette tradition. On peut le regretter ou s’en amuser, à défaut, manifestement d’une perspective de congrès à la fois souriant et enthousiasmant pour l’avenir. Il se trouvera certes des militants ravis d’avancées millimétriques ou de « sauvetage de l’essentiel » (ah, l’essentiel, la bouée du politique, revenir à l’essentiel, surtout sans trop le définir). Il y en a déjà, à la sortie d’universités d’été dont certaines ont valu leur pesant de cacahouètes.
A tout seigneur (électoral), tout honneur, commençons par le Parti socialiste. La Rochelle a été un grand moment du barnum politique qui enchante les medias à défaut de combler les électeurs. Qui y a dit quoi, en termes de perspectives pour le pays, l’Europe ou le monde ? Nul ne sait. Nous en savons par contre des tonnes, si on a la patience nécessaire pour suivre ces méandres, sur les tactiques et les supputations concernant la succession de François Hollande à la tête du parti. Faute de débat sur des orientations fermes, la bataille d’égos fait rage. La mécanique d’un congrès socialiste est bien connue. Elle commence par des « contributions », textes ou chacun, ou presque, énonce ses idées, s’il en a, et le cas échéant compte ses amis proches. Certains, coquetterie peut-être, se livrent à cet exercice en solitaire, d’autres le jouent collectif. Le but du jeu : trouver, sur le fond (s’il y en a) des accords avec d’autres contributions pour aboutir, phase deux, à des motions qui seront, elles, soumises au vote des militants et serviront à mesurer les rapports de forces internes. Un jeu apparemment simple, en réalité compliqué. Ce qui distingue, par exemple, sur le fond, les contributions de Bertrand Delanoé, Ségolène Royal, Martine Aubry, le couple Collomb-Guérini ou Pierre Moscovici, pour ne citer que les plus connus, est infinitésimal : des variations sur un thème commun, le « socialisme gestionnaire ». Les différences, toujours sur le fond, entre les contributions des courants de la « gauche » du parti (Benoît Hamon et Henri Emmanuelli, Jean-Luc Mélenchon, Marc Dolez ; le texte solitaire de Marylise Lebranchu n’en est pas si éloigné) sont plus tactiques qu’autre chose : Hamon et Emmanuelli recherchent un accord majoritaire avec certains « gestionnaires », Mélenchon et Dolez veulent un vote de congrès sur des options clairement (si possible) différentes. D’ici le 23 septembre, date fatidique pour le dépôt des motions, des alliances vont se nouer et se dénouer, la seule à ce jour qui paraisse à peu près solide étant celle du duo Mélenchon-Dolez. Les trahisons ne vont pas manquer, La Rochelle en ayant déjà fourni quelques échantillons, qui ne manquent pas de saveur. Entendre Moscovici (l’homme qui avait apporté au PS une contribution majeure, la barbe de trois jours, et qui l’a – dépit ?- retiré depuis) manifester sa « surprise » devant la « trahison » de Cambadélis, pourtant spécialiste de la chose, écouter Peillon vitupérer les manœuvres de Bartolone, porte-flingue attitré de Laurent Fabius et, justement, expert ès manœuvres nous arracheraient des larmes, de rire. Décidément, ces quadras virant quinquas, ont au moins de la constance dans la quête de leur seul objectif : les places. Pour quoi faire ? Ne leur en demandez pas trop.
Un mois après le PS, le Parti Communiste tiendra lui aussi congrès, avec une règle du jeu différente : une « base commune » est d’abord élaborée (réminiscence peut-être de l’antique centralisme démocratique, oxymoron sur les bords). Puis des textes peuvent l’interpréter, la compléter, l’amender. Des motions sans le dire. Trois options principales, avec de multiples nuances (le PCF ne reconnaît pas les « courants », mais en compte encore plus qu’au PS), se dégagent, dont deux sont à peu près claires. Les « orthodoxes » veulent siffler la fin de la récré et revenir au bon vieux PCF d’antan : c’est clair, parfois touchant, et totalement à côté de la plaque. D’autres, dont les « rénovateurs » souhaitent le « dépassement » du parti, en créant autre chose. C’est le cas, là aussi avec de multiples nuances et prudences des rénovateurs autour de Patrick Braouzec, de Jean-Claude Gayssot et de certains « non alignés ». Pour ceux-ci, un Die Linke à la française est une perspective prometteuse. C’est clair aussi, et, on vous le dit tout de go, ça nous botte assez. Marie-George Buffet et ses amis sont sur une ligne intermédiaire, prônant une « profonde transformation » du PCF. Qu’y a-t-il derrière cette formule ? Du flou, pour l’instant. Faudra préciser, camarades. Le contexte politique du déclin du PCF pèsera évidemment fortement sur le congrès, d’autant que la proximité des élections européennes pose la question du « sauvetage » des deux sièges que le parti a conservés, et qu’il aura bien du mal à conserver sans des alliances. Avec qui ? Question ouverte et très politico-politicienne.
Les Verts, eux, ont tendance à retrouver le sourire dans cette perspective électorale. Ils devraient avaliser sans trop de casse l’alliance inattendue Cohn-Bendit-Bové agréementée d’un zeste de Hulot. Cohérence politique de l’attelage ? Nulle hors un libertarisme mondain. Efficacité électorale ? Possible dans un contexte où le star-system est à la mode.
La saison des congrès se terminera avec la création du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), qui changera peut-être de nom. Tel qu’on le pressent, il se centrera sur les luttes sociales, ce qui est toujours ça, sur un solide anti-socialisme, toutes tendances confondues, sur une méfiance atavique envers le PCF, ce qui conduit, de fait, à renoncer à toute perspective de contribution à un éventuel gouvernement de gauche. Autre défi : comment devenir autre chose que le fan-club du doué Olivier Besancenot ? L’arrivée éventuelle de Clémentine Autain ne résoudra pas cette difficulté.
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