TRANSFORMER L’ESSAI
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La fantastique mobilisation sociale dont nous avons été témoins-acteurs, porte en elle les graines du futur, à la condition impérieuse d’une issue politique. Le grand paradoxe des mobilisations actuelles, éclatées et convergentes réside dans la puissance de la colère, de la révolte, de la volonté de ne plus subir, d’organiser les résistances, de réussir à unifier les revendications, et dans le même temps d’une absence de condamnation radicale du capitalisme, comme système à éradiquer, à transformer. Dans les colonnes de l’Humanité, José Tovar a très bien décrit les impasses d’un mouvement social dépolitisé. On a le sentiment que pour certaines organisations syndicales, ne plus être la courroie de transmission d’un parti, occulte, refoule, tout avis sur la transformation sociale et la prise de pouvoir. Ce déni, ce désaveu, envoie le mouvement social dans le mur.
Lutter contre le Président Sarkozy, le pouvoir actuel, le capitalisme en général, dans mots creux, vaguement dénonciateurs, culpabilisant les dirigeants, ne mange pas pain, n’en donnera pas sur le long terme, à ceux qui au fond du trou, bougent, espèrent. Je n’ai pas de mépris pour les revendications qui font reculer le gouvernement, le patronat, les instances européennes ; ce sont des points d’appui pour éviter la casse généralisée. Ces actions, ces luttes, ces guerres sociales devraient, doivent déboucher sur une conscience politique de très haut niveau. Revendiquer la généralisation des biens communs d’humanité, la monnaie universelle, la nationalisation démocratique des secteurs-clés de l’économie, une articulation inédite entre planification souple et marchés régulés, la liberté de circulation des hommes…
Force est de constater que la pensée politique a un temps de retard dans la conscience dite populaire, ce temps bloque l’histoire depuis trente ans. Après la manif du Premier Mai à Marseille, unitaire certes, massive, mais atone, j’ai pensé qu’il nous fallait manifester dans la rue de Solférino. La question n’étant pas – seulement- de faire reculer le pouvoir mais de le prendre. Cette assertion cruelle est cruciale. La prise du pouvoir, la volonté de puissance, la transformation de tous les rapports sociaux demeurent extrêmement minoritaire dans le peuple dit de gauche. Je ne conteste en rien les efforts considérables réalisés par nos camarades dans les instances de décisions ou de législation, au jour le jour dans les boîtes, à gérer les luttes et à construire des contre-propositions. Il s’agit ici de points d’appuis.
Le réel, le réel du pouvoir en appelle à une conscience sociale et politique beaucoup plus développée, une radicalité de transformations que les Sud-Américains nomment : « Socialisme du XXIième siècle ». Ce socialisme n’a pas peur de la démocratie, de la lutte, du pouvoir qui affronte le capital, et soumet l’économique-financier au politique. Transformer l’essai, c’est offrir et proposer de construire une alternative qui révolutionne les rapports sociaux et les finalités de l’être tous ensemble. Ici chaque-un est concerné, interpellé, dans sa capacité de résistance et d’innovation. Le pouvoir joue l’usure, nous devons inventer une culture. Elle nous projette dans le temps de l’utopie, et dans l’espace de l’internationalisme. Le plus grave n’est pas ‘Sarko’, mais la dépolitisation des mouvements sociaux.
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