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Contribution pour le prochain Congrès de ce qui ne sera plus le Pôle Républicain.
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Contribution pour le prochain Congrès de ce qui ne sera plus le Pôle Républicain.


Nous allons tenir congrès, en décembre probablement. Avant serait trop tôt, après sans doute trop tard. Malgré nos déconvenues électorales, les enjeux de cette rencontre sont loin d’être négligeables. Nous savons que les idées et les propositions défendues par Jean-Pierre Chevènement pendant la campagne présidentielle ont rencontré dans le pays un écho bien plus important que les suffrages qui se sont portés sur lui puis sur nos candidats aux élections législatives. Elan il y eut, stoppé en chemin, et que nous devons essayer, de toute notre énergie, de relancer.
Il nous faudra cependant raison garder : la politique est un rapport de forces et, aujourd’hui, il ne nous est pas favorable. Cela nous évitera peut-être d’indécents cocoricos, et nous oblige en tout cas à tenter de répondre à quelques questions, certaines préalables à la relance que nous appelons de nos vœux, de façon à la préparer sur des fondations solides, d’autres destinées à nourrir le combat politique : des armes et des munitions.
Il serait aussi inconséquent de ne pas réfléchir sur les causes de nos déconvenues. Non pas pour goûter les délices amers de la nostalgie, mais pour éviter certaines erreurs à l’avenir, et surtout cerner nos insuffisances, tant en armes qu’en munitions.
C’est pourquoi notre contribution s’articulera en quatre points : l’analyse de notre action des derniers mois, le problème de notre positionnement politique, qui en découle directement, les principes d’organisation de notre parti, et les axes de nos réflexions et de nos propositions.
Quelques mots en préalable pour nous expliquer sur le titre de notre contribution : Jean-Pierre Chevènement l’a dit, de façon un tantinet désabusée, « un pôle qui n’aimante pas… » est une incongruité sémantique. Nous devrons donc trouver un nom à notre parti. Un nom attachant, si possible, dynamique, souriant avec sérieux et exprimant ce que nous déciderons d’être. Certes pas le Parti Tropical, bien sûr, qu’on se rassure, mais quelque chose de chaleureux et d’attirant, le contraire d’un pôle. Nous avons quelques mois pour trouver des idées. Ce n’est pas le fond du débat, mais cela en sera, d’une certaine façon, une traduction.



1. Transformer l’échec en levier


Le score décevant, quoique honorable, de Jean-Pierre Chevènement, le deuxième de la gauche ( si on peut dire, mais on y reviendra ), devant les Verts, le Parti Communiste, le score consternant, mais hélas largement attendu, des élections législatives nous ont fait mal. Notre poids politique en est durablement affecté. Le défunt MDC pesait peu au niveau électoral, l’actuel Pôle Républicain moins encore. Cet échec doit être analysé.

Soyons sévères envers nous-mêmes…

Les premiers commentaires ont fait la part belle, parfois exclusive, aux médias, qui ont ignoré notre candidat après l’entrée en lice des deux favoris auto-proclamés. C’est vrai, mais ce n’est pas suffisant. Après tout, à partir de février, les médias n’ont pas plus fait écho à François Bayrou, qui nous a devancé et guère plus à Jean-Marie Le Pen. Ne tombons pas dans le travers des socialistes, qui expliquèrent l’échec de Lionel Jospin par les autres candidatures « de gauche », et tout particulièrement celle de Jean-Pierre Chevènement. Nous avons nos responsabilités dans l’échec, et il convient de les regarder en face.
Notre positionnement d’abord, dont il faudra bien que nous tirions les conséquences : au dessus de la droite et de la gauche, dépassant ces clivages obsolètes. Il convenait à une situation de crise très grave. De Gaulle, depuis Londres, pouvait se le permettre. Mais si nous sommes effectivement en crise, même si cette crise est profonde, elle n’est pas ressentie par l’électorat comme suffisante pour en appeler aux seules valeurs sacrées de la République. Nous sommes certes en guerre économique, mais ni militaire ni civile. Dans ces circonstances, il est périlleux d’être « au-dessus », « en dessous », « ailleurs », « autrement » ou « à côté ».
Et allez donc expliquer aux électeurs que nous étions « au-dessus » de la droite et de la gauche quant les propositions de Jean-Pierre Chevènement constituaient le socle de gauche le plus conséquent de tous les candidats présents. Fallait-il tant faire plaisir aux humeurs changeantes de tel ou tel évadé – provisoire ? – de la maison Pasqua ? Fallait-il, fût-ce avec une longue cuiller, dîner avec Philippe de Villiers, l’un des plus fieffés réactionnaires de ce pays ? Nous avons constaté les ravages de ces fréquentations dans les rangs de celles et ceux que nous commencions d’intéresser.
Une campagne électorale doit avant tout promouvoir des idées. Notre « campagne d’hiver » promut surtout des critiques envers nos principaux concurrents. Combien d’heures passèrent nos principaux animateurs nationaux à démolir Jacques Chirac ou Lionel Jospin, un exercice pourtant relativement simple, comparées aux quarts d’heures de développement de nos propositions !
Autre choix désastreux : la désignation de nos candidats aux législatives, revêtue dans bien des cas d’un épais mystère, résultat de tractations calamiteuses entre apparatchiks plus ou moins blanchis sous bien des harnais : tant de conspirations pour si peu de résultats. Sans compter que, malgré les alarmes sonnant de partout, l’obstination à attendre le dernier moment pour « mettre en place » nos candidats (mettre en place dans le vide, quelle performance !) nous a privés, y compris lors de la campagne présidentielle, de relais locaux reconnus comme tels par ces fameux médias dont on médit tant.
Nous ne faisons pas de la critique pour la critique, ne nous soucions pas de remuer fers ou couteaux dans plaies mal refermées : ces erreurs sont instructives et doivent nous servir à l’avenir, non seulement pour éviter de les reproduire, mais pour inventer d’autres façons de faire et d’être.


…mais justes tout aussi bien.

Car la longue période électorale de ces derniers mois a aussi et, espérons-le, surtout amené des satisfactions : l’écho de nos propositions, d’abord, qui montre, même s’il ne s’est pas traduit dans les suffrages, que nous sommes en phase avec une partie de la population, la solidité des orientations de Vincennes, même s’il nous faut les ajuster et les actualiser au fil des évènements, et l’arrivée de nouveaux militants qui se sont investis fortement dans les actions concrètes et dans les réflexions. Ils sont notre acquis le plus précieux, d’où qu’ils viennent.
Celles et ceux qui, à un moment ou à un autre, ont partagé nos idées ou simplement y ont été sensibles à, il nous faudra les retrouver, aller à leur rencontre. Ce sera la poursuite de l’effort militant entrepris pendant la campagne : quartiers difficiles, associations, organisations syndicales et socioprofessionnelles doivent être nos cibles privilégiées sur le terrain.
Les orientations de Vincennes n’ont rien perdu de leur pertinence. Au contraire, au vu de la politique mise en place par le nouveau gouvernement, elles constituent la seule alternative crédible. Il convient, avons-nous dit, de les ajuster et de les actualiser. Nous proposerons quelles pistes dans la quatrième partie de cette contribution.
Nos nouveaux militants ne sont pas, pour la plupart, issus d’autres organisations politiques. Beaucoup se sont investis avec enthousiasme dans la campagne électorale. Faire en sorte qu’ils continuent le chemin avec le futur parti est une condition majeure de réussite. Cela suppose que nous soyons capables de bâtir ensemble une maison accueillante, chaleureuse, active et cela en dépit de moyens limités. Cela suppose que nous soyons capables d’organiser un véritable pluralisme des opinions autour d’un socle commun, fourni en gros par les orientations de Vincennes. Quelles qu’aient été ses vertus, et il en eut, nous ne pouvons pas nous contenter de proposer un Mouvement des Citoyens bis.
Il nous faut une démocratie interne exemplaire, évitant à la fois l’incurie du fonctionnement des Verts, les batailles d’écuries du Parti Socialiste, le militarisme des organisations d’extrême-gauche : ce n’est pas si simple et nous ferons plus loin quelques propositions.


2. Se situer clairement à gauche sur l’échiquier politique


Voilà qui pourrait, peut-être, fâcher certains de nos amis, en faire tiquer d’autres. Expliquons-nous. Comme Réchauffer la Banquise l’a déjà écrit, deux clivages dominants nous paraissent partagent l’échiquier politique. Ne pas en tenir compte serait inconséquent, aussi convient-il d’insister sur ce point.


Progressisme ou conservatisme


Le premier est présent, sous des formes diverses, depuis qu’existe notre République. Il oppose les tenants du progrès social à ceux du conservatisme, ce qu’on appelle généralement la gauche et la droite. Ce clivage demeure, on vient de le constater, électoralement vivant. Et il demeure pertinent, sauf à estimer qu’il n’y a plus d’intérêts de classes antagonistes, d’oppressions diverses, d’inégalités criantes et, qui plus est, croissantes. Ce qui est vrai en France l’est d’autant plus à l’échelle de la planète, et c’est bien un combat à mener au niveau mondial que celui du progrès social.
Certains objectent, avec raison, que cette gauche là a été trahie, bafouée, par les partis institutionnels censés la représenter alors qu’ils exerçaient le pouvoir. Querelle au moins aussi vieille que Bad Godesberg. Procès fait en son temps, à juste titre sans doute, à l’antique S.FO. . Mais est-ce une raison pour jeter, comme on dit, le bébé de la gauche avec l’eau du bain du Parti Socialiste. On ne saurait assimiler la gauche au seul PS, même élargi à ses alliés Verts. Ce n’est même pas vrai au niveau électoral, comme l’a montré, une fois de plus, l’élection présidentielle. Et on sait bien que si le Parti Socialiste limite les dégâts ou l’emporte, selon les cas, lors d’élections législatives, c’est en grande partie dû à notre système électoral et à l’émiettement des autres composantes de la gauche.
Ce n’est donc pas parce que le Parti Socialiste n’est plus socialiste que la gauche n’est plus la gauche : ne nous trompons pas d’analyse, et par conséquent de combat. Il nous reviendra de montrer que la fidélité à la gauche, c’est nous, et non pas le PS. Cela supposera bien des efforts, bien des explications et beaucoup de conviction, mais nous n’en manquons pas.

Intérêt général ou loi du marché

Ce qui nous sépare des socialistes n’est pas la question du progrès social. Hors les camarillas que les seuls ors de la république motivent, l’immense majorité des militants et des électeurs socialistes le souhaite. Ce qui nous sépare, c’est la deuxième ligne de clivage, bien présente depuis le référendum sur le traité de Maastricht, à savoir l’attitude par rapport au libéralisme.
Ce clivage là n’est pas seulement économique, il est avant tout politique, et il est intimement lié à notre conception de la nation. Notre futur parti doit se situer sans ambiguïté dans le camp anti-libéral. Cela veut dire que nous refusons que le seul marché dicte les choix politiques, arbitre les politiques sociales. Ce refus a des conséquences évidentes quant à notre conception du rôle de l’Etat, qui ne saurait se réduire, suivant le credo libéral, à l’exercice de pouvoirs régaliens (police, justice, armée) qui ne sont en fait, on commence à le voir avec le nouveau gouvernement, que des instruments de maintien de l’ordre au profit des intérêts financiers lorsqu’ils sont aux mains des libéraux. L’Etat selon nous est au service de tous et doit assurer l’accès du plus grand nombre aux biens et services nécessaires. Ceux-ci doivent échapper au marché. Ce ne sont pas seulement les traditionnels services publics (éducation, santé, communications, transports… ), eux-mêmes menacés par la mondialisation libérale, mais aussi les secteurs indispensables à la vie quotidienne (eau, énergie) et/ou à l’indépendance nationale, ce qui concerne aussi bien certaines technologies que certains produits alimentaires.
On entend d’ici le hourvari que pourra provoquer une telle conception non seulement à droite, mais chez les « socialistes raisonnables », ceux qui s’apprêtaient à privatiser EDF-GDF, Air France, Antenne 2 après tant d’autres : « vous n’y pensez pas, c’est le Gosplan que vous ressuscitez, la bureaucratie tatillonne triomphante » et tout ce genre de discours. Comme si le secteur privé était seul capable de gérer efficacement ! Comme si le marché était le seul juge du bien et du mal, le meilleur guide pour l’avenir, l’alpha et l’oméga de la justice sociale ! Il est vrai que les socialistes ont pu écrire qu’il était indépassable, renoncement des renoncements.
Rappelons simplement qu’un service public n’est pas forcément assuré par l’Etat ou une collectivité territoriale, qu’il peut être géré autrement que par des « ronds de cuir ». D’autres systèmes existent : gestion paritaire (sécurité sociale), délégation, concession par exemple. L’essentiel est de soustraire ce qui doit l’être au marché et au profit, et de le contrôler au nom de l’intérêt général. Car le libéralisme est fondé sur des présupposés qui n’ont rien de républicain, ni même de démocratique : il privilégie l’individuel par rapport au collectif, l’immédiat par rapport à l’avenir, l’intérêt par rapport à la fraternité, il nie l’histoire et l’altérité : voilà de belles raisons d’être anti-libéraux.
Notre conception de l’Etat, et plus généralement des collectivités publiques, du service public, de l’intérêt général nous conduit évidemment à nous opposer à la mondialisation financière. Nous sommes internationalistes, pas mondialistes. Pour qu’il y ait internationalisme, il faut qu’il y ait nation. C’est ce qui explique que nous nous opposons à la construction européenne telle qu’on essaie de nous la vendre, au propre comme au figuré. Nous reviendrons sur ce point mais résumons-le ici : ce n’est pas de l’Europe dont nous ne voulons pas, mais de cette triste succursale de la mondialisation américaine qui se concocte à Bruxelles avec l’aval actif des partis libéraux.

Les conséquences des grands clivages

Un clivage progressistes/conservateurs, un clivage libéraux/anti-libéraux : ces deux axes divisent donc l’espace politique en quatre parts. Bien sûr, les frontières en sont indécises, poreuses, mais ces incertitudes ne remettent pas en cause le schéma.
Une première part est celle des conservateurs libéraux. C’est celle de la droite classique, aujourd’hui occupée par la nouvelle UMP, qui n’a concédé qu’un chiche territoire aux restes de l’UDF. Nous n’avons rien en commun avec ce camp là, hors, ce qui doit aller de soi en République, l’attachement au processus démocratique.
Une seconde partie, celle des conservateurs anti-libéraux, est aujourd’hui largement occupée par l’extrême droite. La mouvance dite souverainiste s’y retrouve aussi, avec laquelle nous partageons certaines analyses concernant la mondialisation. C’est sans doute à cette mouvance que s’adressa Jean-Pierre Chevènement, à la recherche des « républicains des deux rives ». Mais l’anti-libéralisme des souverainistes s’arrête à nos frontières : anti-libéraux au dehors, libéraux chez soi. Le ralliement provisoire de quelques personnalités de cette mouvance n’a pas eu d’effet positif. Certains militants sont restés, qu’ils demeurent bienvenus afin d’approfondir ensemble convergences et divergences.
La troisième partie est celle des progressistes libéraux, dominée par l’attelage PS-Verts. Tout comme celui des conservateurs libéraux, il s’agit d’un camp où les convictions sont mouvantes, au gré des intérêts électoraux immédiats. Nous n’avons pas à chercher d’accords politiques, hors des actions locales, avec ceux-là. Nous ne devons toutefois pas oublier qu’au delà des appareils, il y a des militants, des sympathisants, des électeurs qui peuvent nous rejoindre. Nous ne devons pas oublier non plus que le Parti Socialiste, comme d’habitude, est prêt à revêtir une armure de chevalier blanc et à clamer haut et fort les valeurs de la gauche, quitte, comme d’habitude, à les oublier dès un retour dans les palais.
Enfin, la quatrième partie, celle des progressistes anti-libéraux devrait être la nôtre. C’est la plus émiettée. On y trouve des partis d’extrême gauche, eux-mêmes traversés d’antiques antagonismes, des mouvances associatives (telle ATTAC) ou alternatives, nombre de sympathisants ou militants communistes, socialistes, radicaux, gaullistes authentiques, et nous. Au niveau politique, notre action prioritaire doit être de contribuer, avec ténacité et humilité, à construire un parti attractif et responsable clairement ancré dans cette mouvance. Nous ne la rassemblerons pas entièrement, car les particularismes sont forts, certains antagonismes vivaces, mais c’est notre terreau de prédilection. Nous sommes les mieux armés pour tenter de cimenter ce camp-là, une tâche difficile, mais il n’y a pas d’autre choix si nous voulons exister sans être les vassaux, donc les obligés, d’une autre formation politique.


3. Bâtir un parti exemplaire


Parce que nous nous référons aux idéaux républicains, notre fonctionnement devra les refléter. Nous proposons de fonder notre fonctionnement sur deux principes : la circulation transparente de l’information et la démocratie à tous les niveaux de notre organisation. Cela paraît couler de source, mais nous savons d’expérience qu’il y a loin de l’idéal à la réalité.

Faire circuler largement l’information dans les deux sens

La circulation de l’information pose évidemment des problèmes économiques, et nous savons que nos moyens sont limités. Il nous faudra donc imaginer nos outils d’information à la mesure de ces moyens. L’utilisation des courriers électroniques permet de limiter sensiblement les coûts des courriers postaux ou des frais téléphoniques. Ils ne les annulent pas, car nombre de nos adhérents ne disposent pas de liaisons internet. Cette contrainte économique ne doit toutefois pas servir de prétexte à une information insuffisante. Le parti devra se munir d’un site. Ce site pourra être consulté par chacun ( les « cyber-lieux » sont maintenant présents sur tout le territoire ). Il devra informer les adhérents des débats et des décisions et positions prises par les instances, des initiatives de nos parlementaires ( il nous reste des sénateurs et des députés européens ) ; des travaux de nos commissions, des motions remontant des comités départementaux ou locaux.
Cette nécessité d’une information circulant dans les deux sens, de haut en bas et de bas en haut est tout particulièrement importante dans une période telle que celle qui commence, la préparation d’un congrès. Il est souhaitable que de nombreux textes émanent de nos comités et soient diffusés largement, afin que le débat soit le plus riche possible. Bref, organisons nos circuits d’information en fonction de nos moyens, certes, mais sans que ceux-ci puissent être invoqués pour restreindre ceux-là selon les opportunités. Un budget doit être défini, et son exécution contrôlée.
Cet effort de transparence doit se retrouver aux niveaux départemental et local. Celles et ceux d’entre nous qui ont connu d’autres organisations politiques ont certainement le souvenir de ces présidents ou secrétaires locaux qui gardaient tels des trésors l’information nationale ou la liste de leurs adhérents. Concernant ce dernier point, il nous apparaîtrait logique que les listes des adhérents d’un comité local soit accessible à tout membre de ce comité, que les listes départementales soient accessibles à tout membre de la direction départementale, et de même au niveau national. De même, nos futurs dirigeants doivent pouvoir être accessibles, dans la limite de leurs contraintes professionnelles.

Responsabiliser les militants

Nos adhérents sont des citoyens responsables. Ne faut-il pas un courage certain, une grande lucidité, bien de l’enthousiasme pour continuer notre combat politique après les déceptions que nous venons de vivre ? Il convient dans ces conditions que cette responsabilité puisse s’exercer pleinement.
D’abord en participant pleinement aux débats, à l’élaboration de textes, au vote de ces textes pour en vérifier la pertinence et la représentativité. Ensuite en participant à la désignation des candidats aux fonctions internes ou aux élections de tous niveaux. Tout adhérent doit pouvoir, s’il le souhaite, être candidat à une fonction. Et tout adhérent doit pouvoir participer à l’élection des candidats.
Nos statuts devront préciser les modalités pratiques de ce principe, mais celui-ci doit être maintenu, en évitant les travers habituels des organisations politiques : le « tir aux pigeons », qui consiste à éliminer une personne « gênante » en concentrant des votes contre elle, et les listes concoctées dans les antichambres, soumises sans débats aux assemblées générales. Concernant les élections « externes », il revient aussi aux comités locaux concernés de désigner leurs candidats, dans le respect bien entendu de consignes générales (notamment le respect de la parité). Les pratiques dites de « parachutage » ne doivent plus être de mise, sauf à être acceptées par les militants locaux.
Le rôle important dévolu à nos instances et équipes locales doit avoir des contreparties : nos comités locaux et départementaux devraient s’engager, non pas sur des résultats électoraux, ou des objectifs de nombres d’adhérents, mais sur des actions concrètes à partir de leur terrain, sur la formation des nouveaux adhérents, et des anciens qui le souhaitent. La formation doit être un droit, pour nos militants comme pour les citoyens, une formation ouverte sur l’extérieur et sur la réflexion. Nous devons être une source de culture politique.


4. Quelques axes de réflexion

Comme nous l’avons indiqué, les orientations de Vincennes demeurent un socle pertinent pour le contenu de nos propositions. Il convient toutefois de les réinterpréter dans un contexte qui n’est plus celui d’une campagne présidentielle, et de les organiser, hiérarchiser peut-être, en fonction de nos campagnes à venir. Le positionnement proposé plus haut, qui n’est plus similaire à celui de Vincennes, doit aussi conduire à des inflexions.
Nous ne proposerons pas ici un travail programmatique, mais quelques axes qui nous paraissent majeurs, qui n’ont aucune prétention à l’exhaustivité et qui demandent, jusqu’au congrès, à être affinés, complétés, amendés.

La mondialisation est le phénomène majeur qui met en jeu notre avenir…

Jean-Pierre Chevènement l’avait développé dans ses orientations, n’hésitant pas, par exemple, à proposer la suppression du Fonds Monétaire International, l’un des agents importants de la main-mise libérale sur l’économie mondiale : la nature de la mondialisation fait courir de grands risques à notre planète : déséquilibres géopolitiques et sociaux croissants, hégémonie économique, technique, militaire, culturelle des Etats-Unis, graves dérèglements environnementaux.
Nous insisterons au passage sur les enjeux culturels et environnementaux. Nous défendons l’exception culturelle, celle qui doit valoir pour toutes les nations, et pas seulement la nôtre. Comme on le sait, le vecteur le plus précieux de la culture, la langue, est menacée, de plus en plus, par les offensives bruxelloises. Il nous faudra réagir. Les bouleversements climatiques que nous vivons sensibilisent de plus en plus les populations sur les enjeux mondiaux de l’environnement : la France doit à la fois être un agent actif à ce niveau, et être exemplaire sur son sol
Cette mondialisation s’effectue sous les couleurs du libéralisme sans autre frein que les intérêts américains. On a pu écrire, par exemple, que l’Organisation Mondiale du Commerce, autre officine ultra-libérale, n’est que le masque, peu crédible au demeurant, d’un jeu (le commerce international) où l’un des joueurs ( les Etats-Unis) est aussi l’arbitre et, qui plus est, peut changer les règles au cours de la partie.
Nous le savons aussi, les échanges internationaux concernent davantage, bien davantage, les capitaux que les marchandises. La « valeur économique » chère aux experts financiers est de plus en plus déconnectée de la production réelle au profit de mouvements spéculatifs. Il conviendra d’analyser sérieusement ces mécanismes financiers, dont la glose publique est accaparée par un nombre réduit de prétendus experts dans les médias, tandis que la classe politique avoue par son silence son impuissance consentie.
Etre anti-libéral, c’est refuser cette mondialisation là. Etre anti-libéral conséquent, c’est proposer des alternatives, qui ne seront pas d’illusoires replâtrages du FMI ou de l’OMC, ou des règles boursières plus « transparentes », mais une reprise du pouvoir du politique sur l’économique dans le seul cadre qui vaille, celui des Etats-Nations. Le libre échange généralisé n’est pas un but en soi, le commerce n’est pas, contrairement à ce que serine continûment Pascal Lamy, un facteur de paix : combien de guerres qui ne furent qu’économiques ? croit-on vraiment que G.W. Bush veut la peau de Saddam Hussein par pur amour de la démocratie ou même pour des raisons de sécurité ?
Défendre l’internationalisme contre le mondialisme, ce n’est pas se confondre avec l’anti-mondialisation «bourgeois-bohème » ou libertaire : c’est pourquoi il nous faudra débattre avec ATTAC, et aussi avec les écologistes qui le voudront bien.

…et justifie notre attitude vis à vis de l’Europe.

Nous ne sommes pas parvenus, tant elle arrangeait d’intérêts, à nous débarrasser de notre image très anti-européenne, dont on sait bien qu’elle est une caricature. Nous avons maintenant le temps d’enrichir nos propositions. Nous savons bien qu’il ne suffit pas de dénoncer l’Europe de Maastricht et d’Amsterdam, construction libérale, dont les eurobéats veulent faire croire qu’en sortira un contrepoids aux Etats-Unis, alors que Bruxelles n’en est qu’un vassal.
Le débat sur la constitution européenne sera un moment privilégié pour proposer un projet européen alternatif, une Europe capable de développer des projets, des services publics européens, une recherche européenne. La France doit, selon nous, se montrer ferme et offensive ; pas question de céder davantage de souveraineté, et volonté d’en reconquérir. Mais, par une stratégie de donnant/donnant, des offres de projets communs, avec des propositions de coopérations techniques, culturelles, scientifiques. L’Europe mobilisera notre réflexion dans les mois à venir, mais il faudra prendre soin de replacer cette réflexion dans un contexte beaucoup plus vaste, intégrant les rapports nord-sud et la mondialisation financière, dont l’Europe de Bruxelles n’est finalement qu’un avatar local.
La France a une histoire au niveau international, et peut mobiliser, quoiqu’en disent les timorés, bien des moyens et des talents pour jouer un rôle significatif.

Retrouver ce que proximité veut dire

Loin des raffarinades, retrouver les préoccupations réelles de nos compatriotes, c’est avant tout offrir à chacun des chances égales, une activité professionnelle et des conditions de vie décentes. Ici encore, c’est bien la capacité de l’action politique de s’extraire des mécanismes de marché là où c’est nécessaire qui peut redonner sens à une véritable proximité. Faute de quoi on se condamne, comme l’on souvent montré les gouvernements dits socialistes, à une politique de « régulation », par laquelle on s’efforce, sans jamais vraiment y parvenir, de « corriger » les séquelles du libéralisme. Dans ce domaine aussi, les analyses de Jean-Pierre Chevènement nous fournissent des éléments précieux. Mieux préciser les domaines du service public, diversifier nos propositions vers la jeunesse, mais aussi vers celles et ceux en fin de carrière professionnelle, qui peinent à conserver ou retrouver un emploi, réduire les écarts de rémunérations, équilibrer, en matière de sécurité, les propositions de sanction et de prévention figurent toutefois parmi les points où nous avons à progresser.
Mais encore une fois, cette contribution se place dans le champ des orientations, et non dans celui d’un programme.
Voilà donc ce que nous proposons, dans cette première phase de préparation de notre congrès : une analyse de notre passé proche, un positionnement que nous espérons clair, des propositions pour dynamiser notre fonctionnement et nos propositions.
Il ne s’agit pas pour nous d’en rester à Vincennes, ou de faire un simple retour aux valeurs de la république, mais bien de s’appuyer et sur ces valeurs et sur les acquis de la campagne de Jean-Pierre Chevènement pour franchir une nouvelle étape.


Par F. Bray, J. Decaux, J.C. Frachet, J.L. Gonneau, S. Gille, P. Henry, C. Huin, D. Lacout, J. Le Lagadec, G. Michel,
R. Robertelli, P. Taglang, C. Thisse