2004 commence mal, écrivions-nous le mois dernier. Et ça se poursuit pire, peut-on écrire maintenant. Le rapport « de Virville » sur le travail est sorti, et c’est un assemblage de provocations vis à vis des salariés, une version manifestement lue et approuvée par le Medef, dont on dirait même qu’il en a tenu la plume. Qu’un supposé « grand commis de l’Etat » ose écrire des choses pareilles en dit long sur le délitement moral d’une partie de notre haute administration. Ce rapport prévoit, de fait, la fin des contrats à durée indéterminée, prône l’ « assouplissement » du code du travail, plus précisément sur des éléments tels que la « souplesse » du licenciement, la « souplesse » des accords d’entreprise, préférés aux trop « rigides » conventions collectives de branche,la « souplesse » de l’inspection du travail (mais sera-t-elle même encore utile après le code Fillon-Seillère-de Virville ?) la « souplesse » attendue du salarié vis-à-vis de son employeur. Avec de Virville, ce n’est pas demain la veille que se multiplieront les procès pour harcèlement (sauf les « harcèlements » syndicaux). Par contre, les harcèlements patronaux pourront croître et embellir. Le baron Seillère, le ci-devant de Virville et le laquais Fillon : la France d’en bas se dessine. Voilà pour le travail, qui sera rare et pas cher, belle performance du libéralisme triomphant.
La justice maintenant. La juge Pierce et ses deux assesseurs de Nanterre ont pris une belle option pour leur prime de mérite, mise en place, on le sait par le ministre Perbern et sa gomina. Première erreur, la juge Pierce, le juge Prache et la juge Schiller ne sont pas gominés. Faute de goût. Deuxième erreur, presque aussi grave, mais consubstantielle de la première, ils ont rendu une décision « surprenante », « disproportionnée », qu’un autre jugement ne manquera pas de corriger. De qui ces propos ? Du premier Ministre lui-même et des acolytes. La juge Ract-Madoux, à qui doit revenir, sauf déplacement promotionnel opportun d’ici là, le,jugement éventuel d’Alain Juppé en appel, aura bien besoin de l’autorité, de l’intégrité et de l’impartialité qui lui sont généralement prêtés pour résister aux pressions de gens qui viennent de montrer, une fois encore, qu’ils ne s’embarrassaient pas de principes aussi démodés. Commence à planquer ton ordi, Madame Ract-Madoux, fais gaffe aux écoutes, ne laisse plus rien dans ton bureau.
Dans ce numéro, de nouvelles humeurs de l’infatigable Jean-Michel Hureau. La Ligne parle de l’Europe. Eric Halphen, de retour du Vénézuéla, nous donne son point de vue sur la situation dans ce pays. Deux articles, dont celui de Michel Portal, sur la laïcité. Sylvain Ethiré étrille notre président sur les droits de l’homme. Enfin, nous relayons la pétition de soutien aux femmes intermittentes du spectacle, encore plus spoliées que leurs collègues masculins. Bref, un numéro antidroite comme on les aime.
Bonnes lectures