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Collectif Boycott Made in USA


 
LA LIGNE : QU’EST-CE QUE LA GAUCHE AUJOURD’HUI ? (SUITE)
CONTRE L’ANTILIBERALISME EN PEAU DE LAPIN
Par J.L Gonneau
En France et dans le monde, la liste des organisations qui se proclament antilibérales est impressionnante. Même si d’aucunes sont groupusculaires, cela doit tout de même représenter un paquet de monde. Rien qu’en France, une grosse dizaine d’organisations politiques de gauche, une kyrielle d’associations, des syndicats (pas tous), dénoncent, à des degrés divers, le libéralisme. C’est d’ailleurs sur cette ligne antilibérale que se produisit la première alternance de la Ve République en 1981. Ce ne fut plus le cas lors de la seconde (1988), ni de la troisième (1995).
C’est que, comme nous l’avons déjà noté jadis, l’antilibéralisme de certains n’est que de peau de lapin. La gauche française n’a pas fait convenablement son deuil de l’emprise qu’exerça longtemps le Parti Communiste sur elle, sorte de gardien du temple d’une orthodoxie marxisante, dont on dénonçait certes le rigorisme et le monolithisme, mais dont on ne remettait pas en cause vraiment les fondements : lutte des classes, appropriation collective des moyens de production, correction des inégalités par des instruments fiscaux et sociaux.
Une partie de la droite s’en accommoda, dans des circonstances historiques particulières (reconstruction après la guerre tirant profit d’un Etat puissant, politique de grands projets du général De Gaulle convenant, sur le fond, à la gauche d’alors).
La pertinence de ce modèle, certes centralisateur, a laissé jusqu’à aujourd’hui des traces, malgré l’entreprise systématique de destruction poursuivie, dès Pompidou, par les gouvernements successifs, si l’on excepte la courte rémission de 1981 à 1983 : la qualité de l’aéronautique française est l’héritière des politiques de grands projets, la sécurité sociale, fortement menacée, aussi.
Lorsque la gauche française, consécutivement au primat du Parti Socialiste sur le Parti Communiste et à l’effondrement du bloc de l’Est, s’est émancipée de l’influence culturelle communiste, elle a de fait jeté le bébé antilibéral avec l’eau du bain stalinien. Nous en sommes toujours là. Au mieux nous avons affaire aux dénonciations troskistes, souvent justes, mais jamais accompagnées de propositions alternatives concrètes et crédibles. Au pire, nous avons un antilibéralisme « moral » qui se borne prudemment à remettre en cause les « excès » libéraux sans toucher à l’essentiel : c’est l’antilibéralisme « peau de lapin ».
Cela est bien beau, dira-t-on, mais comment faire autrement ? Nous proposons ici quelques pistes, qu’il conviendrait de développer progressivement.
La première est une évidence : on ne peut être antilibéral conséquent qu’en refusant le rôle dominant du marché. Pour nous, le marché est un outil, et seulement un outil, permettant d’allouer des biens et des services en fonction de la demande. Il nous paraît adapté pour ce qui concerne soit les biens et services courants non fondamentaux, soit les prestations des entreprises entre elles, hors là aussi les services fondamentaux.
Qu’est-ce qu’un bien ou service fondamental ? Celui qui est indispensable à une vie décente pour un citoyen, ou à un fonctionnement convenable pour une entreprise, ou qui représente un intérêt stratégique pour le pays.
La liste varie bien entendu avec les époques. Tel bien fondamental à un moment de l’histoire (les chevaux pour le courrier, par exemple, le pain comme base alimentaire) ne l’est plus, ou l’est moins, aujourd’hui. A l’inverse, un service bancaire de base, non fondamental voici un peu plus d’un siècle, l’est aujourd’hui.
La gauche d’aujourd’hui refuse de dresser une liste indicative : pusillanimité éclairante. Tentons-le, sans prétendre à l’exhaustivité.
On y trouvera les services publics au sens traditionnel, ou plutôt ce qu’il en reste (avez-vous remarqué que la gauche « antilibérale » proteste toujours contre le démantèlement d’un service public, sauf quand elle le fait elle-même, mais ne réclame plus sa reconstitution lorsqu’elle revient au pouvoir ?) : police, justice, défense, éducation, santé (mais quoi dans la santé ?), accès à la culture, transports collectifs, réseaux de transports, communications, énergie (pour combien de temps)…
On y trouvera aussi des secteurs qui ne ressortissent pas du service public, ou incomplètement (cas de l’eau), mais qui sont indispensables soit aux citoyens, soit aux entreprises, soit à la nation : production alimentaire, eau, services bancaires de base, logement, recherche, biens culturels, information…
Cette liste, qu’on pourrait allonger, montre bien, dans son énoncé même, qu’il n’est pas pertinent d’assimiler « service public » et « biens et services ne ressortissant pas du marché ».
L’Etat, représentant l’intérêt général, a plusieurs moyens d’intervention pour soustraire au marché, en tout ou partie, des biens et services, en dehors de la mise en place de services publics traditionnels.
Il peut « corriger » des mécanismes, marotte du PS, en agissant à la marge (contrôle de certains prix, élimination ou limitation de pratiques jugées exorbitantes). Même cela, la gauche gouvernementale l’a peu fait. Une autre « correction » a été plus utilisée, correspondant à des instruments de redistribution sociale (RMI, CMU, emplois-jeunes dans une certaine mesure). Ce sont des corrections ex post, qui ne touchent pas les causes des inégalités sociales, mais uniquement les conséquences. Les instruments que nous venons de citer sont tous nécessaires, mais ils ne constituent en aucun cas des outils « antilibéraux ».
Il peut impulser une politique de « grands projets », qui ne se limiterait évidemment pas aux monuments. Les grands projets impulsés par les pouvoirs publics sont un cauchemar pour les libéraux : ils mobilisent des ressources qui échappent à la bourse, ils se décident sur des critères dont les dividendes à court terme sont exclus. Toute l’armada d’institutions construites sous inspiration libérale exclut soigneusement sinon l’idée, qui peut faire chic, au moins la possibilité de grands projets. A l’OMC, c’est un gros mot, à Bruxelles, on s’en sert pour qualifier des projets lilliputiens, les choses sérieuses étant la déréglementation, et le grand projet imposant ses propres règles. Pour faire plaisir à certains amis de J.P. Chevènement, le grand projet n’est ni de droite ni de gauche en soi. Ce qui peut être de droite ou de gauche, c’est la raison pour laquelle on le décide et le conduit. Le grand projet est fédérateur, parfois enthousiasmant, créateur d’emplois, de richesses, d’autonomies. Le grand projet est émancipateur Il faut refaire des grands projets.
(à suivre)
Capturé par MemoWeb à partir de http://www.cactus-republicain.org/index.php?ID=&Langue=Object&ThemeID=59&RubID=114&InfoID=209  le 16/07/2004