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Edito : La Banquise couvre la gauche!
LA LIGNE : QU’EST-CE QUE LA GAUCHE AUJOURD’HUI ?
POINT DE VUE 1: AU-DELA DES CLIVAGES TRADITIONNELS : POUR UNE PERSPECTIVE DE GAUCHE
POINT DE VUE 2 : LA GAUCHE ?
GRAND REPORTAGE : DU MAROC AUX CITES
LES BELLES HISTOIRES D’ONCLE SYLVAIN : DELITS D'INITIES ?
BOUM-BOUM : AU SECOURS, LES BIGOTS EUROPEENS ARRIVENT !


 
LA LIGNE : QU’EST-CE QUE LA GAUCHE AUJOURD’HUI ?
Par J.L Gonneau
Darcy Ribeiro, sociologue éminent, parlementaire brésilien, farouche opposant à la dictature militaire, écrivait, voici quelques années dans son maître ouvrage O povo brasileiro ( Le peuple brésilien), à peu près ceci : le Brésil a été une colonie, une monarchie, un Empire, plusieurs fois une dictature, civile ou militaire, plusieurs fois une république, mais une chose est demeurée constante : la classe dominante n’a jamais rien cédé. Le 27 octobre dernier, Luiz Inàcio Lula da Silva a été élu Président de la République. Le premier président de gauche. On imagine mal ici l’immense espérance que suscite cette victoire. On sait déjà que cette espérance ne sera pas entièrement satisfaite. Il est même possible que Lula subisse un échec. Nombreux sont ceux qui ont souligné que cette victoire avait été rendue possible par des alliances avec une partie de la droite, à commencer par son vice-président, riche industriel, que Lula avait, comme on dit, mis pas mal d’eau dans le vin de la gauche brésilienne pour enfin l’emporter, après deux échecs. Quand bien même. Pour une fois, la première, la classe dominante va devoir céder, ne serait-ce qu’un peu. Il fallait lire les éditoriaux du Financial Times, porte-parole quasi autorisé de la haute finance internationale : l’empire du mal s’étendrait à l’Amérique latine. Pour un peu, l’équation Ben Laden = Saddam Hussein = Lula allait s’écrire.
La Mairie de Paris, entre autres choses, a décidé d’acquérir un immeuble cossu du très sélect boulevard Malesherbes pour y aménager une centaine de logements sociaux, au nom de la mixité sociale dans les quartiers. On peut chipoter et y voir un « coup » plus ou moins médiatique. Quand bien même. La droite locale, emmenée par une ancienne et éphémère ministre, ne s’y est, elle, pas trompée, et l’équation logements sociaux = immigration = insécurité a été sinon écrite, du moins prononcée, et sans ambages.
Deux exemples d’ampleur et de latitudes bien différentes pour tenter de montrer une chose : la gauche et la droite, ce n’est pas pareil. La droite, c’est toujours la volonté de conserver l’ordre des choses. Et dans l’ordre des choses, il y a, toujours, une classe dominante. Ce qui est constitutif de la gauche, c’est la volonté de changer cet état des choses, que par l’égalité de chances et l’émancipation par le savoir et la culture, le pouvoir ne soit plus la chose d’une classe, mais du peuple. Elle y a jusqu’à présent échoué ? Oui. Oui mais. Mais les luttes sociales ont permis d’améliorer les conditions de vie. Mais les luttes politiques ont permis d’aboutir au suffrage universel. Mais les luttes économiques ont permis, dans certains pays, à certaines époques, de rendre collectif le contrôle de certains moyens de production.
Les échecs successifs de la gauche, les déceptions répétées sont-ils une condamnation définitive ? Faut-il passer à autre chose ? Tel n’est pas notre point de vue. La lutte pour l’égalité et l’émancipation continue. Nous avons qu’elle longue, infinie peut-être. Utopique alors ? Mais peut-on vivre sans utopie.
Echecs et déceptions découlent de dérives et de trahisons, certes. Il y en aura d’autres. Il y aura aussi des victoires, parfois modestes. L’écroulement du système soviétique, de l’auto-proclamé « socialisme réel » a fait l’objet de multiples analyses. La plus commune met en avant l’échec économique. Il est probable, mais nous avons la conviction que la cause première, à l’origine peut-être même de l’échec économique, est que les soviets ont engendré une nouvelle classe dominante. Dès lors, l’égalité et l’émancipation, les « deux mamelles » de la gauche, ne figuraient plus au cœur du projet des partis communistes de l’est. Dès lors, la « gauche » n’était plus qu’une référence formelle. Lorsqu’en 1983, le gouvernement de gauche français prétend ouvrir la « parenthèse de la rigueur », on comprend que c’est bien autre chose que ces mots recouvrent : le ralliement de la gauche gouvernementale au libéralisme économique. Dans les catégories de celui-ci, l’égalité est une aimable plaisanterie, et l’émancipation un dangereux fantasme. Dès lors, la gauche devient peu à peu une référence formelle, qui atteindra l’un de ses sommets lorsque le parti socialiste français jette le masque en annonçant que le capitalisme est un cadre incontournable qu’il ne s’agira que d’aménager : « blairisme » avant Blair, quelle audace ! Quelle modernité !
La gauche, telle que nous venons de commencer à la dessiner, ne se réduit pas aux appareils politiques, hommes ou partis, y compris le pôle républicain. Confondre la gauche et les partis « de gauche » est de notre point de vue une erreur. Nous verrons cela dans le prochain numéro.
( à suivre)
Capturé par MemoWeb à partir de http://www.cactus-republicain.org/index.php?ID=&Langue=Object&ThemeID=59&RubID=117&InfoID=243  le 16/07/2004