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AU-DELA DES CLIVAGES TRADITIONNELS : POUR UNE PERSPECTIVE DE GAUCHE Par Clémentine Autain
LA GAUCHE ? Par Michel Naudy
LA GAUCHE, SI ON A 36 ANS EN 2003 Par Florence Bray
LA GAUCHE ENGLUEE PEUT-ELLE ENCORE PARLER ? Par Jean-Marc Holleaux
RASSEMBLER SUR UN CONTENU Par Georges Michel


 
LA GAUCHE ? Par Michel Naudy


Partir, par les temps qui courent, à la recherche de la gauche suppose de s’être préalablement pourvu de la foi que l’on prête au charbonnier et de l’endurance indispensable au coureur de fond. La gauche ? Mais, d’abord, qu’est-ce à dire ? our s’en tenir à une acception très large, on pourrait convenir que, dans la lignée de la grande révolution, on désigne sous ce vocable le camp de ceux qui ne se résignent pas à l’ordre des choses, manière supposée innocente d’exprimer le désordre des privilèges et d’abord celui de l’Argent Roi. Autrement dit, la gauche serait le vaste et composite ensemble de ceux qui considèrent comme centrale la valeur d’égalité ainsi qu’elle est inscrite au cœur même de la devise républicaine.
Or, à cette aune là, si peu discriminatoire soit-elle, il est à craindre que le paysage actuel ne s’apparente à un désert. Pour être bref, les formes partidaires prises par la gauche au cours du siècle dernier ont toutes renoncé à la centralité des valeurs égalitaires même si elles ont abouti à cet abandon pour des raisons fort différentes. De l’épuisement du radicalisme au ralliement du socialisme français à l’idéologie dominante du marché mondialisé, de la groupuscularisation du communisme national à la concurrence des sectes trotskistes dont la plupart ne voient dans la gauche qu’un lieu de débauchage et de noyautage, sans omettre l’aphasie chronique de l’anarchisme ; les chemins sont divers, même si tous mènent à l’ensablement.
Il serait cependant un peu court et tout à fait désespérant d’en rester à pareil constat. Si les partis ont, de fait, capitulé en rase campagne, telles les armées de soixante-dix devant la Prusse casquée, il demeure un peuple qui, pour filer la métaphore, s’est seul dressé, l’année suivante, dans un Paris barricadé dans son utopie. Utopie de gauche et égalitaire, faut-il le préciser ? Ainsi a-t-on déjà vu – la Commune n’en étant qu’un exemple éloquent et néanmoins sanglant – resurgir des tréfonds de la nation la vieille et lancinante aspiration des égaux quand avaient failli l’essentiel des élites et des représentants. Il y a là plus qu’un signe, un encouragement.
Qu’est-ce à dire ? Simplement que l’histoire est travaillée depuis ses aurores par une aspiration confuse, souvent masquée, parfois violente, le plus souvent souterraine qui, des premières hérésies chrétiennes à la guerre sociale, n’a jamais laissé les puissants en repos. Ce mouvement depuis plus de deux siècles a pris la forme de la gauche (des gauches serait plus exact) dont les expressions politiques organisées ont aujourd’hui déserté le camp. Voilà tout. Rien ne dit que cette forme-là de la revendication égalitaire survivra à pareille déconvenue, rien ne dit que la gauche sera toujours de gauche. Après tout n’a-t-on pas déjà constaté dans l’histoire des effondrements politiques d’ampleur comparable dans le sillage de tant d’empires que l’on pensait millénaires ? Ce qui demeurera, en revanche, est la sourde obstination des peuples à briser leur supposée prédestination à l’aliénation. Là est le salut. Et, quelles que soient leurs déconvenues, il se trouve que la plupart de ceux qui aujourd’hui portent toujours en eux la volonté d’échapper au talon de fer des dominants s’apparentent, se référencent et se réfèrent encore à la gauche. Peut-être ont-ils un train de retard. Peu-être. Mais hors ce train-là, il est à craindre que la voix ne porte que dans le désert.
Tiens, encore lui !
Capturé par MemoWeb à partir de http://www.cactus-republicain.org/index.php?ID=&Langue=Object&ThemeID=67&RubID=95&InfoID=300  le 16/07/2004