On aura tout entendu, tout et son contraire sur le féminisme. Le terme est décrié, ses actrices sont fustigées : « mal baisées », « hystériques », sans humour, « anti-mecs » et que sais-je encore ! Rien de nouveau: les attaques sont notre lot commun depuis plus d’un siècle (se reporter à l’excellent ouvrage dirigé par Christine Bard, Un siècle d’anti-féminisme). Et voilà que des femmes, qui se prétendent post-féministes ou ex-féministes, dénoncent les mouvements féministes qui, obsolètes, feraient « fausse route ».
Las, revenons-en au fond et à l’essentiel. Le féminisme vise l’émancipation des femmes, en droit comme en fait et l’égalité entre les sexes. C’est un mouvement humaniste qui a permis l’émergence d’avancées considérables : fin de l’incapacité civile pour les femmes (1938), droit de vote et d’éligibilité (1944), libéralisation de la contraception (1967) et de l’avortement (1975), loi favorisant l’égalité professionnelle (1983)…
Aujourd’hui, si l’égalité formelle est peu ou prou acquise, l’égalité réelle reste introuvable : près de 85% des tâches domestiques sont réalisées par les femmes, les écarts de salaires entre les sexes s’élèvent à 27%, 9 travailleurs pauvres sur 10 sont des femmes, les violences conjugales et les viols sont dans une écrasante majorité le fait d’hommes à l’encontre de femmes… Les féministes luttent contre ces faits, qui ne sont pas une fatalité. Et nous ne sommes pas si nombreuses.
Alors, si l’on veut discuter des enjeux plus complexes comme la part entre l’inné et l’acquis ou l’impact de la victimisation des femmes, il faut d’abord choisir son camp et éviter de lui taper dessus. On voit combien médias et réactionnaires de tout poil font leur miel de ses accusations souvent indigentes et qui, finalement, empêchent les débats de contenu.