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CHERCHEUR, MALGRE TOUT…
Par Jacques-Robert Simon



La recherche attire depuis toujours les gens fascinés par les difficultés et l’inconnu. Ceux-ci, pour la plupart, négligent les diverses contingences matérielles pour se consacrer à leur passion. Mais dans quelles conditions travaillent-ils ?
Les premiers pas d’un chercheur commencent vers 22 ans où l’ingurgitation d’une immense quantité de savoirs (et leur régurgitation) ne constitue plus l’essentiel de ses activités. Il est invité à choisir un laboratoire pour préparer une thèse de doctorat sous la direction d’une personne « habilitée ». Le choix du Directeur de thèse est essentiel : il doit faire partie de ceux qui ont une richesse à transmettre et une passion à communiquer. Sinon la réussite de la suite est déjà compromise. Il pourra peut-être conserver une chance de poursuivre son parcours s’il « sort » d’une Grande Ecole, il en aura à peu près aucune sinon.
Le laboratoire choisi, il va travailler d’arrache-pied sur « son » sujet de thèse : c’est lui, et normalement lui seul, qui est en charge de faire progresser le sujet qu’on lui a proposé. Il apprend alors ce qu’est la véritable Science faite de doutes plus que de certitudes. Le diplôme de Doctorat n’a de valeur que par la qualité du directeur de thèse, du moins dans la majeure partie des cas. En effet, il existe des disparités considérables entre les thèses : il peut s’agir d’une simple assistance technique à un chercheur plus ancien jusqu’à la miraculeuse découverte mise à jour par hasard ou par ténacité. Il est presque impossible de déterminer la part du jeune docteur sans l’aide crédible de son Directeur.
Même brillante, la thèse ne conduit pas à des lendemains faciles. Le CNRS n’embauche pas de chercheurs à ce niveau. Il est encore nécessaire d’effectuer un voire deux stages post-doctoraux, de préférence aux Etats-Unis, pour parfaire ses connaissances scientifiques et linguistiques. Durant ce temps il doit amasser des publications s’il veut avoir une chance de réussir un concours d’entrée fort difficile qui ne laisse aucune place aux dilettantes, bien que ceux-ci soient indispensables à la profession.
La recherche dans l’industrie est également difficile d’accès mais pour d’autres raisons. Les « décideurs » de celle-ci se méfient de gens devenus compétents et autonomes et dont les réflexes naturels ne les conduisent pas à une obéissance aveugle. Il est préféré l’esprit « maison » formaté par une école d’ingénieur qui transfère directement ses diplômés au sein de l’entreprise. Ceci favorise, selon les dires, l’esprit collectif. Cependant, de multiples aventures industrielles ont débuté grâce à de fortes individualités, même en France !
L’infime minorité qui va entrer au CNRS pourra y découvrir des choses contrastées. Le jeune chercheur se verra probablement proposer de travailler pour un agent plus ancien, il s’agit, selon l’expression consacrée de lui fournir des bras. Mais s’il a un peu de caractère, son statut de fonctionnaire lui permettra facilement de se débarrasser de cette tutelle si elle s’avère stérile. Il lui faudra encore trouver de l’argent pour financer ses projets. Inévitablement, il devra établir un partenariat industriel. Il est littéralement sidérant de lire les projets proposés la plupart du temps par les entreprises : une peinture qui change de couleur lorsqu’il gèle, des polymères permettant de faciliter l’avancement de torpilles dans l’eau de mer, des colorants qui se détruisent sous irradiation laser…Il est souvent possible de se demander le caractère « construit » ou même « industriel » de ces demandes. Mais le projet importe peu, seule l’étiquette compte. L’estampille « industriel » transforme toute action en utilité. Personne n’a jamais évalué l’efficacité d’une telle approche.
Pour trouver de l’argent « public » le chercheur devra raccrocher ses travaux à des termes utilisés par des sommités scientifiques : cela lui permet d’intégrer une communauté internationale et cela permet également aux personnalités qui la chapeaute d’accroître leur audience.
Lui restera-t-il du temps pour faire de la recherche ?? Pas toujours !