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LINUX ET LES MIRS Par Jacques-Robert Simon
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LINUX ET LES MIRS
Par Jacques-Robert Simon


Les idéaux, les principes, la morale, l’humanisme, les diverses formes de transcendance (religieuses ou athées), la littérature, la poésie, aussi bien que les sciences, ne seraient selon nos idéologues actuels que des lubies qui ne créent pas de « valeurs ».
Les néocons (pour neo-conservators : neo-cons’) ont un slogan qui résume tout : les marchés et le commerce permettent toutes sortes de progrès à toutes les populations.
Pourtant, l’invention de la roue, de la pierre taillée, du bronze, de l’imprimerie, des antibiotiques, en fait de tout ce qui a permis un réel « mieux-vivre » n’a jamais été créé par des marchands. C’est un non-sens historique de faire dépendre le progrès du commerce. Les « marchés » ont favorisé l’émergence tout d’abord d’une société de consommation puis d’une société du superflu.
Observons maintenant le jeu démocratique tel qu’on nous le propose (il pourrait être bien différent). Une « majorité » obtient la totalité des pouvoirs, la « minorité » attend son tour pour faire de même. Il est donc naturel que toute transition ou changement de cap soit essentiellement impossible.
A ce propos, il faut noter que la communauté scientifique (en tant que système) ne fonctionne pas ainsi : des révolutions sont possibles et elles se produisent d’ailleurs régulièrement. Leurs initiateurs sont toujours ultra-minoritaires, cependant la totalité des scientifiques se rallie à cette révolution après un examen minutieux de sa nature et de sa pertinence. La communauté scientifique est donc à la fois consensuelle et révolutionnaire mais elle n’a rien de démocratique : la majorité ne décide pas, elle acquiesce .
Dans un autre domaine, il existait en Russie, avant la révolution de 1917, des organismes de propriété collective, les « mirs ». Mir signifie en russe à la fois commune, paix et monde. Lorsque des décisions intéressant l’ensemble de la communauté devaient être prises, celle-ci se réunissait et les conclusions étaient adoptées par consensus. Sous des formes quelque peu différentes et sous d’autres noms, ce type d’organisation a existé presque partout. Les techniques nouvelles de communication permettent de renouer efficacement avec cette tradition.
En 1991 Linus Tornvalds a écrit un programme pour utiliser plus efficacement son ordinateur : une première version de « Linux » naissait en août de la même année. Celle-ci ne fut d’abord utilisée que par une minorité férue de programmation. Au fil du temps, beaucoup d’informaticiens professionnels ou amateurs se fédérèrent pour améliorer le travail initial. En quelques années l ‘apport de programmeurs issus des quatre coins de la planète et communiquant par internet permit de parfaire les fonctionnalités de Linux. Chaque équipe travaille dans une structure hiérarchique informelle et met à la disposition de tous et gratuitement le fruit de leur travail. Les ajouts des programmeurs sont incorporés au « corpus » officiel de Linux après une sévère vérification d’utilité. Linux est un » logiciel libre » : chacun peut l’utiliser, faire des copies, l’améliorer et publier ses améliorations. Linux est donc emblématique d’un monde non-marchand et fondé sur la coopération plutôt que sur la concurrence.
En France, début 2000, le ministère de la Culture a décidé d’utiliser Linux pour 400 de ses gros ordinateurs (serveurs), suivi quelques mois plus tard par le ministère des Finances. Depuis, des entreprises telles que Hewlett Packard et IBM ont décidé de soutenir Linux. Ce dernier est donc devenu une alternative crédible au produit issu de la plus puissante compagnie américaine de fabrication de logiciels. Plus récemment, l’industrie de l’électronique « grand public » (par l’intermédiaire de Sony et Matshushita) s’est ouverte à Linux.
Au delà de cet exemple, il s’agit bel et bien de démontrer concrètement qu’une démarche fondée sur la coopération des talents peut parfaitement entrer en compétition avec des firmes cultivant le mythe de la concurrence à tout va. D’autres secteurs d’activités devraient pouvoir suivre le même cheminement. Dans cette optique est-on si éloigné des « mirs » ?