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LES PSEUDO-PSYS DE L’EUROPE

Par Gabriel Galice
dimanche 11 septembre 2005
par  Gabriel Galice
popularité : 39%

Je ne lis pas Le Monde quotidiennement. Je consulte l’édition en ligne. Un de mes frères me stocke et me livre tous les deux mois les exemplaires papier du vespéral quotidien. Cette procédure présente plusieurs avantages : elle me dispense de financer un journal de plus en plus illisible, conformiste et arrogant, elle me procure du recul sur l’événement, elle me fournit le plaisir enfantin de longues séances de découpages.

Je découvre donc fin juillet les analyses des psys du OUI sur la victoire du NON au référendum sur le Traité établissant une Constitution pour l’Europe. Les experts du OUI ne trouvant pas dans leur boîte à outils conceptuelle les instruments ad hoc recourent qui à la psychanalyse, qui à la psychiatrie.

Le psystorien Pierre Rosanvallon, maître-penseur du « libéralisme de gauche », nous parle tranquillement du « retour du refoulé (1). » Le docteur Rosanvallon n’y va pas de main morte : « les discours triomphalistes des partisans du non ennuient avec leur aspect de pieux catalogue du prêt-à-penser sur le peuple, les élites, l’ultralibéralisme ». La messe est dite. « Ce sont en fait les spécificités du modèle français qui auraient dû être interrogées et discutées ». Et les spécificités néerlandaises ? Rosanvallon a trempé trop vite sa plume dans son humeur, sans doute pas si « ennuyée » qu’il voudrait nous le faire croire. Dans Le Monde du 1er juin, le député allemand CDU Peter Altmaier nous invite à nous défier du peuple : « En cas de référendum, les Allemands auraient voté non. » « Il y a problème de pédagogie. » C’est l’idée fixe de nos maîtres, qui préfèrent manifestement la salle de classe à la lutte des classes.

L’historien et académicien Pierre Nora impute la victoire du NON à « une dimension identitaire, un non-dit national (2). » Cet autre psy nous affirme que « Les Français ne veulent plus mourir pour la patrie, mais la France est devenue une notion patrimoniale. (...) Mais dans « patrimoine » il a patrie ». Bref, nous serions des fous des lieux de mémoire...chers à Pierre Nora. « Un attachement (à la nation française) qui constitue sûrement le terreau où les souverainistes et les populistes puisent sans qu’on puisse le limiter à l’exploitation hystérique et perverse qu’ils en font. » Hystériques et pervers, rien de moins ! L’honorable psystorien et académicien ne pousse pas sa référence freudienne jusqu’à se demander ce que fait le « pater » dans la patrie et dans le patrimoine. Reconnaissons-lui le souci de poser la question de la référence nationale et d’affirmer que notre langue mérite mieux que le sort qui lui est réservé.

Eurologue patenté, Yves Mény, président de l’Institut universitaire européen de Florence, nous voit davantage en paranoïaque qu’en pervers hystériques : « La gauche du non, qu’on le veuille ou non, a contribué à la paranoïa française de l’Hexagone assiégé (3). ». L’incipit de son article est tranchant : « La guillotine du non est tombée, nette, sans appel. » Au point de faire perdre la tête à tant de doctes commentateurs ? « Un fait brutal s’impose : un conservatisme social et de nature populiste s’est exprimé de manière incontestable. » Le docteur Mény nous exhorte à la raison marchande : « Le libéralisme est devenu pêché mortel comme si nous ne vivions et ne travaillions pas dans une économie de marché. » Ah. L’économie de marché ! Alpha et oméga de la pensée moderne, raisonnable, européenne en un mot ! Pont aux ânes des baudets de tout poil qui ne veulent pas se casser la tête avec la lecture de Polanyi, de Galbraith (Les mensonges de l’économie) et de tant d’autres, ni prendre la peine de déchiffrer les mécanismes du monde réel, et notamment le passage du capitalisme familial au capitalisme actionnarial, du keynésianisme au monétarisme, etc.

Ces diagnostics « cliniques » nous en apprennent davantage sur nos plumitifs et leur indigence que sur notre peuple (le populiste pointe le nez...) et sur l’ « Europe ». Car leur mélange de grand bazar et d’otanesque appendice étasunien sur le continent euasisatique n’a pas grand-chose d’européen. L’Europe sera celle de ses peuples ou ne sera pas. Nos petits-maîtres en apportent la démonstration, à leur corps défendant, en leurs dits, dédits et non-dits. Nos démocrates de marché renouent avec les méthodes de la dictature stalinienne psychiatrisant ses opposants. Nos psy amateurs invoquent les faits (« Ce sont en fait... », « un fait brutal... ») pour s’en détourner. Je me garderai de qualifier ce procédé....

(1) Le Monde, 3 juin 2005

(2) Le Monde du 4 juin

(3) Le Monde, 1er juin.

Gabriel Galice est l’auteur du livre Du Peuple-Nation - essai sur le milieu national de peuples d’Europe, (Lyon, Mario Mella, 2002)


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