Ils nous étonneront toujours ! Après la béance de la fracture sociale, après une discrimination pandémique reconnue, après des lois sécuritaires ciblées et redoublées.., on croyait bien avoir touché le fond où le ridicule le dispute à l’odieux. Et bien, non. Puisqu’on peut toujours faire pire, pourquoi s’en priver ?

Par exemple : Savez-vous que nous pourrions faire l’économie d’historiens, de chercheurs en pédagogie... ? Il suffit de quelques députés pour vous dire comme "infailliblement", c’est à dire avec force de loi que la colonisation française, notamment au Maghreb, n’a été que « glorieuse » (cf. le projet de loi concocté pendant l’été 2004, loi votée le 2 février 2005), et comment il fallait re-écrire les manuels scolaires en ce sens.

Historiquement...

Les Historiens nous ont appris que, si nos "glorieux" colons avaient sans doute fait de belles et bonnes choses, ils avaient aussi occupé brutalement le Maghreb sans carton d’invitation, pompé les matières premières des colonies, inventé un statut d’indigénat au mépris de la Démocratie, salarié les ministres du culte musulman au mépris de la Laïcité, obligé, tout aussi "laïquement", à faire figurer la religion sur les documents d’identité en Algérie (jusqu’à inventer la catégorie de "Musulmans-Chrétiens" pour les quelques musulmans convertis par nos « glorieux » missionnaires !), n’ont triplé les écoles en Algérie que pendant les huit dernières années sur 130 de présence, grâce à l’armée ( je le sais, j’en fus !), sans oublier ce crime contre l’humanité qu’est la torture ; prouvée partout, reconnue officiellement nulle part (je le sais, j’en fus témoin !), etc... De deux choses l’une : ou tous nos Historiens se trompent, ou les députés ne le savent toujours pas.., et ils sont bien les seuls.

Pédagogiquement...

Bien sûr, si la loi coule dans le marbre législatif « la gloire de notre Colonisation », il faut bien, dans la foulée, l’enseigner à nos "chères têtes blondes", celles dont les Ancêtres s’appelaient les "Gaulois". C’est donc à cette "adaptation" des manuels scolaires que nos députés nous invitent en ce mois de novembre 2005. Mais... d’une part, re-écrire les manuels scolaires entre-t-il dans les légitimes attributions des députés, fussent-ils drapés du manteau du "Législateur" ? D’autre part, après avoir présenté les "faits" (du moins certains faits triés, en en glissant d’autres sous le tapis), il faudrait donc pré-mâcher aux élèves ce qu’il faut en penser ! Et moi qui croyais que la "laïcité", dont on fête le centenaire, c’était d’éduquer à juger par soi-même, à se faire son propre jugement ! Pas "pré-mâché" ! Est-ce cela que certains appellent la "Laicité Ouverte" ? Craignons-le ! J’ai dit : "adaptation". Parions qu’il y a des synonymes plus exacts.

Socialement...

Enfn, nos écoles ne sont pas (pas encore) réservées aux descendants de Vercingétorix, au teint pâle et tresses blondes. Savez-vous qu’elles sont aussi ouvertes à tous ces petits Français et Françaises auxquels on n’arrive toujours pas, après 2., 3, 4 générations, à enlever cette étiquette redoutable de "issus de". Il est vrai que, s’ils ont les mêmes devoirs et devraient avoir les mêmes droits que leurs petits camarades "issus de gaulois", leur sang et leurs racines "se souviennent". Nombre des ces gamins et gamines ont entendu, ou ont encore, des parents ou grands parents qui ont été "glorieusement" discriminés, "glorieusement" torturés, "glorieusement" assassinés... chez eux et jusqu’au coeur de notre "Glorieuse Capitale" un certain 17 octobre 1961 par exemple ! Va-t-on oser leur enseigner cette même loi et mettre dans leurs mains les mêmes manuels "adaptés" ? Le mot de "racaille" et la menace du "karcher" leur ont déjà mis le feu une fois. Vous voulez vraiment remettre ça ? C’est de la provocation, de l’acide versé à nouveau sur la plaie de notre « glorieuse »fracture sociale", en bonne partie "issue de" notre « glorieuse colonisation »

Mais quel génie de notre France Profonde a bien pu inventer cette "cerise empoisonnée sur notre gâteau social" ? Un député UMP. Je me suis laissé dire qu’il était membre du "Club de l’Horloge". Ceci explique cela, sans doute. Mais ce qui reste inexplicable c’est que la majorité de nos députés aient voté ce torchon, ce "brandon", sans sourciller.

Pour des excès de douteuses prises de position personnelles dans son enseignement, un universitaire lyonnais avait provoqué une loi inventant le délit de "révisionnisme", de "négationnisme". Cette loi à la "gloire de la colonisation" réhabilite, légalise ce délit ! Décidemment, on n’arrête pas... le progrès