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LA POLITIQUE ET LES SUBTILITES DE LA LANGUE FRANCAISE
Par Florence Bray


On peut parler avec ses tripes plutôt qu’avec sa tête, voire sa bouche, soyons fous, mais devinez ce que l’on atteint chez l’autre : les tripes. Est-ce l’aboutissement optimal d’un échange politique que de se faire vibrer mutuellement, donc de communiquer voire de communier dans ce qu’il y a de moins rationnel, de susciter de la chaleur donc de la sympathie grâce à ce qui n’est qu’une connivence momentanée fondée sur une réaction affective ? Ce mode de communication, si l’on ne se trouve pas au cœur d’une assemblée par principe et par ailleurs préalablement unie sur des convictions profondes, certes, friserait pour l’œil extérieur d’un critique resté froid le talent démagogue dont on connaît la puissance parfois dévastatrice pour le champ des idées, puis de la vie politiques : l’appel à la résistance ou le vibrato haletant qui invoque le recours à l’homme providentiel, légitimé par le danger imminent, sont-ils le fait d’un orateur politique, ou celui d’un simple tribun en quête d’approbation personnelle ? Et l’art de persuader ne passe-t-il pas depuis un paquet d’années davantage par les silences et les effets de chute, si naturels à un Jean Pierre Chevènement quand il s’émancipe des plans en trois parties, et si efficaces, que par le haussement de ton quasi agressif?
Symétriquement, on peut parler à son prochain sur un autre mode de connivence, celui de l’oxymoron et des subjonctifs, qui en feront sourire quelques-uns et en laisseront d’autres tout à fait sourds : ce langage « bac + 12 », selon une formuleconsacrée par des bacs + 12 eux-mêmes, car elle relève exactement des même références private joke que les raffinements sémantiques précédents (le titulaire d’un CAP voit-il combien cette formule est désopilante et bien sentie ? ? ?), a sur le premier l’avantage de n’être pas dangereux car dans le pire des cas il agace, et l’agacement est au moins l’expression d’une critique, contrairement à l’adhésion ou à la protestation des tripes ; en plus, ce n’est pas un mode d’expression, mais un moyen un peu facile de dire « salut j’ai bien vu que vous étiez là » à ses potes de promo, qui se glisse dans le message général mais en laisse le reste audible. Il épargne ainsi en tous cas la capacité de juger, ce qui humainement vaut quelque chose, et de deux maux, choisissons le moindre, ou cessons vraiment de déplacer le débat dans ce sens de la séduction, pas toujours honnêtement, puisque dénoncer les beaux parleurs n’est pas exempt d’envie de faire un
bon mot soi-même, et c’est encore une fois tromper l’auditoire en le payant de mots. Ceci pour dire que le mouvement prétendu vers le bas n’est pas une affaire de mots mais d’idées, et que ce n’est pas en parlant comme les pauvres qu’on convaincra les pauvres qu’on est les meilleurs, ni en « allant puiser », en « allant aimanter », et toute autre descente métaphorique qu’on trouvera des interlocuteurs convaincus de nos idées. Notre premier ministre, qui raffole de la « mise en espace » a suscité chez bien « des gens » l’impression d’être méprisés, car contrairement à ce que nous voudrions croire pour expliquer la surdité « des gens » à nos excellentes idées et campagnes, même en bas on comprend le français et on sait ce que « bas » veut dire, par exemple, comme dans « basses couches de la société », « bas salaires », à se demander comment le classement vertical peut être si parlant dans une société réputée désormais sans classes. Oxymoron ne fait de mal à personne, mais « puiser dans l’électorat populaire » pourrait déplaire au peuple élevé par l’école républicaine : à strictement parler, la condescendance n’élève personne.
En parlant d’école républicaine, en quelle estime la tenons-nous pour penser que « pour les gens la gauche et la droite ça ne veut plus rien dire », ou même que « pour les gens, la gauche et la droite c’est pareil », ou que « les gens ne veulent plus entendre parler de la gauche et de la droite ? » : l’instruction civique que J.P. Chevènement a réintroduite s’emploie à définir fort précisément ces choses « qui ne veulent rien dire », et les cours d’histoire ne reposent que sur elles. Quant à ceux qui sont déjà sortis de l’école, les « gens » qui firent une guerre , vécurent la reconstruction, les débats sur les colonies, ils ont vu la droite et la gauche façonner leur existence, et ils racontent leur vie à leur descendance pour peu qu’on sollicite leur mémoire et qu’on cesse d’en défier la pertinence . Et leurs parents à eux savent très bien quelles personnalités avec quel message ont dessiné la France politique. Sont-ce les élites alors, ces « gens » qui tellement en avance sur nous ont vu la preuve que gauche et droite n’ont plus de sens ? ? ? Sont-ce ces diplômés de l’Institut d’Etudes Politiques par exemple qui confondent les deux termes ou qui les jugent non opérants ? Difficile à croire…Chacun de nous sait très bien s’il est de gauche ou de droite car nul n’est né de la dernière pluie et ne peut s’affranchir de l’Histoire. Ceux qui le prétendent possible depuis la fin des années 80 sont au pire les relais et au mieux les victimes d’une société de l’immédiateté et de l’amnésie fabriquées dans la course au plaisir, au profit visible, qui fait l’économie du pénible détour par la réflexion sur ce qui pourrait être en vertu de ce qui fut, plus long c’est certain, que la description de ce qui est. Ce que l’on ne retrouve plus, ce sont les décisions politiques qui infléchiraient le cours des choses, et ce que sanctionnent les abstentionnistes de gauche, ce ne sont pas les idées de gauche, mais les partis qui « se disent de gauche »,encore une histoire de mots, et leur absence d’action de gauche, voire de discours de gauche. Il manque donc bien un parti qui agisse à gauche avec des
idées de gauche dans lequel la population de gauche se reconnaîtrait aussitôt, sans qu’on ait besoin de la séduire par aucune phraséologie, haute ou basse.
« Les gens » manquent de politique et non de structures d’accueil. Il ne suffit pas de chercher le lien, ayons un peu plus d’estime pour la capacité d’autonomie et la liberté des « gens », visons leur intelligence de propositions intelligentes et respectueuses et cessons de vouloir les accueillir, cessons de vouloir nous limiter à créer des réseaux, tissages, tissus etc. de sympathie par l’action publique, créons un espace de débat public sur la chose publique ! C’est cela qui nous différencie déjà des autres partis, la foi dans la réflexion, alors expliquons, écoutons, réexpliquons, corrigeons, mais pas pour l’applaudimètre, de grâce !