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LULA, UN AN APRES
Par Ruy Rodrigues Da Silva

Voici peu, Lula pouvait dire : « Le temps des incertitudes est révolu. Nous avons reconquis la confiance en notre économie et notre capacité de croissance ». Cette auto-satisfaction est-elle partagée par la population. Un récent sondage donnait les résultats qui suivent. 42% des brésiliens jugeaient l’action de Lula très bonne ou bonne, 41% moyenne et 25% mauvaise ou très mauvaise. Pour 54% de ses compatriotes, Lula n’avait pas vraiment commencé à remplir ses promesses électorales, 41% estimaient que le chômage restait le problème principal. Et 38% pensaient que le chômage continue d’augmenter. Pour finir, la grande majorité de la population s’identifie fortement à son président, d’origine modeste, ouvrier nordestin émigré à São Paulo.

Le New-York Times donnait en même temps un satisfecit global au président brésilien en matière économique : équipe gouvernemental favorable au marché, contrôle de l’inflation, baisse des taux d’intérêt, austérité budgétaire, taux de change stabilisé, exportations en croissance, réformes réussies des retraites et de la sécurité sociale. Ce satisfecit ressemble fort à un brevet de libéralisme. Mais il est vrai que redonner confiance à l’extérieur était pour Lula un objectif nécessaire. A ce titre, la chute du taux de risque pays (de 2443 points à 499 en un an), l’excédent commercial (24 milliards de dollars en 2003), la réduction des taux d’intérêt et l’aménagement de la dette fédérale constituent autant de réussites, non seulement vis-à-vis de l’extérieur, mais aussi pour permettre à l’économie intérieure de retrouver des marges de manœuvres, encore insuffisantes, mais en progrès.

Les critiques, au Brésil, n’ont cependant pas manqué. L’accord avec la FMI a choqué une partie de la gauche, les échecs ou retards dans les programmes sociaux, la lutte contre le chômage, l’intégration des indiens, la réforme agraire ont attisé les critiques, y compris au sein du parti du président, le Parti des Travailleurs. L’austérité fiscale a laissé le social en berne.

Ces insuffisances ne sauraient masquer une politique étrangère active, marquée par deux priorités : l’intégration de l’Amérique du Sud, en renforçant le Mercosur, afin de « montrer au monde qu’il existe d’autres alternatives que la dépendance vis-à-vis des pays riches qui nous traitent peu ou prou comme si nous étions des états de deuxième ordre », et la résistance au libre échange voulu par les Etats-Unis à travers la ZLEA. Négocier, oui, mais « en défendant nos populations, nos industries, notre commerce ». Dans le même ordre d’idées, l’émergence du « groupe des vingt » lors des négociations de l’OMC, et quelles que soient ses contradictions internes, montre la volonté du Brésil, initiateur principal de cette émergence, de développer les relations sud-sud. Un récent accord de tarifs préférentiels avec l’Inde lui donne un début de concrétisation.

Le gouvernement compte, en 2004, reprendre l’offensive sur le terrain social. Déjà, la loi votée le 8 janvier institue un revenu minimum vital mensuel (Bourse de la famille), qui devrait toucher 44 millions de bénéficiaires à l’horizon 2006. La création d’un « super-ministère » des affaires sociales, confié à Patrus Ananias, ancien maire de Belo Horizonte, où il avait conduit une politique exemplaire, est un signe fort dans ce sens. D’autres mesures, plus ciblées, viennent d’être prises : réduction du prix des médicaments anti-sida (qui demeure un fléau au Brésil), réévaluation des bourses de maîtrise et doctorat (gelées depuis 10 ans !), accès à l’Université encouragé pour les populations défavorisées.

La réforme agraire pose toujours problème. Le Mouvement des Sans Terre n’a pas relâché ses actions (doublement des occupations de terres en friche), et les latifundiaires n’ont pas relâché leur violence (42 assassinats en 2003). De même, dans le domaine agricole, le feu vert donné aux cultures transgéniques est apparu comme un signe de faiblesse face aux grandes exploitations du sud du pays et aux multinationales. La distribution des terres, on le sait, ne résoudra pas seule les problèmes : ce qui coûte le plus, ce n’est pas la terre, mais les moyens et les techniques pour la cultiver. Le gouvernement est néanmoins attendu sur ces questions.

Le temps de incertitudes est-il vraiment révolu ? De notre point de vue, Lula dispose d’atouts non négligeable : une confiance populaire à peine écornée, une économie stabilisée. Tout dépendra, dans les deux années qui viennent, de la concrétisation du programme social du gouvernement. Les bonnes intentions ne manquent pas, les moyens, même s’ils ont progressé, demeurent limité. La détermination sera nécessaire. Le passé de Lula montre qu’il n’en manque pas : la lutte continue.

Ruy Rodrigues Da Silva est ancien ministre des Etats de Goias et du Tocantins au Brésil