https://www.traditionrolex.com/18 IMMIGRATION/INTEGRATION : POUR UNE POLITIQUE DE GAUCHE - La Gauche Cactus

IMMIGRATION/INTEGRATION : POUR UNE POLITIQUE DE GAUCHE

mardi 17 mai 2011
par  Fatiha Mlati
popularité : 3%

Le centième numéro de la banquise est publié à un moment où le débat public en France sur le thème de l’immigration est violent. Certes une petite pause est certes opéré en raison de ce qu’on appelle « l’affaire DSK ». Mais que l’on ne se trompe pas. cette question fortement instrumentalisée, le sera encore plus dans les prochains mois, présidentielle oblige ! Le thème de l’intégration n’y échappe pas. Cette situation suscite des inquiétudes et des frustrations quant à la réalité des politiques publiques menées en la matière.

Frustrations pour les professionnels intervenants sur le terrain de l’intégration. En effet, ces derniers constatent chaque jour certaines incohérences. Déperdition des savoirs et savoirs faire des migrants, difficultés dans l’accès aux droits, relégation dans certains quartiers….

Inquiétudes pour les citoyens que nous sommes. Finalement très peu d’enseignements ont été tirés du séisme politique de 2002. Bien au contraire.

Aujourd’hui, nous avons la montée en puissance d’un discours qui va jusqu’à instrumentaliser y compris les travaux de chercheurs pour alimenter ce qui est devenu un mythe supplémentaire : l’intégration serait un échec. Le mot échec s’entend comme l’impossibilité pour des populations venues d’ailleurs de s’intégrer sous divers motifs culturels, religieux….

On observe encore aujourd’hui que malgré les clarifications apportées par divers travaux et plus particulièrement ceux du Haut Conseil à l’Intégration (HCI), une ambivalence permanente dans le débat publique est de mise sur les termes à adopter (insertion, intégration ou assimilation), sur les catégories concernées (primo arrivants, immigrés, enfants issus de l’immigration).

On observe également si on examine, très rapidement, les quarante dernières années que l’histoire est marquée par quelques avancées mais surtout de nombreuses occasions manquées.

Rappelons qu’un impensé politique a marqué les années soixante dix celui du mythe du retour. Ceci nous a empêchés de mesurer les conséquences du passage de l’immigration de l’homme seul à l’immigration familiale. Cette impensé a retardé la mise en place de politiques publiques d’accompagnement des migrations de peuplement. Sans doute, nous en payons encore aujourd’hui le prix.

Rappelons également que les luttes pour l’égalité des droits des années quatre vingt ont aboutit à une réponse marquée par une approche morale et anti raciste, sans doute nécessaire, mais insuffisante. Cette approche a occulté la nécessité de bâtir des réponses fortes aux enjeux posés par les générations issus de l’immigration.

Rappelons enfin que la montée en puissance des problématiques liées aux déplacements de frontière des années deux mille a laissé la place au concept de partage du fardeau et d’’Europe forteresse. Ceci a occulté la nécessité à la fois de penser les migrations à l’échelle européennes, de repenser les politiques de développement et de mobilité entre ensembles régionaux par exemple euro méditerranéen.

Ainsi après la montée en puissance des problématiques sécuritaires de la fin des années 2000, nous assistons aujourd’hui à l’émergence d’un récit sur l’échec de l’intégration.

Mais de qui parle-t-on ? Le plus souvent des jeunes des cités populaires exclus du marché du travail, relégués dans des zones de ségrégation territoriales ? Sont-ils concernés par l’intégration ? A l’évidence non. Ils sont français.

Le récit sur l’échec de l’intégration ne prend pas en compte que le modèle d’intégration s’il peut apparaitre parfois grippé, il est avant tout en raison d’absence de perspectives, secoués par les crises sociales et économiques successives. Ce récit ne prend pas en compte que l’analyse des trajectoires des migrants ne peut se faire en occultant la question sociale.

Le récit de l’échec occulte le fait que l’analyse des dysfonctionnements de l’intégration est le miroir de l’abandon progressif de notre modèle social. C’est dans ce contexte de crise durable qui sévit un peu partout en Europe, du recul de l’Etat social de droit que le préjudice est toujours renvoyé à l’étranger, au pauvre, toujours soupçonné de ne pas vouloir s’intégrer, de ne pas vouloir faire d’efforts, sans jamais mettre au cœur de l’analyse la dialectique objectifs et moyens, sans interroger les outils vecteur d’intégration (dispositif d’apprentissage de la langue, état du marché du travail, état du logement social, discriminations à l’embauche…la place et le rôle respectifs des services publics, de la société civile) et les moyens dont ceux ci disposent pour leur insertion sociale et professionnelle. Dans ce sens les étrangers sont soumis aux mêmes difficultés que l’ensemble des désaffiliés que compte notre pays.

Le refus d’adopter une position apaisée sur cette question explique les résultats mitigés du MIPEX III pour la France. Ils reflètent clairement les injonctions contradictoires des politiques d’accueil et d’intégration, depuis plusieurs années, sur quasiment l’ensemble des thématiques étudiées.

Les enseignements de l’étude MIPEX montrent globalement que rares sont les pays qui fondent les évolutions de leurs politiques d’intégration sur des éléments concrets, sans prisme idéologique. Elle montre également que pour notamment la France nous sommes loin de l’égalité de traitement, valeur fondamentale de notre République.

Examinons quelques indicateurs du MIPEX en fonction des réalités d’aujourd’hui :

La « résidence de longue durée » :

On observe que la France arrive en queue de peloton des pays européen.

Effectivement, un changement de logique majeur est intervenu. L’accès simplifié et dans un délai raisonnable au séjour permanent hérité des années quatre vingt a été remplacé par une politique de précarisation des titres. C’est une évidence qu’un titre de séjour d’une durée de douze mois rend plus difficile par exemple l’accès à l’emploi pérenne, au logement stable, à un crédit bancaire.

Par ailleurs, le renouvellement du titre de séjour temporaire et du titre de résident permanent est subordonné au respect du Contrat d’Accueil et d’Intégration. Le CAI est une disposition à priori positive. Elle peut être analysée comme une avancée, la reconnaissance que le migrant a vocation à s’installer durablement sur le territoire national.

En pratique, le CAI est vécu pour beaucoup comme une formalité administrative, parfois incomprise et suscitant la confusion. Mais surtout sa signature est un préalable à l’intégration. Le CAI devrait venir valider un parcours.

Sa portée est affaiblit également par ce que l’on nomme le « faisceau d’indice sociaux et professionnels ». Il y a un risque de maintien dans la précarité d’une population a priori fragile.

La question qui se pose alors est la suivante : sur quel base le motif de « défaut d’intégration » constaté par les services d’une Préfecture lors d’une demande d’octroie d’une carte de séjour peut être prononcé ? La pratique nous enseigne que le « faisceau d’indices » recoupe souvent les paramètres tels que la maîtrise de la langue, l’accès marché du travail, au logement, au respect des valeurs républicaines et de la loi. Certains paramètres nous paraissent évidents. Ils s’appuient sur la volonté de s’intégrer du requérant (notamment ceux liés au respect des valeurs républicaines) mais certains, comme l’accès à un logement, à un emploi dépendent de l’état du contexte économique et sociale. Ne nous pouvons pas en faire porter le seul préjudice à l’étranger.

La mobilité sur le marché du travail :

Les immigrés subissent un taux chômage dépassant les 20%. Or la 1ère des raisons est qu’une large partie du marché du travail (plus de 6 millions de postes) leur sont fermés. Lorsque l’on examine les modalités d’accès au marché du travail des primo arrivants on constate une surreprésentation dans les métiers dit sous tensions. Fort bien. Or on constate que le bilan de compétences mise en place dans le cadre du Contrat d’accueil et d’Intégration se conclut le plus souvent par une orientation vers ce type de secteur. Ne devons pas attendre un peu plus de cette mesure. En effet, l’impact potentiel du bilan sur le parcours professionnel du migrant est très limité. L’absence d’une réflexion sur les conditions de transferts des compétences acquises dans le pays d’origine et de simplification des procédures de reconnaissance des diplômes amenuise les possibilités de progression sur le plan professionnel.

Le regroupement familial

Parmi les 31 pays étudiés, la France a l’une des législations les plus restrictives. Or, nul ne peut contester que vivre en famille être un facteur d’intégration.

A l’aube d’une nouvelle présidentielle, il est urgent que ces questions soient traitées dans un climat apaisé. Nous attendons de la gauche qu’elle porte une véritable vision en la matière. Voici les principaux chantiers à mettre en place afin de ne changer le court des choses :

Organisation de la politique d’accueil et d’intégration

Effectuer un audit politique accueil afin de mesurer les effets de la RGPP et redéfinir des dispositions en matière de conditions d’entrées et de séjour, d’intégration dans une vision d’intérêt partagé.

Sécurisation des parcours de séjour

Il faut plaider pour la mise en place d’une carte de résident permanent au bout de 3 ans avec la signature du à l’issue. En effet, le CAI ne doit pas être pas un préalable à l’intégration mais s’inscrire dans un processus qui se construit dans le temps.

Protéger l’unité familiale

Il s’agit de procéder à la révision des procédures de regroupement familiale (trop longue, arbitraire, opaque, contre productif)

Renforcer la politique linguistique

Il faut abandonner les tests et module dans les pays d’origine qui sont dispendieux et inefficace afin de réorienter les moyens pour renforcer les dispositifs dans le pays d’accueil. il s’agit également d’augmenter les exigences du niveau requis (trop bas) afin de bénéficier d’une formation linguistique et abonner le seul objectif de maitrise de la langue à usage social.

En finir avec les discriminations légales

Il faudra ouvrir les discussions avec les partenaires sociaux sur le dossier des emplois publics non accessibles aux étrangers en limitant cette interdiction aux seuls secteurs stratégiques. Mais il faudra également ouvrir le débat pour la mise en place d’un fonds employeur pour les étrangers régularisé victimes de l’économie parallèle (financement de la formation notamment).

Répartition et mixité des territoires

L’intégration passe également par une meilleure répartition des étrangers notamment primo arrivants. Nous ne pouvons laisser se renforcer la ghettoïsation et le communautarisme. Le socle du vivre ensemble est la mixité sociale, territoriale, identitaire.. ;

Accorder la citoyenneté de résidence

L’argument que la France ne serait pas prête, que la montée du Front National ne sont plus d’actualité. Cet argument que cela avantagerait la gauche est erroné : les expériences électorales dans les pays européens, ayant accordé le droit de vote à leurs ressortissants étrangers montrent que leur vote se répartit sur l’ensemble de l’échiquier politique. Le droit de vote serait un signe de reconnaissance donné aux premières générations bien plus efficace que toute velléités de repentance sur je ne sais qu’elle traumatisme de l’histoire.


Commentaires

Logo de Jean-Luc Gonneau
vendredi 27 mai 2011 à 13h54 - par  Jean-Luc Gonneau

La défense de Dominique Strauss-Kahn n’est pas la position de la Gauche Cactus. nous n’vaons pas souhaiter "censurer" la phrase de Fatiha Mlati, car cela n’est pas dans nos habitudes. Pour une large majorité des Cactusiens, et indépendamment de la sinistre affaire newyorkaise, "DSK" ne nous paraissait pas un candidat de gauche. Notre ami et contributeur Gérard Bélorgey, préfet honoraire que nul ne saurait soupçonner de gauchisme échevelé l’a écrit dans nos colonnes voici quelques mois, et cette position été aussi défendue par notre rédactuer en chef João Silveirinho. Sur l’"affaire" proprement (si l’on peut dire) dite, nous avons choisi le silence : c’est le temps de l’enquête et de la justice, même s’il y aura sans doute à dire sur l’une et l’autre.

Logo de esse
vendredi 27 mai 2011 à 04h06 - par  esse

Vous dites continuer à soutenir DSK ? Je suis très surpris par votre position. En effet, vous en connaissez beaucoup des Rachid et des Mohamed (2 prénoms pris au hasard de ce qui m’est venu à l’esprit), qui après avoir été victime (par exemple) d’une bavure suite à un contrôle du faciès, dorment dans des prisons palaces ? On n’est donc pas sorti de l’auberge, si tous les progressistes n’ont pas encore compris que DSK n’était qu’un candidat de plus pour la droite. D’ailleurs s’il s’est fait hara kiri avant d’aller plus en avant sur le chemin de sa candidature, c’est peut-être grâce aux consciences de Blum et de Jaurès, qu’il ne pouvait trahir. Y’a t-il encore un socialiste en France digne de ces illustres prédécesseurs pour incarner le vent de l’espoir ? Là est toute la question pour le moment... Bien à vous.

Brèves

22 septembre 2011 - Manifeste contre le dépouillement de l’école

A lire voire signer sur http://ecole.depouillee.free.fr Nous, collectif contre le (...)

20 avril 2010 - NON AUX RETOURS FORCES VERS L’AFGHANISTAN

A la suite du démantèlement du camp principal de Calais, le 22 septembre dernier, où résidaient (...)

31 juillet 2009 - PETITION POUR L’HOPITAL PUBLIC, A SIGNER ET FAIRE SIGNER

la pétition de défense de l’hôpital public, à faire signer au plus grand nombre possible (...)
https://www.traditionrolex.com/18 https://www.traditionrolex.com/18