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CE MONDE QUE JE VAIS QUITTER

vendredi 8 novembre 2013
par  Jacques-Robert Simon
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Avant que de quitter ceux que j’aime, j’aimerais leur faire part de quelques constatations probablement banales, mais que je mis tant de temps à appréhender et à comprendre pleinement. Il s’agit rien de moins que de cerner comment les Hommes vivent ensemble et quels sont les processus qu’on leur propose pour vivre ensemble : un projet politique en quelque sorte, mais sans aucune prétention à guider les autres, juste les rendre conscient. Commençons par comprendre le système dans lequel nous vivons, moi et mes proches.

Qui décide en Europe, les élus ou d’autres ?

Prenez le temps de lire ces quelques lignes et souvenez-vous que la plupart des lois nationales ne sont que des transcriptions de directives européennes. La Commission européenne est, avec le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen, l’une des principales institutions de l’Union européenne. Elle est composée d’un commissaire par État membre, soit 28 commissaires. Les 28 commissaires sont choisis par les gouvernements des États membres et sont donc nommés pour cinq ans. La Commission agit indépendamment des gouvernements des États membres. La Commission est responsable devant le Parlement européen qui peut la censurer, mais exclusivement sur sa gestion et par un vote des deux tiers du Parlement, ce qui distingue ce « pouvoir de contrôle » de celui habituellement observable dans les régimes parlementaires. Elle partage les pouvoirs exécutif et législatif avec le Conseil des ministres.

Qui décide dans le monde, des élus ou d’autres ?

L’ensemble des moyens financiers et économiques qui permettent les échanges internationaux est hors de portée de toute maîtrise citoyenne. Les « banques », sous couvert de représenter le « marché », sont dirigées dans le seul but d’assurer un profit maximum à ceux qui en sont les possesseurs. Il est postulé, théoriquement donc, que la profusion de richesses créées « profitera » à tous. C’est en partie vrai pour les pays émergents, qui ont vu leur niveau de vie s’accroître considérablement par une gestion capitaliste de leur développement, même dans un pays communiste comme en Chine. Par essence, le développement capitaliste ne peut toutefois s’effectuer que dans un cadre inégalitaire : les « riches » décident, les pauvres exécutent. Lorsqu’on part du pire, cette démarche est historiquement efficace. Il en est tout autrement dans les pays dits développés : leur structure nationale leur a permis, il y a plusieurs siècles, de mettre en place une société plus proche d’un état de droit. Le capitalisme « mondialisé » revient à mettre à bas cette structure en engendrant des inégalités croissantes : l’écart entre riches et pauvres ne cesse de s’accroître afin de conforter le pouvoir des uns sur celui des autres. Le capitalisme mondialisé détruit objectivement les valeurs nationales. Cette destruction est même revendiquée car l’absence de Nations permettrait d’éviter les guerres. Nous avons la preuve de l’inverse chaque jour qui passe.

Les limites du despotisme éclairé

Personne ne peut vraiment contester que le citoyen du Monde a perdu toute maîtrise des décisions qui le concernent. Les hommes politiques des « démocraties » se livrent à des spectacles continuels pour être élus, ou pour rester au pouvoir. Ce serait leur faire injure de croire qu’ils n’assument pas pleinement et en pleine conscience cet état de fait : c’est donc qu’ils sont en accord avec le but poursuivi : modeler l’ensemble de la planète à l’image du plus puissant : les Etats-Unis. Il faut donc s’interroger sur le bien fondé de cette acceptation.

L’image des Etats-Unis est pour le moins floue. A côté d’un dynamisme et d’une efficacité remarquables, des pans entiers sont dans la plus totale obscurité. Chacun a en mémoire les exploits des spationautes, des chercheurs « nobelisés », des technologues capables de mettre sur le marché des produits très réellement révolutionnaires (réseaux sociaux, possibilité de tris, travail à distance rendu possible) … Remarquons toutefois qu’il n’est pas nécessaire d’être dans un tissu de démocratie du spectacle pour atteindre cette technicité : les savants de nos siècles passés firent mieux et plus complétement au sein de Républiques. Les savants soviétiques montrèrent autant d’inventivité au sein d’une société policière. Donc, il peut être conclu que l’émergence de ces nouvelles technologies n’est pas corrélée à une quelconque structure de société et encore moins à une capacité hors pair des investisseurs à capter et « aider » les innovations potentiellement « utiles ». Comment d’ailleurs le pourraient-ils puisqu’ils n’ont aucune capacité technologique ou scientifique pour le faire, la possession des capitaux ne le fournit qu’une compétence par délégation, par achat de services, procédé éminemment contestable quant à son efficacité pour prendre une décision correcte. Par contre, l’envahissement de la planète par des gadgets électroniques, quelquefois utiles, souvent dérisoires, se produit à une vitesse inégalée dans l’histoire de l’humanité. Cet envahissement permet à un impérialisme « doux », non directement sanguinaire, de s’installer dans les esprits, dans les âmes, dans les sociétés, dans les législations et règlements.

Eliminons donc résolument l’hypothèse qui propose que le « progrès » nécessite une mise en place sans alternative d’un hystéro-capitalisme, hypothèse tout bonnement farfelue. L’humanité dans sa globalité accepte-t-elle de prendre pour unique modèle le « citoyen » des Etats-Unis ? Définir un pays est une tâche bien ardue à moins que de recourir à une « image », certes caricaturale mais représentative de l’essentiel, c’est à dire de l’incontournable, de l’obligatoire, de l’indiscutable. L’image que l’on peut proposer est la suivante : Si vous voulez avoir du diabète avant 35 ans, que vos fils se droguent dans des ghettos séparant blancs, noirs, hispaniques, catholiques, protestants, arabes, juifs, tout en jouant aux jeux vidéos, que des drones exterminent la moitié de la population mondiale …. Si vous voulez encore que vos enfants ne lisent plus Dickens ou Molière mais préfèrent la dernière production de studios qui captent à l’envi tout ce que l’humain a de plus misérable. Si vous pensez que l’homme n’est plus capable de grandeur, alors laissez-vous aller à une citoyenneté globalisée.

L’Europe propose-t-elle une alternative ? Il est bien évident que l’imprégnation « culturelle » des Etats-Unis est prégnante dans la vie de tous les jours, comme dans les domaines politiques. Il suffit de voir l’accoutrement de jeunes avec le pantalon au milieu de leurs cuisses afin que leur allure puisse s’assimiler aux bagnards du nouveau monde dont on a enlevé la ceinture. Mais la compétition libre et non faussée n’est que la réplique au plus haut niveau des responsabilités européennes de ce comportement qui peut sembler affligeant. Cette compétition est encadrée jusque dans le moindre des détails par une quantité inédite de règlements, lois, décrets, directives etc, ce qui fait apparaître les pires moments de la bureaucratie bolchevique comme relativement anodins. La plus insolente et inefficaces des dictatures bureaucratiques ne peut pas être offerte à un quelconque être humain comme alternative à la dictature des marchés. Alors que faire ? Choisir l’essentiel.

Le nécessaire autre chose

Il n’est donc plus nécessaire de souligner les innombrables méfaits du capitalisme, qui a plus récemment évolué en hystéro-capitalisme tant la frénésie de jouissance immédiate et de domination a envahi tout son champ d’action ? Chacun sera probablement en accord avec le fait qu’il faut en finir avec la « paris-saint-germain-isation » de la planète : des capitaux de provenance quasi-divine servent à acheter tout ce qu’il faut pour être « grand » : les infrastructures certes, mais aussi les talents, voire les « génies ». L’investisseur, détenteur d’aucune espèce de qualité hors du commun, se contente de voir s’ébattre tous ces êtres d’exception dans un décor de rêve. La foule ébahie s’enthousiasme de la beauté de l’ensemble.

Chacun connaît la réponse des « bien-pensants » à cette critique : le capitalisme est le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres. Mais mettre un terme à ce système, cette nécessité absolue « d’autre chose » est liée à la survie même de l’espèce humaine, non seulement dans ce qu’elle a de grand, mais dans son existence même. Les réserves de pétrole, de charbon, d’uranium … en fait toutes les réserves de quelque sorte que ce soit, sont étonnamment peu ou pas connues du grand public. Elles servent en effet à « asseoir » des emprunts. Dans les mains dans lesquelles elles se trouvent, il ne faut donc pas espérer une quelconque estimation d’ordre scientifique. Il est cependant certain que, dans une cinquantaine d’années environ, de très sérieux problèmes d’approvisionnement en matières premières et des difficultés insurmontables de répartition vont apparaître. Les tensions ne peuvent que conduire à des phénomènes guerriers à l’échelle de la planète. Des démocraties du spectacle auront beau être installées partout pour gommer les différences en remplaçant toutes les autres formes de gouvernement, rien n’y fera : la destruction est en marche. Il nous reste donc un demi-siècle à vivre. C’est beaucoup pour un spéculateur, c’est peu pour les autres.

Le cadre est donné : à la suite d’une course effrénée vers un productivisme sans buts doit succéder, va succéder, la recherche de la qualité, de la proximité, de la sobriété qui n’est en aucun cas l’austérité. Après le « consommer de plus en plus n’importe quoi dans n’importe quelles conditions », va venir le choix et la réinstauration du libre arbitre. Ce qui rend cette proposition crédible, ce n’est pas son côté idylliquement rêveur, c’est l’absence d’alternative. Le productivisme doit produire plus, il doit donc produire beaucoup, il doit donc vendre beaucoup, il doit donc étendre ses marchés, il doit donc se mondialiser, devenir monstrueux … Les limites finies de notre Terre conduisent inévitablement soit à sa mort, soit à la nôtre. Les propositions qui permettent la vie sont finalement assez faciles à énoncer. Toutes prennent le contrepied des mesures préconisées par l’ensemble des classes politiques : relancer la croissance, être plus compétitif, privatiser les forces de production, libéraliser les mœurs …

En fait, il faut faire exactement l’inverse. Est-il nécessaire de continuer : la restauration de la Raison implique l’abandon des slogans, il ne s’agit plus de flatter, il faut agir. Jamais dans l’histoire de l’humanité des paroles lénifiantes n’ont pu permettre la conduite d’un pays loin des abîmes où les pulsions élémentaires le faisaient sombrer. Le dogme instillé dans tous les esprits de « La concurrence libre et non faussée » ne doit plus fournir l’axe directeur de toute politique. L’idée sous jacente était probablement de permettre à des sociétés ankylosées par l’abondance, très injustement répartie cependant, d’avoir le dynamisme nécessaire à leur survie. Mais si le dynamisme reste indispensable, il doit s’orienter vers le peu de qualité, plutôt que le beaucoup de n’importe quoi. Ce changement de paradigme, cette nouvelle façon de faire ne peuvent même pas être envisagés par un capitalisme hystérique. Les plus grandes réalisations, les plus importantes mutations n’ont jamais été faites dans ce cadre ! La concurrence n’est-elle pas le cache sexe de l’animalité ? Sont-ce les instincts qui vont nous conduire vers une consommation réfléchie ? A-t-on vraiment besoin de prôner la compétition, qui se fait obligatoirement au détriment de la solidarité ? L’absolue nécessité de citoyens libres et responsables est-elle compatible alors que l’on fait appel au caractère retors de l’espèce humaine ?

Parmi le recueil d’antiennes productivistes, la préconisation de la rapidité est omniprésente, sans que l’on définisse d’ailleurs ce que l’on souhaite faire du temps ainsi gagné. Alors que tout au contraire, il faut ralentir la vie, pour pouvoir penser, pour pouvoir panser. Avec qui entamer cette révolution, puisqu’il s’agit effectivement d’une révolution débarrassée toutefois de ses aspects sanguinaires ou même contraignants car rien ne se fera sans l’aval et le consentement des gens. Par essence, les partis politiques se livrent à un spectacle pour convaincre (ou attirer) des électeurs. Ceux-ci leur permettront ensuite d’avoir accès au « pouvoir ». Le pouvoir réel est toutefois bien loin des urnes comme nous l’avons montré. Malgré tout, une fraction significative des militants et des responsables souhaite réellement influer dans un sens positif sur l’avenir des gens. Et c’est ce qui peut les rassembler : l’essentiel.

Peut-on cerner « l’essentiel » ? Vivre ou mourir, tout simplement. Vivre avec ses enfants, la nature, la liberté, la non-soumission à la dictature, le droit de penser, le droit d’être différent, le droit d’aimer les autres, le droit de ne pas consommer frénétiquement, le droit de ne pas exterminer des populations, le droit d’offrir à tous un futur, le droit d’admirer des gens désintéressés, le droit de ne pas succomber aux délires du spectacle, de la communication, le droit d’être vrai, d’être sincère … le droit de rester un homme. Dans cet esprit chacun a une place, l’action nécessaire ne peut être liée à un clan, un parti, une fraction religieuse, une sagesse particulière, une Nation, un continent : elle doit s’adresser à tous les hommes qui, par le passé et le présent, tentent de rester debout. Chaque philosophe, chaque militant, chaque penseur, chaque acteur de la vie, a tenté, tente, de se débarrasser de l’immédiat pour proposer un futur. Recherchons-le avec eux : chacun a une pierre à apporter.


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