De la nécessité de la désinformation et du mensonge dans le cadre de la construction européenne et particulièrement du traité européen ayant valeur de constitution
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De la nécessité de la désinformation et du mensonge dans le cadre de la construction européenne et particulièrement du traité européen ayant valeur de constitution
Par Jean-Marie Berniolles
R M Jennar dans son livre « Europe, la trahison des élites », citait Paul Bourdieu qui dans une conférence abordait ce thème du mensonge lié à la construction européenne : « L’Europe ne dit pas ce qu’elle fait,.... Elle dit ce qu’elle ne fait pas, Elle ne fait pas ce qu’elle dit... » Ainsi le mensonge était associé étroitement à la construction dite européenne. Il y a donc une certaine naïveté à découvrir maintenant, au dernier stade de l’installation institutionnelle de ce système souvent décrit comme néolibéral, mais qui à la vérité est mieux décrit par le terme « ultralibéralisme », - parce qu’il ne s’agit plus seulement de dogmes du domaine de la politique économique et de l’économie, mais de la mise en place d’un système complet et institutionnalisé, de nature profondément antidémocratique et inhumain- , que les hommes politiques, la presse, les médias en général, mentent. Le mensonge fondamental et énorme est évidemment de présenter ce traité constitutionnel comme une avancée de la construction européenne incluant une vision sociale et donnant les armes à l’Europe, c’est le cas de le dire puisqu’il y figure explicitement un renforcement du potentiel militaire, pour lutter dans le cadre d’une globalisation de l’économie et de ce l’on nomme la « mondialisation ». Certains, qui possèdent un sens de l’humour très britannique, vont jusqu’à dire que cela permettra de s’opposer aux américains. A la vérité c’est la touche finale de la mise en place de ce système ultralibéral dont la conception de la part d’une « élite » constituée par des personnes à la confluence des milieux d’affaires et bancaires et de la politique, ainsi que l’ébauche, remontent au milieu des années 80. Sa mise en œuvre se situant au début des années 90, du moins en France, comme le suggère une interview, datant de 1999 et figurant dans un document UNESCO, du célèbre économiste J Tobin. La question est donc de savoir pourquoi le mensonge est-il consubstantiel de l’ultralibéralisme ?D’un simple point de vue psychologique le mensonge est souvent associé à une fuite en avant au caractère un peu aveugle. C’est exactement ça. Les responsables et hommes politiques en place considèrent que le système ultralibéral est déjà très engagé et que son développement a un caractère inéluctable. C’est le sens de leur discours sur le fait que l’approbation du projet de constitution est obligatoire et que les choses suivraient leur cours malgré un NON au référendum en France. De fait les mouvements de capitaux, y compris illégaux, les délocalisations de fabrication, les rachats d’entreprise à l’étranger et les spéculations sur le marché des matières premières, n’ont pas attendu la ratification du traité constitutionnel. Et l’appareil d’Etat est déjà bien endommagé. Ainsi les hommes politiques, obsédés par la nécessité de se placer dans les instances dirigeantes de ce nouveau système, de faire partie de la nouvelle « élite », lancent les Etats et leurs peuples, dans cette fuite en avant. C’est effectivement une grande fuite en avant, comme le souligne par exemple le caractère anarchique et hétéroclite des nouveaux élargissements, faits, en cours et projetés.
L’ultralibéralisme a déjà fait ses preuves. Sa nocivité générale et son incapacité à régler les problèmes de la société et de l’humanité : chômage, destruction de l’environnement, garanties sociales, recherche indépendante, ont déjà été largement démontrées. Mais la question principale est : que cherche t on à cacher ? La première réponse concerne le bilan de ce système comme cela a été évoqué plus haut. *La croissance bloquée par le passage à l’euro qui a occasionné une baisse immédiate du pouvoir d’achat et la montée du chômage, due aux délocalisations, suppressions d’activités jugées trop peu rentables, sont déjà identifiées au système ultralibéral. *On connaît moins l’effet très néfaste, au niveau économique, de l’action d’une BCE indépendante et uniquement missionnée pour stabiliser les prix. *En France les dommages déjà occasionnés à l’appareil d’Etat, par les dénationalisations, l’ouverture au marché concurrentiel de services publics, dont on utilise d’ailleurs sans vergogne l’infrastructure pour cette opération de hold up qu’est la création artificielle de concurrents, le manque de programmes nationaux de recherche ainsi que le financement de celle-ci, sont déjà si importants qu’ils entrent implicitement dans les arguments des partisans de l’adoption de la constitution lorsqu’il disent que l’engagement dit « européen » est irréversible. *Le rôle de Mme Voynet, de Cohn Bendit, est aussi fondamental dans l’opération qui consiste, sur la base de quelques articles généraux du projet de constitution et de directives qui imposent l’installation d’éoliennes en France, à faire croire que les institutions européennes en charge, de manière partagée, de l’environnement vont, demain, promouvoir une politique de protection de l’environnement. Mais, aujourd’hui si les sols cultivables ne sont plus que des supports à produits chimiques et si l’introduction des OGM américains en Europe a été recommandée très tôt, par la commission de Bruxelles et Pascal Lamy socialiste français en particulier, c’est à cause de la surproductivité exigée par la politique agricole commune et, demain, par l’éventuelle future constitution. Toutes les marées noires, pollution visible et palpable par quelques privilégiés ayant résisté aux nitrates des élevages porcins mais dont on ne connaît jamais la composition chimique et le taux de toxicité, proviennent d’opérations montées depuis les paradis fiscaux. Qui ne sont évidemment pas du tout inquiétés par le traité constitutionnel actuel. On sait également ce que signifie l’augmentation de la compétitivité des entreprises du point de vue des risques environnementaux lorsque, comme c’est le cas aujourd’hui, les règles et le contrôle de l’industrie chimique par exemple sont si laxistes. Alors on ne peut qu’être d’accord avec R M Jennar, il s’agit bien de trahison. La deuxième réside dans les perspectives radieuses qu’offrirait l’institutionnalisation de l’ultralibéralisme. *Le ton est donné dans une partie du texte de la constitution relatif à l’emploi. « La politique sociale économique » est décrite comme amenant des conditions qui « tendent vers le plein emploi ». On connaît le principe de l’asymptote - ici le plein emploi -, la courbe de l’emploi la rejoint à l’infini. En parodiant Wood Allen, grand connaisseur de la politique française, on dira que l’infini c’est très loin, surtout sur la fin ! *Il est évident que les déficits actuels de l’assurance maladie 13 milliards d’€ et de l’assurance chômage 13 milliards également, avec un pacte de stabilité que la France et l’Allemagne aussi d’ailleurs ne peuvent tenir, seraient mortels pour ces régimes. La désindustrialisation et les délocalisations d’entreprises en aggraveraient la situation financière. Dans l’état actuel on ne voit que la taxation des mouvements de capitaux pour assurer des rentrées au volet social de notre société. * Mais il y a une chose qui n’est pas assez soulignée à propos de ce développement ultralibéral de l’« Europe », c’est qu’il n’y a aucune vision à long terme et qu’à force de manipuler et d’occulter les vraies données les responsables politiques, mais aussi la commission de Bruxelles elle-même, prennent des décisions qui sont complètement en dehors des réalités dans d’importants domaines. Le premier exemple qui concerne les responsables politiques des Etats membre de la zone Euro est tout de même incroyable. A peine les chefs des Etats français et allemand, et d’autres, avaient-ils signé un pacte de stabilité à 3% que l’on s’est aperçu que ces grands Etats étaient incapables de le tenir et de loin puisque des pourcentages réalistes se situaient plutôt à plus de 4% de déficit. Ce déficit n’est tout de même pas une petite donnée économique et l’implication de sa valeur sur la politique sociale notamment est de première importance. D’ailleurs les évaluations sur la croissance ont ainsi été largement surestimées. Bien des directives de la commission de Bruxelles sont inapplicables dans la pratique. Notamment dans le domaine de l’énergie, future compétence partagée de l’Europe et des Etats membres avec la prééminence de l’Europe Article I-12.2 où, par exemple, la commission voudrait imposer que chaque Etat exporte systématiquement au moins 10% de sa production électrique alors que ni les productions nationales, ni le réseau européen d’interconnexion ne sont prêts. Justement ce domaine de l’énergie illustre bien combien l’ultralibéralisme est incapable de faire face aux défis qui vont être posé à l’humanité à très court terme. Tout d’abord, la mise en œuvre de pratiques politiques et économiques de nature ultralibérales a liquidé la planification. Or s’il est un domaine où la planification est obligatoire c’est bien celui de l’énergie. Des inerties de plusieurs dizaines d’années sont courantes au niveau de la mise en œuvre industrielle d’une nouvelle technologie de production d’énergie : pile à combustible, nouvelle technique nucléaire à fission et encore plus si l’on veut avoir recours à la fusion contrôlée. Un peu moins pour les énergies renouvelables, mais celles-ci ne peuvent être utilisées en production de base et ne sauraient constituer qu’un pourcentage limité de la production globale. L’hydrogène, combustible du futur doit être produit industriellement. Le nucléaire à gaz caloporteur est la voie qui s’impose, notamment pour des questions de moindre pollution. Là, même si des études du passé peuvent servir, tout reste à concevoir. L’ultralibéralisme tue la planification et conduit à une exploitation sauvage des ressources naturelles et à leur épuisement incontrôlé. Total, grand industriel du gaz et du pétrole, devrait compléter sa publicité sur le bien être qu’il amène dans les foyers avec son gaz naturel, par la formule : dépêchez vous il n’y en a plus que pour dix ans ! Mais par son implication dans le fonctionnement de l’industrie et de la société, le pétrole constitue LE PROBLEME. A ce niveau les données sur les réserves exploitables réelles dans le monde ont été déjà tellement manipulées, par les pays producteurs eux-mêmes d’abord, puis par les compagnies pétrolières, les économistes, les politiques, que l’on a du mal à savoir où l’on en est. La « donnée » la plus courante à ce sujet est qu’il y en a encore pour trente ou quarante ans. Des chercheurs se sont penchés sur la question et ont développé des méthodes d’évaluation de ce qui a déjà été consommé et de ce qui reste à exploiter, notamment en tentant de situer dans le temps le pic de Hubbert qui marque que la moitié des réserves ont déjà été consommées et le moment où la production décroît inexorablement. Sur la base de leurs travaux on peut avancer les éléments suivants : depuis 1980 environ, la consommation de pétrole puise globalement dans les réserves, au rythme actuel, en pleine augmentation, de 20 milliards de barils par an. Les réserves prouvées étaient, en 2000, d’un peu plus de mille milliards de barils. Aux Etats Unis ce pic de Hubbert a été atteint vers 1971 conformément aux prédictions de Hubert lui-même. Compte tenu de l’évolution de la production au moyen orient, il semble que cela amène le pic de Hubbert planétaire vers 2008 ! C’est donc la date où se produira non pas un choc pétrolier, mais une déflagration. On peut comprendre dans ces conditions que raisonnant en terme de sacro saint marché, des économistes prédisent un énorme marché pour la pile à combustible vers 2010. Voila une échéance qui devrait tout de même plus préoccuper nos gouvernants que la présidentielle de 2007 !! Alors comment le système libéral aujourd’hui et ultralibéral demain prévoit-il de faire face à ce problème ? Quand on n’a pas de pétrole on a des idées disait-on au moment du choc pétrolier des années 70. Alors oui il y a des idées qui ne sont que du papier puisque pour les mettre en œuvre il faut souvent des dizaines d’années. C’est là où l’absence de vision à moyen et long terme et donc de planification, prive ce système des marchés sacralisés de toute capacité réelle à relever l’immense défi énergétique qui se profile. Dans ces conditions il ne faut plus seulement mentir mais cacher la situation au grand public. Et chez nos gouvernants il y a plus qu’un mensonge, une certaine forme d’inconscience élitiste. Conclusion : Le mensonge est donc un élément obligatoire de la pratique ultralibérale. On a vu qu’il appartenait aussi à une certaine forme de fuite en avant et qu’il participait également d’une inconscience que l’on peut qualifier d’élitiste, parce que la personne pense qu’elle et ses proches seront épargnés par les conséquences prévisibles de la mise en œuvre d’un ultralibéralisme sans contrôle et sans freins. On a aussi pu plaisanter sur le fait que les partisans du OUI ne semblaient pas avoir lu le projet de constitution, y compris VGE. Pour des hommes politiques comme B Delanoé on est sûr qu’ils ne sont pas allés au-delà de la première partie Titre I. Mme Voynet et Cohn Bendit n’ont lu que l’article II-97. N Sarkozy ne l’a pas lue mais pense qu’un article prévoit que le président doit démissionner si le NON l’emporte. Les partisans du NON se font ainsi traiter d’« imbéciles » pour s’être « tapés » les 448 articles ... et n’avoir rien compris ! Si l’ultralibéralisme parvenait à s’exercer dans le contexte de ce traité constitutionnel ratifié, on peut imaginer les conséquences désastreuses qu’il créerait rapidement, au moins pour la société européenne. Mais personne n’est mieux placé qu’un partisan du OUI, J-C Ruffin député UDF, médecin et écrivain de talent, plein d’humour, pour décrire l’état d’un monde après qu’il ait été frappé par la mondialisation et l’ultralibéralisme. C’est ce qu’il a fait dans son livre fiction « Globalia ». On y voit ainsi des zones aseptisées et sécurisée, bien pourvues en énergie, où vivent des gens privilégiés qui ont accès aux meilleurs soins de santé et d’esthétique, bien logés et informés par des médias à l’interactivité individuelle qui sont uniquement mobilisés pour les désinformer et les manipuler, tandis que le reste du monde dévasté, pourri et pollué est constitué de non zones aux matières premières épuisées où survivent, en bandes qui se combattent, des sous humains dépenaillés. Reste du système des marchés, des interfaces entre les deux types de zones assurent les nécessaires échanges de marchandises, dont la drogue évidemment. Les capitaux eux se sont visiblement accumulés du même côté. Enfin le monde des élus est dirigé par une élite qui maintient autour d’elle le mystère et est indépendante des hommes politiques qui ne sont que des pantins. Ce n’est qu’une fiction !!
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