https://www.traditionrolex.com/18 MONICA CUNHA : UN CD ET UN CONCERT ! - La Gauche Cactus

MONICA CUNHA : UN CD ET UN CONCERT !

jeudi 5 mai 2016
par  Jean-Luc Gonneau
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Voila 7 ans que Monica Cunha est arrivée à Paris, jeune étudiante du programme européen Erasmus. L’étudiante est devenue une toute récente trentenaire, enseignante à l’Université et s’est imposée comme une des toutes meilleures interprètes de fado se produisant en France. Et pourtant, alors que ses quasi contemporaines (Jenyfer Rainho, Claudia Costa, Shina, Andreia Filipa…) éditaient un, voire deux, CD, sans même parler de ses ainées Conceição Guadalupe et Julia Silva (chacune 5 CD de fado en une quinzaine d’années de carrière), de CD de Monica, point.

Pourquoi si tard, ou si tôt peut-être ? Monica Cunha sourit : « Je préfère pourquoi si tard !en fait, je ne me sentais pas prête, j’avais peur de décevoir, de me décevoir aussi. Peut-être un peu de paresse, quoique que voilà quatre ans que l’idée était dans l’air. C’est Casimiro Silva (pilier du fado parisien, guitariste - viola do fado – et chanteur) qui me poussait. Avec lui et Filipe De Sousa (guitare portugaise) nous enregistrions chacun nos parties séparément sur un fado de temps à autre, et Filipe faisait le mixage. Techniquement, cela me semblait très bien. Et pourtant, je n’étais pas vraiment satisfaite. C’est un client d’un restaurant où je me produisais qui a produit un déclic. Si tu attends de faire le disque parfait, tu ne le feras jamais. Tu dois enregistrer ce que tu es en tant qu’artiste aujourd’hui. Si tu ne le fais pas, tu le regretteras. Alors, nous avons laissé tomber tout ce matériel sonore et avons décidé d’enregistrer ensemble, à partir de l’été 2015. C’est plus improvisé, peut-être techniquement moins parfait, mais tellement plus vivant ».

Quelques mots sur le titre et le contenu ? « J‘ai toujours perçu le fado comme un ensemble de couleurs. C’est vrai de toutes les musiques, peut-être, mais le fado a les siennes, bien particulières, des couleurs sombres et d’autres vives. C’est ce que j’essaie de traduire dans ce disque, avec Casimiro et Filipe, avec qui se sont construites amitié et complicité durant ces sept années. Pour le répertoire, j’ai repris certains des premiers fados que j’ai chanté, le fado bacalhau, la Marcha de Alfama, et ajouté ceux qui me correspondent le mieux aujourd’hui, un fado Georginho, ou O meu destino, écrit par Casimiro. Il y aussi un autre fado de Casimiro, qu’il a écrit spécialement pour moi et qui me touche beaucoup. Quand nous avons eu fini d’enregistrer le répertoire prévu, j’ai eu envie d’ajouter quelque chose d’un peu différent. Il s’agit d’un thème où nous avons demandé à Rui Fernandes (l’époux à la ville de Monica, ndlr) de se joindre à nous aux percussions. Mais toujours dans un esprit fado. C’est aussi une façon d’ajouter des couleurs à la palette du fado et j’ai envie dans l’avenir d’explorer ces expériences-la. »

Et Lisbonne, car Monica est une des rares alfacinhas du monde du fado parisien ? « J’y vais aussi souvent que possible, au rythme des vacances universitaires. J’y serai d’ailleurs quelques jours avant le concert du 30 avril. J’y ai mes lieux de fado de prédilection, ou je chante dans des soirées de fado vadio. Curieusement, je me sens plus détendue quand je chante là-bas qu’ici. Ici, c’est peut-être bizarre, mais nous sommes un peu les ambassadeurs d’une partie de la culture portugaise. C’est une responsabilité, non ? »

Presque 22h près de la place de la Contrescarpe, haut lieu du Paris Historique. Une file d’amateurs un peu transis, car le printemps, en ce dernier jour d’avril, se fait attendre. Les portes du Théâtre de la Contrescarpe s’ouvrent enfin et le concert de Monica Cunha peut commencer, consacré au lancement de son premier CD, dont elle nous donnera une interprétation live intégrale.

A la guitare portugaise, Filipe De Sousa, à la viola, Casimiro Silva, aux percussions, pour certains fados ou marchas, Rui Fernandes. Introduction faisant la part belle aux guitares, passant du lent fado menor au rapide fado corrido. Puis une ode à Lisbonne (il en sera souvent question dans la soirée, Monica est alfacinha) et au Tage, qui ouvre un répertoire qui suit l’histoire de la rencontre entre Monica et le fado, commencée par l’écoute de la radio, de disques, puis la participation à des soirées de fado vadio, notamment dans son cher Alfama, auquel elle consacrera deux fados dans la soirée, puis ici, à Paris, guidée par Casimiro et Filipe. Deux fados écrits par Casimiro, dont un spécialement pour elle, feront partie du spectacle. Est-ce le fait de revivre tout cela dans sa tête, est-ce l’émotion de chanter en public, pour la première fois ? Toujours est-il que Monica a du mal, au début du concert, à dominer son émotion. Moment fugace, car bien vite, soutenue par ses musiciens, elle trouvera les chemins de la sérénité, mêlée d’un brin de fantaisie, qui lui est coutumière et qui pénétrera un public attentif et bienveillant, beaucoup des spectateurs qui emplissent ce soir la salle suivant depuis parfois longtemps Monica et n’« ayant pas voulu manquer ça ».

Monica chante des fados traditionnels (c’est le cas par exemple des musiques accompagnant les paroles écrites par Casimiro Silva, des fados musicados renommés, deux marchas, une pour Lisbonne, une pour Alfama. Et aussi une version rythmiquement enlevée, soutenue par les percussions de Rui Fernandes d’une chanson populaire folk fort connue : Quando eu era pequenina. Prémisse pour Monica d’une évolution possible vers d’autres formes musicales et de collaboration avec d’autres instruments en plus des indispensables guitares. En rappel, l’émotion initiale affleurant à nouveau, Monica chante, pour la première fois en public, un poème de sa composition, sur la musique du fado cravo : gros succès. « Dans mon prochain CD, nous confiera-t-elle, j’aimerais inclure deux ou trois textes de ma plume ». S’ils sont de la qualité de celui que nous avons entendu (et qui ne figure pas sur ce premier cd), nous avons hâte de les entendre. Et pour conclure le rappel, devinez quoi ? La marcha de Alfama, évidemment.

N’oublions pas, dans le succès de cette soirée, le rôle des musiciens, constamment à l’écoute de la chanteuse, un Rui Fernandes pertinent dans ses interventions, un Casimiro Silva solide dans la viola, assurant une rythmique sans faille, et, à la guitare portugaise, un Filipe De Sousa à la fois virtuose et accompagnateur attentif, qui nous offrira deux guitarradas superbes inspirées des variations du grand guitariste Armandinho, l’une bien connue (sur le fado mayer), l’autre moins (sur Ciganita).

(Article paru également dans Lusojornal, www.lusojornal.com)


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