C’est l’histoire de trois petits crocodiles qui avaient pour noms : Arnaud, Julien et Vincent. Au début, ils s’entendaient très bien, surtout Arnaud et Vincent. Julien était un peu plus âgé et jouait parfois dans la cour des grands ; il avait été le protégé du vieux père François, un crocodile puissant et célèbre, mort maintenant, mais dont le souvenir était encore bien présent et pesant dans le marigot de « Solférififi ».

C’est après un échec cuisant de tonton Lionel, un crocodile de la deuxième génération, que nos trois petits amis décidèrent de s’emparer de « Solférififi » et de repousser sur un marécage lointain le cousin François, François le Mol, qui avait bénéficié, contre toute attente, des bienfaits de tonton Lionel au moment où ce dernier avait été nommé chef de tous les marigots.

Très vite, Julien qui voulait tout régenter et dont l’ambition n’avait d’égale que celle d’Arnaud et de Vincent, décida de quitter ses deux complices pour rallier le camp de François le Mol qui lui promettait de multiples avantages (il avait très vite compris que la tentative de renverser François le Mol était illusoire car la plupart des crocodiles dominants avaient pris le parti de ce dernier). Arnaud et Vincent se connaissaient bien, ils avaient souvent voyagé ensemble, ces dernières années, dans les lacs les plus lointains. Chacun ambitionnait de prendre le dessus sur l’autre et seules les circonstances faisaient qu’ils s’étaient alliés et faisaient mine de bien s’entendre. La première bataille donna nettement l’avantage à François le Mol qui, pour récompenser Julien de son ralliement, lui donna le droit de parler au nom du marigot de « Solferififi » . Les deux petits crocodiles battus, Arnaud et Vincent, décidèrent de poursuivre leur lutte et de mieux s’organiser pour gagner la prochaine bataille. Ils trouvèrent de nouveaux alliés après la guerre du Técéeu perdue par françois le mol. Ils crurent que le moment était en fin arrivé de s’emparer de « Solferififi ». Les rôles étaient déjà attribués, chacun semblait y trouver son compte : la seconde bataille pouvait avoir lieu. Toutefois, en coulisse, Vincent qui avait mal vécu cette longue période éloigné de l’équipe gagnante, négociait son rapprochement , au nom de l’unité et de l’efficacité, avec François le Mol. Au soir du premier affrontement, la chose était entendue, Vincent regagnait enfin la douceur et le confort du marigot de « Solférififi » et Arnaud, pris de court et complètement dépassé par les événements se retrouvait presque seul sur la berge inhospitalière, avec pour compagnons Gérard et Marc, des crocodiles usés et sans influence. Déçu mais combatif, Arnaud fit mine de faire front et de poursuivre sa lutte solitaire au nom des grands principes. Toutefois, après avoir rencontré, seul à seul, François le Mol, il accepta de rentrer dans le rang à l’occasion de la signature du pacte d’alliance pour affronter le tournoi du nouveau quinquennat. Après des années de marginalisation dont il avait beaucoup souffert, Arnaud retrouvait enfin la chaleur du marigot familial et il éprouvait beaucoup de reconnaissance pour François le Mol et Ségo, la compagne de ce dernier.

Mais, déjà, la lutte était entamée, pour savoir qui allait être le champion désigné du tournoi pour le nouveau quinquennat. Les concurrents se déclaraient, les uns après les autres : Laurent le Chauve, Dominique le Lourd, Jack le Léger, Ségo la Mêle-Tout, et même tonton Lionel exprimait quelques prétentions ; quant à François le Mol, il n’excluait rien.

Julien, bien inspiré, prenait vite parti pour Ségo, en espérant tirer grand profit de ce choix précoce : son heure était peut-être enfin arrivée. C’est avec beaucoup de déplaisir qu’il apprit qu’Arnaud se rapprochait tendrement de dame Ségo et la paraît de toutes les qualités qu’il n’avait jamais soupçonné jusqu’ici et devenait, en définitive, l’un de ses partisans les plus fervents et inconditionnels. Apprenant ces ralliements, Vincent n’était pas en reste et, quelques jours plus tard, rompant avec ses compagnons, il déclarait à son tour, avec un peu de retard, sa flamme à la dame.

Ainsi, après bien des aventures, nos trois petits crocodiles se retrouvaient, de nouveau, dans le même camp et allaient former, pour le meilleur et pour le pire, les Triplés de Royal.

Claude Soufflet, membre du PS jusqu’en 2003, est l’un des animateurs du Collectif Unitaire de Montauban