UN GNOME DE POUVOIR
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Mon inculture proverbiale fait que je consulte très souvent les dictionnaires pour éviter tout contresens. Je fais figurer dès le début de mon article les définitions que j’ai trouvées. Le texte devrait ainsi éviter toute ambiguïté. L’historiette qui suivra, il est important de le noter, se passe en des temps sans aucun rapport avec le nôtre.
Gnome. Mot inventé par Paracelse. Ce nom est donné à des nains difformes et surnaturels qui, d’après les cabalistes juifs, habitent le sein de la terre, où ils gardent des trésors. (Nouveau Petit Larousse illustré, Direction : C. Augé, P. Augé, Librairie Larousse, Paris 1938) Cabaliste. Philosophe versé dans la cabale. Cabale ou Kabbale. Tradition juive donnant une interprétation mystique et allégorique de l’Ancien Testament. Paracelse. Alchimiste et médecin suisse, né à Einsiedeln (1493-1541).. Il est le père de la médecine hermétique Hermétique (d’Hermès). Alchimie qui a rapport au « grand oeuvre », à la transmutation des métaux et à la médecine universelle.
Nombrilus, c’est le nom de notre gnome, se dévouait pour réaliser le rêve des alchimistes : être toujours riche, toujours jeune et ne jamais mourir. Être riche, il avait réussi à le devenir à sa façon. Il savait que le pouvoir permet de se lier aux puissants, surtout si on défend avec habileté leurs intérêts. Il ne craignait donc pas des temps difficiles, ni pour lui, ni pour ses proches. Mais il savait être raisonnable : habiter à l’écart des démunis et satisfaire ses besoins naturels et nécessaires lui suffisaient.
Être toujours jeune, il s’y efforçait de mille façons par des courses effrénées en tous sens, une activité vibrionnante, des déclarations fougueuses. Cependant, il ne pouvait s’empêcher d’envier Apollonios, surtout à la sortie du bain. Son moyen pour ne jamais mourir, c’était de devenir célèbre et craint. La puissance lui donnerait l’immortalité.
Sa grande œuvre était de rendre visible ce qui était caché. De fait, les dangers qui guettaient les nantis étaient si nombreux et pervers que ses semblables ne s’en rendaient plus compte. Il s’employait à leur éveil par maintes actions d’éclat et par tous les moyens à sa disposition. Ses amis ayant des talents lyriques étaient mis à contribution (bien qu’ils rechignassent quelquefois à donner leur obole et préférassent l’exil à la ruine). Des philosophes que l’on décrivait talentueux, avec un savoir faire dialectique indéniable, mettaient à sa disposition leur verbe et leur plume. Ce n’était toutefois pas suffisant pour déjouer les multiples cabales qui se nouaient pour le terrasser. Mais il savait transmuter toutes ses énergies négatives pour faire apparaître l’or qu’elles recelaient.
Nombrilus aimait également les éducateurs, les maîtres et il ne cachait pas sa profonde aversion pour les responsables de la misère qu’il constatait chez eux à quelques mois de la réunion sur l’agora qui déciderait du sort de son peuple. Il faisait appel aux sages reconnus, dont pourtant il n’avait appliqué aucun des enseignements, pour trouver les sources d’inspiration afin de guider les ruptures profondes qu’il jugeait indispensables.
Nombrilus avait également trouvé des remèdes universels pour soigner les riches en ne soignant pas les pauvres. Nombrilus gardait, bien entendu, des trésors innombrables et bien cachés. Toutefois, le plus grand de tous était objectivement sa propre personne. Si seulement Zeus se pliait à sa volonté, avec son aide tout serait possible, même le pire.
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