Les CHRONIQUES NARQUOISES et autres de Jacques Franck (décembre 2013)
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La prostitution est une des formes les plus anciennes de l’exploitation directe de la femme.. Longtemps considérée comme un mal nécessaire à la société, le remède à la misère sexuelle des hommes, la prostituée revêtait en France un aspect folklorique. Elle faisait l’objet d’un mélange de compassion, de ricanement et de mépris. Son souteneur offrait dans la littérature et dans l’opinion l’image d’un personnage à la fois brutal et tendre, un fort, un "gagneur", l’archétype du dominant. Et un paresseux. On évoquait la pauvre fille sur le trottoir et le maquereau, dans le bistro, la surveillant en jouant aux cartes avec ses pairs. On chantait "Prosper" et "Nini peau d’chien", on lisait les livres de Francis Carco et Pierre Mac Orlan. Trois éléments ont changé la donne.
La mondialisation capitaliste s’est substituée à l’artisanat, dès lors que des sommes d’argent considérables sont en jeu. Quand le trafic du sexe atteint le niveau du trafic de la drogue ou des armes, il entre dans le "marché", nouvelle forme du sacré. Les dogmes de l’ultra-libéralisme exigent la rentabilité de toutes activités, au profit des groupes financiers. Il ne peut pas en être autrement. Avec, comme bras séculiers, la mise en place des organisations criminelles internationales, des réseaux mafieux. On est loin du "Julot casse-croûte" du boulevard Rochechouart.
La dégradation sociale des anciens pays du bloc soviétique a jeté sur le marché des milliers de jeunes femmes attirées par le mythe de la vie occidentale. Les filières spécialisées alimentent nos villes en nouvelles esclaves venues d’Ukraine, de Slovaquie, du Kossovo, de Russie… Leurs "protecteurs" ne badinent pas avec l’amour : torture et assassinat sont méthodes courantes de "maintien de l’ordre".
La pauvreté accrue de l’Afrique a joué un rôle similaire. Nombre de jeunes femmes issues des anciennes colonies, fuyant la misère pour en rencontrer une autre, se retrouvent sur les trottoirs ou dans les boîtes de Paris, Anvers, Hambourg.
Les prostituées sont redevenues des esclaves, aux mains des chiens de garde du capital. Les communistes ne peuvent ignorer cette exploitation. La défense de leurs droits (elles n’en ont guère), de leur dignité toujours bafouée et de leur sécurité, sans cesse menacée, leur incombe. Les pétitions des snobs et des bobos ("Touche pas à ma pute !") escamotent les vrais problèmes. La répression et la stigmatisation des prostituées et de leurs clients ne peuvent rien résoudre. Seuls le démantèlement et l’éradication, aux plus hauts niveaux internationaux, des organisations criminelles permettront d’apporter une réponse à un problème qui n’est pas moral mais politique et économique. Et qui recouvre des intérêts probablement insoupçonnés. Tout en sachant que la prostitution ne disparaîtra qu’avec une transformation profonde de la société.
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