Un conte de Pentecôte

En ce beau dimanche de Pentecôte, le Chanoine-président réunit ses apôtres, les salua non sans condescendance et leur parla : "Mes chers frères, mes chères sœurs, vous allez m’écouter avec le respect affectueux qui m’est dû. L’idolâtrie n’est pas obligatoire, mais elle serait appréciée. Je veux ne voir qu’une seule tête, je veux entendre voler une mouche ! Garde à vous !"

Il marqua une pause et compta les présents. Derrière le premier apôtre François s’alignaient impeccablement Jean-Louis, apôtre du développement durable (personne ne savait exactement ce que ça veut dire, mais ça ne mange pas de pain), Rachida, apôtre judiciaire et répressive, Bernard, apôtre de la diplomatie et des retournements de vestes, Brice, apôtre des rétentions et des expulsions, Michelle, apôtre de la police, Xavier 1, apôtre du chômage, Xavier 2, apôtre pourfendeur de l’Education Nationale, Christine, apôtre des caisses vides, Fadela, apôtre pourfendeuse de la glandouille, Hervé, apôtre des sabres de bois, Rama, apôtre de la servilité envers son maître (titre dont elle n’avait pas l’exclusivité).

On fit entrer Madame Carla et sa maman, Messieurs PPDA et Pujadas et, évidemment, les reporters de Paris-Match. Le Chanoine-président se racla la gorge, cracha par terre, et tint ce discours : "Le Saint-Esprit parle par ma voix. Voici mes préceptes :
 Les riches sont le sel de la Terre. Confortez les dans leur richesse. Interdiction de les faire payer.
 Les pauvres doivent le rester. Enfoncez-les dans leur pauvreté. Ceux qui travaillent doivent travailler plus pour gagner moins. Ceux qui n’ont pas d’emploi seront punis. Ceux qui refusent d’aller à Pondichéry n’auront plus le droit au moindre revenu.
 La retraite est une incitation à la paresse. Interdisez la jusqu’à l’âge de soixante-quinze ans.
 La maladie est une offense à Dieu. Ne l’encouragez pas. Les médicaments, instruments de Satan, ne seront plus remboursés, sauf pour les riches, bénis soient-ils.
 La paix n’est pas le but d’un pays civilisé. Envoyez des soldats en Afghanistan, en Irak, et partout où nos grands alliés d’Amérique l’exigeront. Obéissez leur en toutes choses.
 Nul n’aura le droit de contester mes propos et mes actes à moi, Saint-Esprit, élu à 53% des voix ! J’ai dit. Ite missa est."

Le Chanoine-président et Saint-Esprit ouvrit un rideau et le miracle de la Pentecôte éclata aux yeux de tous. Les deux autres personnages de la Sainte Trinité apparurent dans leur splendeur : Madame Laurence Parisot et Monsieur George.W. Bush.

Les compétences

Le grand Maître de l’Education Nationale, Monsieur Xavier – une intelligence – a déclaré le 17 avril que les lycéens – des petits cons – se trompaient. La suppression des enseignants – des bons à rien – ne changerait pas grand-chose à la qualité de l’enseignement. A la limite, moins il y en aurait, mieux ça marcherait.

Madame Rachida, celle qui garde les Sceaux de la France, supprime les tribunaux, afin que la Justice soit enfin rendue. Monsieur Hervé (Morin), dont personne ne sait qu’il est le grand Chef des Armées après Dieu (le chanoine), va renforcer la défense du pays en fermant les casernes et autres bases militaires et en renvoyant soldats et officiers à l’ANPE. Quelques Rafale et sous-marins lanceurs d’engin suffiront à établir notre prestige. Madame Roselyne, qui veille sur nos santés, obéissant aux instances supérieures (toujours Dieu), s’apprête à déstructurer le maillage hospitalier français : nos compatriotes seront enfin bien soignés.

Dans cette logique, je conclus que l’abolition de Monsieur Nicolas serait bénéfique à la République.

Le philanthrope et le démocrate

Monsieur Monsanto est un philanthrope connu. Ce modeste marchand de grains se flatte de posséder une clientèle étendue. D’autant plus qu’il sait, par la force de sa persuasion, ramener ses concurrents à de justes limites. Il a aussi un penchant pour la chimie. On lui doit notamment nombre d’herbicides et de défoliants, dont le fameux "agent orange" ou dioxine, qui permit aux pacificateurs américains de détruire les forêts vietnamiennes et les gens qui s’y trouvaient. Comme c’était des Rouges, il n’y avait pas grand mal.

On doit aussi à Monsieur Monsanto la transformation génétique d’organismes vivants tels que le maïs. Toute peine mérite récompense : Monsieur Monsanto, grâce à ce brillant subterfuge biologique, gagna une part importante sur le marché agro-alimentaire mondial. Rien n’est parfait : il semblerait que cette manipulation présente des inconvénients majeurs pour la santé des consommateurs, et un risque de contamination pour les autres cultures. Mais on ne peut pas tout avoir.

L’Assemblée Nationale française eut à décider de l’opportunité de généraliser la production de ces organismes génétiquement modifiés. Sur proposition du député Chassaigne (un Rouge, lui aussi), elle émit un vote négatif. "Nom de Dieu !, s’écria Monsieur Nicolas, le chanoine omnipotent, Nom de Dieu ! Ils ont osé !" Il ordonna immédiatement à son premier couteau d’annuler ce résultat et de faire voter à nouveau les députés. Le démocrate ne savait rien refuser au philanthrope.