LE Oui et le non-dit
par
popularité : 6%
LE Oui et le non-dit
Par Jean-Luc Gonneau
Dans le débat sur le TCE, nous avons souvent reproché aux partisans du Oui, et notamment à nos amis de gauche, de parler davantage du contexte que du texte. Juste reproche. Nous sommes particulièrement étonnés que la grande absente des discours sur un hypothétique « Oui de gauche » soit la « concurrence libre et non faussée », leit-motiv du projet de traité présent à toutes les pages ou presque. Tout juste entend-on, de la bouche des Dominique Strauss-Kahn, Jack Lang ou Pierre Moscovici ce bien pauvre argument : « comment donc ? vous voudriez peut-être que la concurrence fût (notez le subjonctif) contrainte et faussée ? ». Et notre étonnement continue quand nous constatons que leurs interlocuteurs du Non ne relèvent guère ce propos. Alors, mettons les choses au point : oui, nous sommes pour une « concurrence contrainte et faussée » lorsqu’il s’agit de l’intérêt général. Non, nous ne voulons pas que les « services économiques d’intérêt général », avatars du défunt service public, soient « autorisés » (merci...) « dans le cadre de la concurrence libre et non faussée ». Oui, nous souhaitons que le service public soit conforme au principe d’égalité. Non, nous ne voulons pas qu’il se dénature en « service universel » en direction des plus pauvres, version moderne de la charité. Le droit de circulation des personnes dans l’Union, pour être effectif, a besoin de transports publics. Le droit à l’éducation a besoin d’un service public. Le droit au logement nécessite, pour être effectif, des logements sociaux : tiens, mais ça fausse la concurrence, ça, le logement social. Nous comprenons fort bien que les « ouistes » de droite se satisfasse d’une « concurrence libre et non faussée ». Pour les autres, nous restons babas. Autre non-dit : les partisans du Oui, toutes tendances confondues cette fois, jouent les ramenards sur l’ « isolement de la France » en cas de victoire du Non. Ils oublient, les chéris, que l’issue du référendum est plus qu’incertaine au Danemark, en Pologne, en Grande Bretagne. Ils oublient qu’un récent sondage aux Pays-Bas, pays cofondateur de l’Union, donne ce résultat renversant : 11% pour le Oui, 8% pour le Non, 66% qui ne veulent pas voter et le reste qui se tâte (ah, l’enthousiasme des peuples envers ce TCE !). Ils oublient que les opposants au TCE en Suède et en Belgique se battent avec énergie pour obtenir un référendum, que leurs gouvernements refusent alors que les enquêtes d’opinion donnent le Non majoritaire en Suède et en fort progrès en Belgique. Comme on le voit, les « moutons noirs » se multiplient. Raison de plus pour tenir bon, de continuer à débattre et à convaincre en dépit de la déferlante pour le Oui qui envahit la plupart des médias et qui, elle, ne faiblira pas jusqu’au 29 mai.
Commentaires