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Les CHRONIQUES NARQUOISES et autres de Jacques Franck (mars 2014)

lundi 17 mars 2014
par  Jacques Franck
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La Royauté Sociale

Étrange slogan. "La Royauté Sociale de Notre Seigneur Jésus-Christ sur les nations", tel est le but politique affiché par l’Institut Civitas. Noble projet, dont le caractère progressiste et la hardiesse réaliste n’échapperont à personne. En fait, derrière ce programme d’apparence déjantée se cache un des pires organismes de destruction des libertés. La fine fleur de l’intégrisme religieux situé à la droite de l’extrême–droite. L’incarnation de l’intolérance sans concession. Joli palmarès : interventions brutales par jet d’huile de vidange sur les spectateurs d’une pièce qui ne plaisait pas à ces bons chrétiens au Théâtre de la Ville. Même chose au Théâtre du Rond Point.

Civitas occupa une place de choix parmi les instigateurs des manifestations homophobes du printemps 2013. A un point tel que les autres organisateurs ne les considéraient qu’avec des pincettes. La hiérarchie catholique elle-même se démarqua de ce Civitas-là. Civitas entretient des relations… fraternelles avec la Fraternité de Saint Pie X, autre groupement démocratique spécialisé dans le combat sacré contre l’avortement et l’euthanasie. Civitas rompt des lances contre la théorie des genres, sans savoir plus que quiconque ce que ça veut dire. A ce titre, ses fougueux paladins ont mis en demeure Arte de déprogrammer un film qui ne leur convenait pas. Et incité le public à noyer la station télé de lettres, SMS, mails, coups de téléphone comminatoires. Cette démarche a eu le succès qu’elle méritait : nul. Avis aux nostalgiques de la Sainte Inquisition : vous trouverez toujours le peuple de ce pays levé contre votre obscurantisme médiéval.

La pollution

Nous la subissons sous toutes ses formes. L’air que nous respirons est chargé de particules, petites et grandes, qui ne font de bien ni à nos poumons ni à notre équipement cardiovasculaire. J’énonce là une évidence et je ne m’étendrai pas, car il y a bien pire. Je précise que je ne suis pas un fanatique des princes qui nous gouvernent actuellement, loin de là. J’ajoute que les méthodes d’investigation telles que les écoutes téléphoniques ne m’ont jamais fait bramer d’enthousiasme, au contraire. Mais les gémissements de vierges effarouchées des politiciens de l’UMP et consorts à l’encontre des magistrats entretiennent un véritable nuage de microparticules qui nous polluent dès que nous ouvrons la télé, la radio et nombre de journaux. L’objet de cette indignation vertueuse, la microparticule polluante victime d’une recherche légale de la vérité, n’est autre que l’ancien chanoine de Saint-Jean de Latran, Nicolas Sarkozy en personne.

Une autre pollution menace, et même atteint les plus vulnérables de la société : la particule austérité, et sa variété la misère. On nous signale que les retraites seront "gelées", c’est à dire amputées de leur pouvoir d’achat ou de survie. Sans doute pour punir leurs titulaires de vivre trop vieux. C’est logique. On ne peut pas réduire les cotisations sociales et augmenter les retraites. A quoi rimerait alors le Pacte de responsabilité ? Il perdrait son pouvoir de pollution. Reste la mère de toutes les pollutions, la méga particule qui étouffe le monde : la primauté du profit de quelques uns sur le bonheur de tous. Le capitalisme. Pour dépolluer, il faudra du travail. Ce n’est pas facile. Mais c’est possible.

La barbarie

La liste est loin d’être exhaustive. Je ne parle que de ce que j’ai vu.

En Pologne, à Auschwitz, les Allemands ont exterminé des millions de juifs, tziganes, résistants de toute l’Europe. Travail forcé, coups incessants, torture, famine, maladies, chambres à gaz, fausses expériences médicales furent les instruments de l’idéologie nazie. Les camps sont devenus un musée. Les ruines des fours crématoires et les lieux d’assassinats, les vitrines contenant les objets volés aux déportés par les SS, les photos et documents écrits témoignent de l’horreur. Le souvenir de la sauvagerie raciste est entretenu. Les générations à venir ne peuvent pas oublier.

Au Cambodge à Phnom Penh, les Khmers Rouges procédaient à l’incarcération, à la torture, à la pendaison de dizaines de milliers de femmes et d’hommes qu’ils prenaient soin de photographier, au Centre S 21, un ancien établissement scolaire. A Battambang, les Cambodgiens montrent aux visiteurs une cavité creusée dans une colline. . Par une espèce de cheminée, les bourreaux précipitaient leurs victimes. Les squelettes s’y entassent en nombre. Dont des enfants. La mémoire de cette abominable période ne s’effacera pas.

A Saint Laurent du Maroni, en Guyane française, des bagnards étaient enfermés dans un camp épouvantable ; les pieds enserrés par des fers jour et nuit, sous les coups des gardiens, sous la menace permanente de la guillotine. Dans la forêt, on mourait de palu, de dysenterie, de mauvais traitements. Au large de Kourou, l’Île Saint Joseph abritait pour des années les "fortes têtes’ dans des cellules sans toit dont ils ne sortaient jamais. L’Île du Diable était réservée aux prisonniers d’État (Alfred Dreyfus, reclus dans une cabane). Le bagne de Guyane a été supprimé en 1946. Sur la plus grande place de Saint Laurent, une statue du bagnard inconnu rend hommage aux victimes de la brutalité de cette institution. Sur l’Île du Diable sont implantés maintenant des radars chargés de suivre les trajectoires d’Ariane et de Soyouz lancés depuis le centre spatial de Kourou tout proche.

Aux Etats Unis, en Louisiane, les planteurs de coton s’enrichissaient au XIX° siècle sur le dos des esclaves noirs. Vendus comme du bétail mais traités comme on ne traitait pas le bétail. Ces derniers vivaient dans des baraquements, soumis à un travail épuisant, aux séances de coups de fouet, aux viols et au mépris des puissants On ne les tuait pas : ils faisaient partie du patrimoine des planteurs. Sur les bords du Mississipi, tout un peuple était réduit à l’état de sous-humanité. Maintenant, entre La Nouvelle Orléans et Bâton Rouge, on visite ces plantations. On admire des paysages harmonieux, de somptueuses demeures, de belles dames en crinoline qui accueillent le touriste .Mais où sont les références à l’esclavage qui a fait cette richesse ? Rien, pas de traces des lieux de vie des noirs, pas d’évocation de la violence de leur exploitation. Pas d’éléments du souvenir. Pas la moindre critique de la brutalité honteuse des "bons maîtres", du coton. Mais, pour l’honneur de l’Amérique, des voies s’élèvent parfois. Allez voir d’urgence le film de Steve McQueen, 12 Years a Slave, dénonciation forte et courageuse de l’exploitation et du racisme.


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