GAUCHE AVENIR MARCHE, DES CAILLOUX DANS LES CHAUSSURES
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Belle affiche que celle proposée par Gauche Avenir lundi 5 mai 2008 à Choisy-le-Roi : Benoît Hamon et Jean-Pierre Chevènement, le jeune loup ex-espoir du rocardisme et le vieux lion républicain, les « deux cultures » du congrès de Rennes incarnées par deux générations réunies à la même table. De quoi attirer les passionnés de politique !
Benoît Hamon s’en est prudemment tenu à une analyse économique sévère du fonctionnement de l’Union européenne, dont il est l’un des spectateurs engagés privilégiés au Parlement de Strasbourg. JPC lui a fait écho et, après avoir rappelé qu’il parle avec l’autorité de l’expérience puisqu’il connut Guy Mollet et Paul Reynaud, a appelé à l’unité de la gauche en mettant au passage un peu d’eau dans son vin. Par exemple, il a estimé que la querelle des girondins et des jacobins était secondaire, que les partisans de l’Union Européenne et ceux du cadre national, les régionalistes et les départementalistes n’étaient séparés par aucun obstacle infranchissable, que la gauche pouvait se rassembler sur le contenu des politiques à mener, quel qu’en soit l’échelon. Il a enfin tracé une véritable feuille de route avec étapes datées : assises départementales, états généraux, congrès d’unification en 2011 (le quarantième anniversaire d’Epinay, le hasard fait bien les choses), désignation d’un candidat unique à l’élection présidentielle. Un tel grand parti de la gauche aura besoin de tous, tant de ses modérés que de ses radicaux - les communistes et les altermondialistes. Il faut à tout prix, selon l’ancien rédacteur de Projet socialiste pour les années 80, éviter un Linkspartei à la française, qui cliverait durablement la gauche.
S’exprimant avec urgence et passion, Marie-Noëlle Lienemann s’est ralliée à ce point de vue, que n’a pas renié non plus Paul Quilès. Ce fut moins clair de la part de Claude Cabanes, qui semble toujours jouer le poète communiste de service à l’accent chantant, dans ce type de réunion. Lui s’était surtout mal remis d’une déclaration récente de Manuel Valls qui se découvrait aujourd’hui plus proche de Clemenceau que de Jaurès. Avant de juger, sans doute faudrait-il savoir de quel Clemenceau il s’agit (vu la longue durée de son parcours politique) et pourquoi un maire de ville de banlieue difficile exposé quotidiennement à la délinquance se réfère soudain à cette figure de républicain d’ordre. Enfin, Ivan Levaï a joué le rôle de M. Loyal paternaliste, distribuant la parole au public en glissant moult digressions mnésiques personnelles (comme « l’appel de Château-Chinon » aux socialistes en mai 1968) pas toujours exactes (le congrès de Nantes du PS c’était 75, Ivan, pas 77 ; les Palois apprécieront) ni forcément bienvenues (vibrant hommage à Jean Auroux, présent dans la salle, alors que ses lois ont pour la première fois en France permis les accords « in pejus », c’est-à-dire en recul sur l’état existant du droit).
La diversité des analyses aujourd’hui à gauche, les velléités de « nouveau parti anticapitaliste » des uns, les réflexes de perpétuation des appareils chez d’autres, l’aspiration à un Linkspartei chez d’autres encore (dont plusieurs sont partie prenante de Gauche Avenir), sans oublier le choc des ambitions des hiérarques du PS et autres sujets qui fâchent font tout de même beaucoup de petits cailloux dans les chaussures de Gauche Avenir, qui aura intérêt à se munir de bonnes bottes de sept lieues.
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