SARKOZY A PERPIGNAN : IL N’A PAS CHANGE !
par
popularité : 1%
Un an et demi après des affrontements entre communautés à Perpignan, Nicola Sarkozy, faute de pouvoir sans risque médiatique se rendre à Argenteuil ou La Courneuve, revient sur place. Une petite réunion dans un quartier, où on ne peut pas dire qu’on l’attend avec des fleurs, puis un meeting nettement plus encadré et nettement moins populaire, où il reprend le grand air de la remise au pas. Air connu : voici ce qu’écrivaient Pierre Defrance et Jean-Luc Gonneau peu après la première visite à Perpignan en 2005 (in "Sarkozy, l’avenir d’une illusion", Editions de l’Aube, mars 2006)
Quand Nicolas Sarkozy recommencera avec la même énergie à employer les mêmes méthodes dès son retour aux affaires, il s’agit d’autre chose que d’une simple fièvre agitatoire. Dès les premiers jours de son auto-nomination inédite dans le cabinet Villepin, il définira une nouvelle orientation qui peut se résumer ainsi. Le thème de la lutte contre la délinquance est trop général, il faut la cibler dans les quartiers sensibles.
L’actualité va lui fournir matière à démonstration et ce dès son entrée en fonction. C’est d’abord à Perpignan, où des affrontements entre des membres de la communauté gitane et maghrébine avaient lieu depuis plusieurs jours, qu’il assure, bis repetita, la population de « frapper fort et vite » et de « débarrasser la France des voyous » , puis à la Courneuve, à la cité des 4 000 où il excelle dans l’excès, en promettant de nettoyer ce quartier au karcher à la suite de la mort, par une balle perdue, du petit Sidi Ahmed. La Courneuve où, selon la municipalité, les effectifs de police ont diminué de 30 % depuis 2002, et doivent de plus couvrir les communes voisines de Dugny et du Bourget.
Rappelons qu’à Perpignan, Gitans, pieds noirs et travailleurs du Maghreb cohabitent depuis près de cinquante ans sans incident majeur. Mais à l’évidence, au fur et à mesure de la désindustrialisation, de la montée du chômage, les antagonismes se sont exacerbés. Encouragés par le communautarisme du maire de Perpignan, Jean-Paul Alduy, qui entend rapprocher les communautés autour « du principe d’amour du prochain, un lien d’échange entre toutes les religions, seul capable de faire passer les hommes du stade de l’animal... à celui d’une société soucieuse de respect et d’écoute » . La religion plutôt que le respect des règles communes. Pour Alduy, il s’agit de construire de préférence au moule national et républicain qui uniformise « la société de l’archipel où chacun vit dans son île et construit l’archipel des valeurs et des richesses communes. Les quartiers sont des îles. »
Dominique de Villepin ne s’y trompera pas et rappellera, quelques jours après la visite du ministre de l’Intérieur, son credo : « Choisir le communautarisme, c’est tourner le dos à la France qui donne à chacun de ses enfants des droits universels et des devoirs » . Nous sommes ici, dit-il, pour le « pacte républicain » et il signe loin des caméras pour bien marquer sa différence avec « son » ministre de l’Intérieur, des conventions pour un montant de deux cent quarante huit millions d’euros pour la rénovation urbaine, l’éradication de l’habitat indigne et la création d’une maison de l’emploi.
Quand à la Courneuve et à la cité des 4 000, de Toufik Ouanes, un gamin de dix ans tué par un voisin irascible en juillet 1983 au petit Sidi Ahmed tué par une balle perdue vingt-deux ans plus tard, c’est un même constat qu’il faut hélas dresser, celui d’un échec qui est aussi celui de la réhabilitation de la plupart des zones urbaines sensibles. Ce n’est pas avec les promesses de Nicolas Sarkozy, quand pour la troisième fois en moins d’un mois, il se rend à la Courneuve avec moult caméras et interpelle les jeunes de la cité : « Mon raisonnement est simple : punition immédiate pour celui qui rend impossible la vie des autres ; main tendue immédiatement à celui qui veut s’en sortir. C’est-à-dire : des moyens pour les associations, des formations pour les jeunes », que l’on règle une question fort épineuse qui est celle de l’abandon d’une partie des classes populaires depuis vingt ans . Père Noël en été, VRP de l’ANPE, Nicolas Sarkozy annonce que « deux cent cinquante sept emplois directs ont été recueillis » auprès de diverses entreprises au bénéfice des jeunes de la ville de la Courneuve. « Et qu’au 25 juillet, vingt et une entreprises et structures se sont mobilisées sur cette opération » . Les autres quartiers apprécieront. Là où il faudrait un plan de grande ampleur qui s’attaque tant au bâti qu’à la situation des personnes, ne sont proposés qu’une approche moralisatrice et populiste, qu’un désengagement de l’Etat qui laisse de plus en plus le soin aux collectivités locales de financer sur la fiscalité locale les diverses réhabilitations et prises en charge. Là où il faudrait un véritable plan d’éducation populaire et national pour former une jeunesse trop souvent livrée à elle-même, la réponse est d’abord d’essence répressive. La recherche d’un équilibre entre le respect des devoirs républicains qui s’imposent et la garantie d’un accès aux droits pour les personnes les plus défavorisées est une démarche exigeante qui se marie fort mal avec le « barnum médiatique ».
Commentaires