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TRIBUNE LIBRE : UNE LUEUR A GAUCHE DE LA GAUCHE ?

samedi 28 mai 2011
par  Jean-Pierre Lefebvre
popularité : 62%

L’élément nouveau, c’est l’effacement de Besancenot. Difficile de ne pas créditer Krivine d’avoir choisi sciemment cette direction. Il y aura un candidat NPA mais sa légèreté ouvre un boulevard à Mélenchon, s’il en a le souffle. Si la magouille oligarchique fait passer DSK du FMI où l’a mis Sarkozy à la candidature PS, cela nous promet un avenir grec ou portugais que seul peut décourager le vote massif à gauche de la gauche ! Chez les Verts, même évolution conduite par le CAC 40 par sondages et médias interposés : leurs militants ont partagé tous les combats de la gauche radicale, mais leur candidat passe de Joly, propre sur elle mais indéterminée politiquement, à Hulot qui, lui, sort carrément de l’écurie Bouygues !

Un Mélenchon à plus de 10 % ouvrirait des pistes pour des changements radicaux quoique ses récentes déclarations tontonmaniaques n’y aident guère. Pas plus que son credo sur le « renforcement des services publics », lisez celui des appareils d’Etat bourgeois. Roger Martelli, sans soutenir aveuglément Mélenchon parie sur le développement d’un courant politique transformateur autour de sa candidature quand Michel Naudy, se souvenant du passé mitterrandien de Mélenchon, préfère à cette aventure risquée, de nouvelles formes d’engagement dont on se demande comment elles pourraient ignorer la réalité pesante du mode d’élection présidentielle, fort fâcheux mais pour lors incontournable. Pourquoi ne pas parier sur la création d’un parti de gauche anticapitaliste remplaçant doucement le vieux PC dont le communisme sous perfusion PS, au delà des fusées mystiques de Badiou, nous replonge dans les sinistres totalitarismes staliniens, maoïstes, castristes, etc. Plutôt que de cette chimère communiste, au contenu désormais ambigu et obsolète, parlons plutôt d’autogestion socialiste, cela risque d’occuper un bon moment les 92 % des actifs que constituent les salariés. La politique joue du hasard et de la nécessité, risquons donc la création hypothétique d’un grand courant populaire à la tunisienne, sous peine de jouer les Achille.

Jean Lojkine, PCF, dans une remarquable analyse publiée par la fondation Gabriel Péri, montre comment le programme commun de 1981, de Marchais et Mitterrand, dans le droit fil de la déviation économiste du Capital monopoliste d’Etat, a tourné le dos aux solutions autogestionnaires qui pouvaient amorcer un changement du système. Benoît Borrits, des Alternatifs, développe des thèses parallèles sur 1981, pointant l’occasion historique manquée : la chute du taux de profit pouvait être annulée tout autrement que par un déplacement de 10 % du PIB du salariat vers l’actionnariat, qui s’est aggravé sous Sarkozy en induisant la crise financière : il eut fallu élargir massivement le pouvoir des travailleurs dans l’entreprise, engager une transformation du mode de production. Le projet autogestionnaire des Alternatifs (mai 2011) comporte une énumération foisonnante de perspectives sociales, écologiques, anticapitalistes et autogestionnaires. C’est donc un document précieux. Il fait cependant, signe des temps, une terrible impasse sur la question centrale de notre hexagone colbertiste : rien sur le dépérissement de l’Etat ! C’est un recul devant la pression archaïque des vieux courants post soviétophiles et corporatistes qui empêchera ces propositions de s’emparer des masses : aucun salarié du privé ne peut soutenir ce silence assourdissant. Sur l’autogestion elle-même, il manque un ou deux mots d’ordre centraux, clairs, forts, par exemple création de comités de quartier souverains, extension partout des pouvoirs des CE.

Castoriadis en 1985 (Thucydide, la force et le droit) écrivait : « nationaliser ou non les entreprises est un choix guère plus important que celui de peindre la façade de leur siège social en vert, en jaune, en rose ou en noir… la bureaucratie managériale qui dirigeait Rhône Poulenc – plus ou moins cooptée, avec une intervention minimale du capital privé – devient désormais une bureaucratie managériale nommée par les socialistes. Cela fait des places pour des cousins, des caciques locaux du parti, des techniciens et même des électeurs acquis au parti, etc. Cette modification n’a rien à voir avec une quelconque avancée vers une société autonome … »

Gadrey montre (Adieu à la croissance), graphiques à l’appui, qu’au Nord, au-delà de 15000 dollars de PIB par habitants, le taux de satisfaction de la vie quotidienne n’augmente plus ! Ce qui montre que la gadgétisation, le culte effréné de l’avoir n’ont plus aucun sens et qu’une vie plus économe, plus créative devrait être recherchée d’urgence quand les conséquences de la surproduction sur la destruction de l’environnement sont désormais admises par tous les scientifiques. Ses affirmations sur l’impossibilité d’établir des critères de rentabilité pour les services sociaux sont moins convaincantes et semblent ressortir davantage de la défense corporatiste : tout service doit tendre vers un équilibre entre son coût et le service rendu, compte tenu de la rentabilité moyenne du travail et des autres besoins à satisfaire, cela paraît une évidence pour qui dispose d’une calculette !

Hervé Kempf, L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie ! (Seuil), montre comment dans nos prétendues démocraties, le pouvoir réel est capté par l’oligarchie, le CAC 40. Possédant tous les grands médias, avec les présidentielles ils inversent totalement l’expression du profond mécontentement du peuple français, faisant le jeu de l’ultime et dangereuse solution proto fasciste des Le Pen, père ou fille, armée de réserve du conservatisme capitaliste. Pour sauver la planète terre qu’ils dévastent, Kempf appelle à leur enlever ce pouvoir usurpé en établissant le contrôle direct des citoyens sur leurs mandants, citant Castoriadis : La question n’est pas d’éliminer les leaders, c’est d’instaurer un rapport différent de la communauté avec l’individu exceptionnel. Par exemple à Saint-Denis, où le leader, gauche de la gauche, assis sur un matelas de 10 000 emplois, décide de faire raser 440 HLM inventifs et écologiques. Borloo, hostile à cette architecture « mai 68 », lui a en effet promis 180 millions pour les casser quand les huit cents locataires demandaient de les réhabiliter pour dix fois moins cher ! On n’a tenu aucun compte de leur volonté, médias (-part et autres) ont désinformé et le quartier est démoli ! Combien d’innombrables exemples d’étouffements démocratiques et de gabegies de ce type ? Un nouvel édifice démocratique municipal est donc à inventer où le débat permanent de comités de quartiers souverains empêcherait de tels dénis, avec un taux de représentation proportionnelle unique sur tout le territoire : un élu pour deux cents électeurs, formant un corps de centaines de milliers de militants intervenant à tous les niveaux de l’Etat pour en transformer la machine.

Dans les livres d’Edgar Morin, de Montebourg ou de Besancenot, etc., partout fleurissent de vibrants hommages à la participation démocratique mais assortis d’une timidité manifeste quant aux mesures proposées pour engager une transformation significative de la société qui en finisse avec la manipulation oligarchique. Pour les autres, Hulot, DSK, Hollande, etc., ils vont se sentir subitement le cœur à gauche et à Porto Alegre, le temps d’un scrutin.

Pour qu’une perspective claire soit enfin ouverte, il faudrait que Mélenchon et le PC affirment clairement des choix autogestionnaires et de dépérissement de l’Etat, dans les municipalités d’abord, socles de l’institution puis dans toute la pyramide étatique, jusqu’à supprimer la monarchie élective qui a atteint des sommets avec Sarkozy. Il faudrait reprendre et compléter le programme du CNR dont parle Hessel, étendre les pouvoirs des comités d’entreprise au bilan, à l’embauche, à la stratégie, au partage des bénéfices. Substituer à la croissance aveugle l’allègement du temps et de la peine au travail, un développement économe, l’épanouissement des personnalités. Longue marche rien moins qu’aisée, semée d’embûches innombrables mais la seule à éviter le chaos qui gronde. 2012 : face à la crise, choisir avec audace la bonne bifurcation, oser ouvrir le chantier de l’après capitalisme !

Jean-Pierre Lefebvre est urbaniste


Commentaires

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lundi 28 novembre 2011 à 22h15 - par  Desmodue

Ne crains tu pas qu’il y ait "un tantinet" de résistance des actionnaires et des dirigeants à mettre cette proposition en application ? Et qui d’ailleurs n’est pas très nouvelle...

Et quelle confiance accorder aux apparatchiks syndicaux qui immanquablement se retrouveraient "administrateurs salariés", soumis à quelles pressions, voire à quelle corruption ? Qui elles aussi existent déjà bien que leur pouvoir soit assez formel...

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lundi 28 novembre 2011 à 22h10 - par  Desmodue

« Pour qu’une perspective claire soit enfin ouverte, il faudrait que Mélenchon et le PC affirment clairement des choix autogestionnaires et de dépérissement de l’Etat, dans les municipalités d’abord, socles de l’institution puis dans toute la pyramide étatique,.... »

Mais ça y est, on l’a déjà ou presque, le dépérissement de l’état ... l’état néo libéral s’étant privé des 3/4 de ses prérogatives.
Légiférer, transformé en "transposition des directives européennes dans le droit national". Battre monnaie, soin laissé à une BCE "indépendante", de tout contrôle politique en tout cas.
Voter son budget, désormais censurable par la bureaucratie communautaire...
liste non exhaustive.

Ne lui restent que le pouvoir de taper sur la tête des gens si ça remue trop et celui, et encore, d’expédier quelques bombes sur les sbires de Khadafi ou autre patibulaire de service. Réalisant ainsi les voeux de MM. Hayek et Friedmann, dont l’un des deux prétendait qu’il fallait « faire maigrir l’état jusqu’à ce qu’on puisse le noyer dans la baignoire. »

Ce texte c’est une ode à la ligne Maginot, qui comme chacun sait protégeait parfaitement en 1939 de l’offensive précédente de 1914. Manque de bol ça s’est passé complètement différemment...

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lundi 13 juin 2011 à 23h11 - par  Rosay

INVESTISSEMENT DES SALARIES DANS L’ENTREPRISE

Ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul ..............
Habiller tout le monde c’est à dire partager ...............

Une entreprise est composée de trois entités :

Les actionnaires ( fonds propres de l’entreprise )
Le Patron ou Conseil d’administration (pouvoir de décisions )
Les salariés (pouvoir de production)

Chacune des trois étant indispensables aux autres.

Aujourd’hui, seuls les actionnaires et le patronat sont les grands bénéficiaires des produits tirés de l’entreprise.
Cet état de fait est péjoratif et ne stimule l’intérêt des ouvriers producteurs au sein de l’entreprise et ou toute activité dont le principe est la production.

Pour donner droit aux ouvriers producteurs au sein d’une entreprise il faut donner le pouvoir d’agir sur le conseil d’administration et ou l’organisation générale de l’entreprise , il est nécessaire de créer un entité juridique semblable en quelque sorte à un groupement d’actionnaires minoritaires.

Concrètement :

La création d’une coopérative avec une entité juridique propre, au sein de l’entreprise même, composée de tous les salariés de ladite entreprise.
la Coopérative ( un homme = une voix) nomme un ou plusieurs représentants qui siège(nt) au Conseil d’Administration.

Le nombre des représentants de la coopérative doit être calculé de manière à constituer une minorité de blocage.(sans quoi elle n’aurait aucun pouvoir sur les décisions du Conseil d’administration).

La coopérative a un droit de regard sur les comptes (bilans et hors bilans) et peut saisir à tout moment la justice en sa qualité de personne morale.

La Coopérative bénéficie d’un tiers des profits de l’entreprise qu’elle redistribue aux salariés . Les salariés sont libres d’en faire ce que bon leur semble ( réinvestir dans la société ou autre).

Tout le monde se sent concerné.
Personne n’est spolié.

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