LES VŒUX EN TOC DE L’HOMME AUX TICS
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Bon, les vœux présidentiels font partie des exercices obligés, donc convenus, afférents à la fonction. Qui se souvient de ceux pour 2011, mis au rencart aussi vite qu’ils avaient été prononcés, et même remplacés sur bien des points par leur exact contraire, ne pouvait pas attendre grand-chose de ceux pour 2012. Ceux-là au moins ne risquaient guère de déceptions : quand on n’attend rien…
Il est loisible de distinguer dans les vœux présidentiels trois catégories principales. La première tient aux engagements indispensables parce que leur omission ferait tache, mais dont on sait qu’ils ne seront suivis d’aucun effet. Le plus bel exemple concerne l’engagement de lutter contre le « dérèglement de la finance ». Discours usé jusqu’à la corde depuis les martiales paroles présidentielles sur la « moralisation du capitalisme » et dont on a pu constater depuis la totale absence de quelque mesure que ce soit pour mettre fin à ce dérèglement. A ce sujet, les gouvernements d’Obama et de Cameron, qui ne sont pourtant pas de farouches révolutionnaires, en ont fait plus que lui. Pas difficile, cela dit, de faire plus que zéro. Et ce n’est pas la très vague promesse d’une taxation sur les transactions financières (laquelle ? quand ? où ? comment ?), déjà annoncée sans résultats qui convaincra grand’monde. Autre figure imposée : la solidarité. A Jospin qui ne voulait laisser personne au bord du chemin, Sarkozy fait écho en osant prétendre ne pas laisser « de côté ceux qui souffrent déjà des conséquences douloureuses d’une crise dont ils ne sont pas responsables », alors même que les plans de rigueur successifs rognent avec constance les dispositifs destinés justement à ces souffrants. Au passage, notons que Sarkozy doit souffrir aussi d’une crise dont il ne sent d’aucune manière responsable. On ne va certes pas lui coller tout sur le dos, même si l’envie nous titille, mais nul ne saurait oublier que dans le bal des faux derches qu’ont constitué les G8 et autres G20, réunions, tout de même, des politiquement responsables de la crise, et a priori en charge de la surmonter, le surprésident Sarkozy s’est pavané aux premières loges de ces monuments d’inutilité. Cerise avariée sur la gâteau pourri présidentiel : « Mon devoir est de faire face et de vous protéger ». On ne connaît que trop cette chanson : la seule protection dont fut capable le président, c’est celle dont il a entouré les plus riches de nos concitoyens. Qui pourrait penser un seul instant qu’il serait capable d’autre chose ?
La seconde catégorie est celle des mensonges, ou au mieux de l’accommodement avec la réalité. Ainsi, prétend-il, la France a « tenu bon » pendant la crise. Il faudra demander aux centaines de milliers de personnes qui ont perdu leur emploi cette année, aux millions de précaires, aux cohortes de mal logés alors que la spéculation immobilière continue, aux millions de personnes qui restreignent leurs soins faute de sous, aux profs à la dérive à coup de suppressions de postes, aux policiers hagards à force dee traquer le sans-papier, de verbaliser la prostituée ou le fumeur de joint alors que les trafiquants traficotent de plus belle, les maquereaux maquereautent tranquilou, et les voleurs volent, plus qu’avant. Le seul truc étonnant, dans tout çà, c’est que le président et ses affidés « tiennent bon », alors qu’ils méritent largement le goudron et les plumes. « Il faudra changer notre regard sur le chômage ». Tiens donc. Comment le regardait-on, jusqu’en 2011 ? De biais ? Le dos tourné ? Et comment le regardera-ton en 2012 ? A coup de formations, dit-il. Lesquelles ? De ces stages parking de sinistre mémoire ? Amis, chômeurs, soyez contents, vous n’aurez pas d’emplois, mais des stages. Il est vrai que nos jeunes sont déjà habitués à la chose. Autre arrangement avec le réel : « nos comptes sont redressés ». Où a-t-il vu jouer ce sketch, celui qui a creusé la dette plus encore que ses prédécesseurs ?
La troisième catégorie, avec Nicolas Sarkozy, est la plus perverse : sous couleur d’annoncer une « bonne » nouvelle (rappelons-nous le travailler plus pour gagner plus), on nous refile non pas une jolie couleur, mais une sacrée couleuvre : la TVA sociale. Abaisser le coût du travail sans baisser les salaires ? Pas garanti avec ce machin-là. Protéger des importations-dumping ? Pas évident dans une Europe passoire. Stimuler l’emploi ? Encore moins évident avec une demande qui devrait fléchir car. Car le seul résultat certain de ce bousin, c’est que la TVA « sociale », c’est avant tout une TVA plus élevée. Payée par qui ? Vous avez deviné, par tous, et notamment par les moins riches. Ah, parlez-nous du « président protecteur », on ne s’en lasse pas.
Il est en conséquence urgent que les élections de 2012 permettent une alternative à ces palinodies. La gauche, toute la gauche, a une énorme responsabilité. Et tout particulièrement le candidat du Parti Socialiste, actuellement le mieux placé selon les sondages. Pour nous débarrasser de l’équipe Sarkozy, il lui faudra tout autre chose que la « rigueur douce » à laquelle il semble se tenir, tout autre chose que cette « adresse aux français » publiée via Libération, dans laquelle la critique du bilan de Sarkozy est globalement juste, mais où aucune proposition n’apparaît. Le vocabulaire utilisé fait malheureusement penser à ces « éléments de langage » qui polluent la vie politique. A vouloir à tout prix « parler président », c’est-à-dire tel qu’on imagine un président dans les officines de communication si proches de Manuel Valls, on perd de l’humain, ce qui est un peu fâcheux pour un type qui se veut « président normal ». Un président « normal », ami François, ce n’est pas obligatoirement un président stéréotypé. Paradoxalement, les propositions de Jean-Luc Mélenchon et du Front de gauche, souvent décrites comme gênantes pour le candidat socialiste, devraient au contraire l’aider à aller dans la bonne direction. Il en va de même, modestement mais pas tant que ça de nos observations, dont le ton parfois vif ne saurait masquer la volonté constructive.
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